Cardenio entre Cervantes et Shakespeare. Histoire d’une pièce perdue

Par Benard

Parution : 20 mai 2011.

Information publiée le mardi 3 mai 2011 parMatthieu Vernet

Roger Chartier, Cardenioentre Cervantes et Shakespeare. Histoire d'une pièce perdue

Paris : Gallimard, coll. “NRF essais”, 2011.

EAN 9782070123872

Prix 15,90EUR

Présentation de l'éditeur :

Comment lire un texte qui n'existe pas, représenter une pièce dont le manuscrit s'est perdu ?
C'est la question que poseCardenio— une pièce jouée en Angleterre pour la première fois en 1613, attribuée à Shakespeare, dont le succès fut européen, dont le manuscrit ne fut jamais retrouvé, dont la trame est un conte inséré dans un épisode duQuichotteet qui circula dans les grands pays européens où il fut traduit et représenté parfois plusieurs décennies avant que l'oeuvre de Cervantès ne soit traduite à son tour, au point que pour finir plus personne ne fit le rapprochement entre le texte de Cervantès et la pièce attribuée à Shakespeare…
Cette histoire est d'abord celle, pointée par Michel Foucault, de la prolifération et de la raréfaction des discours : tous les écrits n'avaient pas vocation à subsister et à devenir des archives, plus encore les pièces de théâtre, jamais imprimées, comme si le genre situé au plus bas de la hiérarchie, s'accommodait fort bien de l'existence éphémère des oeuvres. Mais, qu'un auteur devienne fameux, et la quête de l'archive inspirait l'invention des reliques textuelles, la restauration des restes abîmés par le temps et, parfois, la fabrication de faux  qui occupent l'espace des manques. 
Le destin duCardeniode 1613, perdu puis retrouvé, est presque une expérience de laboratoire : il révèle bien la malléabilité des textes, transformés par leurs traductions et leurs adaptations, leurs migrations d'un genre à l'autre, ou les  significations successives qu'en construisent leurs différents publics pour lesquelsDon Quichotteest un répertoire de nouvelles, bonnes à publier séparément ou à porter sur la scène, aux dépens des aventures du principal héros, et Shakespeare un dramaturge qui, comme beaucoup de ses confrères, écrivait en collaboration, recyclait des histoires empruntées et dont certaines des pièces ne rencontraient pas d'éditeur. 
Si comme le pensait Borges, “une littérature diffère d'une autre, postérieure ou antérieure à elle, moins par le texte que par la façon dont elle est lue”, ce sont les normes et les gestes qui régissent les pratiques des différentes communautés de lecteurs qu'il faut reconnaître. 
De là, les principes qui fondent cette belle lecture par Roger Chartier des errances deDon Quichotteavec le mystère d'une pièce sans texte mais non sans auteur. 

Historien français, spécialiste de l'histoire du livre, de l'édition et de la lecture, Roger Chartier est professeur au Collège de France titulaire de la chaire « Ecrits et culture dans l'Europe moderne ». Il a publié notamment une Histoire de l'édition française aux Editions Fayard (1983-1986) et anime l'émission « les Lundis de l'histoire » sur France Culture.

Source : http://www.fabula.org/actualites/r-chartier-cardenio-entre-cervantes-et-shakespeare-histoire-d-une-piece-perdue_44447.php