Contestation d’un retrait de points lorsque la carte grise comporte deux noms

Publié le 05 avril 2011 par 40millionsdautomobilistes

Nom­breux sont les auto­mo­bi­listes à s’être retrou­vés dans la situa­tion sui­vante : ayant prêté leur véhi­cule à une tierce per­sonne et celle-ci ayant com­mis une infrac­tion au code de la route rela­tive aux vitesses maxi­males auto­ri­sées, ils se retrouvent à rece­voir un avis de contra­ven­tion à leur domi­cile. En effet, dès lors que le véhi­cule n’est pas inter­cepté et qu’il est ensuite recouru à la pro­cé­dure de l’amende for­fai­taire, c’est le titu­laire du cer­ti­fi­cat d’immatriculation qui reçoit l’avis de contra­ven­tion. Dans le cas où la carte grise com­porte plu­sieurs noms, c’est alors tou­jours le pre­mier coti­tu­laire qui le rece­vra. Mais que faire si c’est le second qui était en infrac­tion ? Quelle atti­tude adopter ?

Le bon réflexe est de rem­plir la requête en exo­né­ra­tion jointe à l’avis de contra­ven­tion, et plus pré­ci­sé­ment le cas n°2 « J’avais prêté mon véhi­cule à la per­sonne sui­vante, qui le condui­sait ou était sus­cep­tible de le conduire lorsque l’infraction a été consta­tée ». Il fau­dra alors four­nir tout un ensemble d’informations sur le conduc­teur dési­gné : nom, coor­don­nées, numéro de per­mis de conduire, etc., et ensuite envoyer le for­mu­laire par lettre recom­man­dée avec demande d’avis de récep­tion à l’officier du minis­tère public de Rennes. Il est impor­tant de noter qu’aucune consi­gna­tion n’est néces­saire dans cette pro­cé­dure. La per­sonne dési­gnée rece­vra ensuite à son tour un nou­vel avis de contra­ven­tion à son nom et pourra s’acquitter de l’amende. Aucun point ne sera ainsi retiré à la pre­mière per­sonne indi­quée sur la carte grise.

Le plus impor­tant est de ne sur­tout pas payer l’amende ! En effet, selon l’article L.223–1 du code de la route, le paie­ment spon­tané de l’amende for­fai­taire vaut recon­nais­sance de l’infraction, extinc­tion des voies de recours et, par voie de consé­quence, retrait de points sur son per­mis de conduire. On aura donc beau ensuite appor­ter moultes preuves de l’impossibilité d’avoir été au volant au moment de l’infraction, il sera trop tard !

Le juge fait ainsi une appli­ca­tion très stricte du code de la route, sans prendre en compte par exemple le fait que les deux titu­laires de la carte grise sont mariés, comme a eu l’occasion de le rap­pe­ler le Conseil d’Etat dans un arrêt récent du 25 février 2011 :

« Consi­dé­rant que la cir­cons­tance qu’un cer­ti­fi­cat d’immatriculation du véhi­cule puisse com­por­ter plu­sieurs titu­laires ne fait pas obs­tacle à l’application de l’ensemble de ces règles ; que lorsque l’avis de contra­ven­tion est adressé indis­tinc­te­ment à tous les titu­laires du cer­ti­fi­cat mais que l’avis indique, d’une part, lequel de ces titu­laires verra le solde de points de son per­mis de conduire réduit en cas de paie­ment de l’amende for­fai­taire et, d’autre part, que ce titu­laire a la faculté de for­mer une requête en exo­né­ra­tion pour contes­ter être l’auteur de l’infraction, le cas échéant en dési­gnant un autre titu­laire comme en étant le véri­table auteur, le paie­ment de l’amende for­fai­taire entraîne de plein droit la réduc­tion du nombre de points dont est affecté le per­mis de conduire du titu­laire dési­gné par ces infor­ma­tions et qui en a été des­ti­na­taire ; que ce titu­laire ne peut plus, par suite, uti­le­ment sou­te­nir devant le juge admi­nis­tra­tif, à l’appui du recours dirigé contre la déci­sion de retrait de points, qu’il n’est pas le véri­table auteur de l’infraction »

Il est sou­vent fait reproche à la requête en exo­né­ra­tion d’être une pro­cé­dure trop lourde dans la mesure où dans la majo­rité des cas, lorsqu’il y a plu­ra­lité de titu­laires de la carte grise, ce sera au final le même foyer qui paiera l’amende. Il y a donc régu­liè­re­ment des demandes dans le sens d’une sim­pli­fi­ca­tion, en modi­fiant par exemple l’imprimé papier et inter­net sur lequel il suf­fi­rait de cocher lors du paie­ment si c’est le pre­mier ou le second nom iden­ti­fié sur la carte grise qui condui­sait lors de l’infraction et qui ferait l’objet du retrait de points du per­mis de conduire.

Le gou­ver­ne­ment s’y est pour­tant tou­jours refusé pour la bonne rai­son que cette pro­cé­dure mécon­naî­trait les droits du second titu­laire, qui n’aurait, à aucun moment, ni reçu nomi­na­ti­ve­ment d’avis de contra­ven­tion ni reconnu la réa­lité de l’infraction géné­ra­trice et qui pour­tant se ver­rait reti­rer des points sur son per­mis de conduire. On peut égale­ment se deman­der si cette sim­pli­fi­ca­tion n’aurait pas pour consé­quence d’encourager et de déve­lop­per une uti­li­sa­tion frau­du­leuse de cette pro­cé­dure. En effet, il faut savoir qu’il est extrê­me­ment rare que les ser­vices com­pé­tents véri­fient sur la photo prise par le radar que la per­sonne dési­gnée est bien le véri­table conduc­teur. D’où la ten­ta­tion pour cer­tains de dési­gner le grand-père qui pour­tant n’est plus en état de conduire depuis longtemps…

Les plus malins pour­raient même aller jusqu’à ima­gi­ner une autre astuce, cette fois-ci tota­le­ment légale : rien n’interdit d’établir le cer­ti­fi­cat d’immatriculation au nom d’une per­sonne qui ne pos­sède pas le per­mis. Si cette der­nière devra s’acquitter du mon­tant de l’amende, elle ne se verra bien sûr reti­rer aucun point, puisqu’elle n’a pas le per­mis ! Et avec l’automatisation crois­sante de toutes les pro­cé­dures de retrait de points, il y a de grandes chances que l’affaire s’arrête là, sur­tout pour un petit excès de vitesse.

N’oublions pas qu’il y a cepen­dant beau­coup plus simple pour ne pas se faire reti­rer de points : res­pec­ter le code de la route…