L’information, un personnage de livre comme les autres?

Par Benard

Le nouvel ouvrage de James Gleick relate l'histoire de cette entité, parfois d'une manière trop spirituelle.


- Couverture du livre The Information, de James Gleick. -

Les auteurs de la Bible sont morts depuis longtemps, ainsi que tous leurs contemporains. Le papier et l'encre d'origine ont depuis longtemps disparu. Pourtant, si certaines parties se sont perdues au fil des siècles, la majorité du texte a survécu, non seulement au papier et à l'encre, mais aussi à des villes, à des gouvernements, à des civilisations, et même à de nombreuses langues dans lesquelles avait été rédigée la Bible. Tout est devenu poussière, mais l'information s'est perpétuée dans une sorte d'immortalité quasi unique en son genre.

Mais quand on a dit ça, on n'a pas tout dit. L'information possède-t-elle des caractéristiques ou des propriétés identifiables et descriptibles? Répondre à cette question est le but que s'est fixé James Gleick en écrivant The Information, ouvrage brillant et ambitieux qui tente de restituer des siècles d'interrogations scientifiques sur la notion d'information. Pour une société qui estime vivre à l'âge de l'information, le sujet est crucial. Et si le projet manque d'atteindre totalement son but, c'est peut-être davantage du fait des limites de notre entendement que de l'auteur.
Changer l'information, c'est nous changer

Le personnage principal de The Information est, naturellement, l'information ou, plus exactement, la compréhension que l'on en a. Ainsi ce personnage traverse-t-il, sur 426 pages, des milliers d'années et une infinité de lieux. À l'instar de l'humanité, il prend corps en Afrique, puis parcourt la Grèce antique avant de séjourner quelque temps en Angleterre, pour assister à l'élaboration des premiers dictionnaires et à l'invention de la «machine à différences» par Charles Babbage. Tout au long du voyage, notre connaissance progresse et s'approfondit alors que nous sont dévoilés les secrets de l'information.

Car nous sommes face à un grand mystère. Telle une particule rare, l'information renferme des propriétés saisissantes, et se maintient toujours à l'orée de notre faculté de compréhension. Des penseurs de différentes époques nous apprennent que l'information est «entropie», qu'elle est «physique», qu'elle relève de la «mécanique quantique», qu'elle est peut-être la vie même. Et plus on en apprend, plus les implications se révèlent complexes. Que l'on change l'information, par exemple en inventant de nouvelles formes de support ou de transmission, et c'est nous-mêmes que nous changeons.
L'écrit a stimulé la logique

James Gleick évoque ainsi le travail d'un psychologue russe qui a étudié les transformations de l'information dans les années 1930. Le chercheur avait posé la question suivante à des populations de culture orale d'Asie centrale:

«Dans l'Arctique, où il y a de la neige, tous les ours sont blancs. La Nouvelle-Zemble se trouve dans l'Arctique, et il y a de la neige. De quelle couleur y sont les ours?»

Réponse type dans une société sans écriture:

«Je ne sais pas. J'ai vu des ours noirs. Je n'en ai jamais vu d'autres…»

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