Le bambou : solution écologique ou arnaque industrielle?

Publié le 22 mars 2011 par Laplaceverte
 On trouve de plus en plus de produits à base de bambou. Du textile au papier en passant par la cuisine, il est partout et on vante ses nombreuses propriétés écologiques. Un engouement qui, comme souvent, cache des abus de la part de nos amis industriels. Petit tour d'horizon.

Carte d'identité du Bambou


Le bambou appartient à la famille des poacées et à la sous-famille des Bambousoidées. On en recense environ 80 genres et plus de 1300 espèces.
Le bambou est caractérisé par un chaume creux lignifié, à la croissance très rapide. Il en existe de toutes tailles, certaines espèces mesurant jusqu’à trois mètres.
On le trouve principalement en Asie tropicale et subtropicale, mais il est naturellement présent sur tous les continents, à l’exception de l’Europe - où il est cultivé - et de l’Antarctique.

Caractéristiques écologiques du bambou

Le bambou fixe bien plus de CO2 que les arbres et libère 30% d’oxygène de plus. L’étroitesse de ses feuilles facilite l’infiltration de l’eau, son système racinaire très dense, constitué de rhizomes, limite l’érosion édaphique et restaure les sols appauvris.
C’est une plante extrêmement résistante, dont la culture ne nécessite ni engrais, ni produit phytosanitaire.
En revanche, les bambous peuvent devenir invasifs et menacer ainsi la biodiversité des écosystèmes.

Utilisations du bambou

Outre ses vertus décoratives, le bambou est paré de multiples qualités et s’adapte à diverses utilisations. Sa résistance et sa légèreté en font un matériau idéal pour les échafaudages des gratte-ciel, les meubles, parquets, tuteurs, cannes à pêche, arcs, outils de dessin, instruments de musique et ustensiles divers (vases, pots à tabac, étuis, paniers...). On construit même des ponts, des maisons en bambou.

Il est également comestible, et pas uniquement pour les pandas géants!
On peut manger les jeunes pousses bouillies ou grillées, en salade par exemple – on retrouve le bambou dans beaucoup de mets asiatiques. Les graines peuvent être moulues et transformées en farine et certaines espèces peuvent être cultivées à des fins de pâturage pour le bétail.
La médecine naturelle et la phytothérapie reconnaissent au bambou des vertus telles que la reminéralisation de l’organisme, la fixation du calcium, le renforcement de la résistance physique et le ralentissement du vieillissement.
On peut aussi le transformer en pâte à papier.
L’industrie textile s’est également emparée du bambou et vante ses propriétés – anti-transpirant, antibactérien, absorbant...
La Chine a récemment décuplé ses exportations de bambou, et sous couvert de préservation de l’environnement, des dizaines de marques commercialisent des vêtements, des couches lavables auréolées de bonne conscience écologique. Et pourtant...

La culture du bambou: panacée écologique?


On trouve sur le bambou toutes sortes d'éloges, notamment en ce qui concerne sa culture. Une part importante de la production est issue de petites exploitations indépendantes souvent certifiées qui apportent des revenus décents aux producteurs.
Les besoins des industriels de tiges de bambou de plus de trois ans garantissent une gestion pérenne des plantations: seules les tiges âgées sont prélevées, les jeunes tiges préservent les sols de l'érosion et permettent la régénération des plantes.
Malheureusement, le succès du bambou, sa production exponentielle, est incompatible avec cette gestion raisonnée. L'industrie - notamment celle du papier - a parfois recours à des méthodes scandaleuses pour se procurer des bambous à moindre coût. Profitant de la méconnaissance de certains pays, comme le Laos, de la valeur de leur forêt, elles ravagent les forêts naturelles de certaines zones peu accessibles pour y installer des plantations.
Autre antagonisme avec une culture raisonnée, on utilise souvent les jeunes pousses afin d'en extraire plus facilement les fibres. Autant dire que ces méthodes mercantiles surannées sont tout sauf une main tendue aux productions des pays du Sud. Retour à la case départ...

Fibre de bambou, piège à cons!


De plus en plus de produits textiles sont étiquetés "fibre de bambou", notamment les vêtements ou les serviettes de bain, peignoirs, etc. Or, de bambou dans ces articles, il ne reste pas grand chose: la transformation de la plante en fibre textile aboutit dans l'immense majorité des cas en viscose de bambou, à grand renfort de soude, sulfure d'hydrogène ou encore sulfure de carbone. Autant dire que pour une production respectueuse de l'environnement, on repassera...
En réalité, l'extraction des fibres est difficile lorsque le plant est âgé... Ainsi, les produits en fibre de bambou véritable sont issus de cultures peu respectueuses de l'environnement en termes d'exploitation agricole.

Que faut-il en penser?

Le bambou est une plante aux mille vertus: outil de construction, plante médicinale, aliment, outil ou objet du quotidien, les produits dérivés du bambou peuvent se décliner sous de multiples facettes. Puits de carbone et puissant oxygénateur, il est robuste et s'émancipe de l'utilisation de produits chimiques pour sa croissance. N'est-ce pas assez?

Ce que le bambou ne sait pas faire, ou mal, c'est devenir textile tout en conservant une empreinte écologique à faire pâlir plus d'une matière première, eh bien qu'il en soit ainsi!
Le bambou nous loge, nous soigne, nous nourrit, nous divertit mais ne nous habillera pas.
A l'impossible, nul n'est tenu.
dossier écrit par Anne-Laure Dubois pour eco-sapiens
crédits photo:
Panda par le niners ; bambou par providenz ; salle de bain par Conanil ; bambouseraie par couscouschocolat; chaussette par Wonder Mike eco-sapiens 27/07/09Photo: Bambou (FlickR/nicobilou) SOURCE