La lune dans le caniveau de David Goodis

Par Sylvie

1953

Editions 10/18

 

L'un des chefs d'oeuvre de David Goodis, adapté au cinéma par Jean-Claude Beinex.

Ce court roman reprend le schéma de Cassidy's girl : un homme partagé entre deux femmes, le rêve de se sortir de la fange mais un destin inexorable qui tue la moindre velléité de bonheur.

 

William Kerrigan vit dans les ruelles lugubres des docks de Philadelphie entre un père et un frère alcooliques,  une promise hystérique ....et surtout un deuil inconsolable ; sa soeur violée et suicidée un an plus tôt. Les gouttes de sang séchées sont toujours éclairées le soir dans le caniveau, par la lune....

 

Un soir, dans un bar, il rencontre la jeune Loretta. Une belle femme, venue chercher son frère ivre mort. Elle incarne la figure protectrice et aussi la possibilité du rêve.

 

Pour oublier son désir de vengeance qui le mine, Sullivan et Loretta vont vivre une nuit dans un ailleurs fantasmé...

 

Comme à son habitude, Goodis joue sur un magnifique clair-obscur ; la lune dans le caniveau, c'est ce lieu hors du temps où le couple va pouvoir vivre son idylle. Une magnifique description de la lumière dans la nuit qui fait osciller la scène entre rêve et réalité.

Mais la lune dans le caniveau, c'est aussi le faisceau du destin qui poursuit sans fin les âmes désespérées. Les dernières pages sont vibrantes de poésie ; le grand coupable, ce ne sont pas les hommes, mais la nuit et le ruelles embourbées dans la fange. Un joli décor tragique qui matérialise, comme dans un film expressionniste, les forces du destin.

 

A noter aussi le leitmotiv des scènes du bar, où se jouent les scènes cruciales de la rencontre et de la tragédie finale. Les oeuvres de Goodis nous offrent de formidables huit-clos où la simplicité de l'intrigue est magnifiée par de superbes décors.