SYMPATHY FOR MR VENGEANCE de Park Chan-Wook (2003)

Publié le 28 avril 2011 par Celine_diane

La vengeance est certainement l’un des thèmes favoris du coréen Park Chan-Wook. De Lady Vengeance à Old Boy, il est toujours- quelque part- question d’un être, qui pense pouvoir trouver le salut dans l’accomplissement de sa revanche, et qui finira- immuablement- par se perdre, et semer, autour de lui, le chaos. Sympathy for Mr Vengeance, annonce d’emblée la couleur: celle de la compassion, pour des hommes et femmes réduits à leur seuls sentiments, leur seule destinée possible. Voilà pourquoi lorsque Ryu (Ha Kyun), sourd et muet, et Young-Mi (Bae Doona), militante gauchiste, enlèvent la petite fille d’un riche patron (Song Kang-Ho de Secret Sunshine et Le Bon, la Brute et le Cinglé), on ne peut leur en vouloir: c’est un combat qui dépasse la morale. Ryu veut sauver sa sœur en attente d’une opération chirurgicale. Young-Mi se bat contre l’injustice sociale. Chan-Wook vise clairement au cœur, et convoque l’empathie du spectateur en épousant les points de vue, dans une mise en scène ludique qui explore diverses perceptions et univers visuels. Comme cette alternance de bruits infernaux et de silences protecteurs, qui oppose le monde de Ryu, au nôtre.
Sauf qu’on est chez Park Chan-Wook, et comme à chaque fois, la machine s’enraye. La tragédie débarque dont on ne sait où, surpuissante, d’une noirceur absolue, renversant et les valeurs, et les attentes, et les enjeux. De victimes (du système, entre autres), les personnages principaux se font bourreaux. Inopinément, involontairement. De bourreau (symbole du vilain patronat), le PDG devient victime. Et décide, à son tour, de venger son tout nouveau statut, jusqu’au final écrasant. Le cinéaste s’amuse de ce cercle vicieux de la violence et de l’horreur, par petites touches d’absurdité, mêlées aux séquences les plus sordides. Ce qu’il tente de saisir finalement, c’est la dualité de la vie, et celle des personnages. Sympathy for Mr. Vengeance, c’est un rejet pur et dur du manichéisme. Il n’y a ni bons, ni méchants (qu’ils soient communistes ou capitalistes). Juste des êtres humains qui perdent le contrôle, écrabouillés par le mécanisme cruel d’un destin implacable. " L’enfer est pavé de bonnes intentions ", paraît-il.