Le merlu n’a pas la berlue (perché sur son mamelon de cocos au chorizo)

Par Estebe


Bien, le bonjour, bipèdes on line

Le colin, ou merlu, ou merluche (Mère Luche, priez pour nous), n’est pas exactement la créature la plus goûteuse des océans. Hou que non. Manque un peu de caractère gustatif cet animal-là. Pourtant chez nous autres, dans la tribu des Slurp, on l’aime bien, le merlu, ou colin, ou merluche.
Primo, parce que sa chair ne manque pas de tenue au feu. Elle te sort de la poêle ferme et juteuse, flamboyante voire, sans s’effondrer au premier coup de grisou calorique comme nombre de bestioles marines.
Deuzio, parce que le très bien rencardé WWF en recommande la mastication sans arrière-pensées. L’est pas menacé de surpêche (sauf en Amérique du sud). Notre conscience écologique s’en trouve ruisselante de satisfaction et notre bidon tout reconnaissant.
Tertio, parce qu’il demeure tarifairement abordable. Et en ces temps de chute tendancielle du pouvoir d’achat, ben, voyez-vous, ça compte dedans le panier de la ménagère (du ménager en l’occurrence, même si "le panier du ménager" n’est guère employé en langue française, voire lexicalement inacceptable; c’est dingue, ça; comme si c’étaient toujours les nanas qui faisaient les courses; mais par la Couille du Malin, dans quel siècle vivons-nous ? Hein ?).
Où en étions-nous ? Ah, oui : la Mère Luche. Ben, la voilà s’alanguissant sur un petit dôme printanier, dans une composition terre-mer, que l’on a pompeusement baptisé darne de colin sur fantaisie pimentée de borlotti au chorizo. Ça le fait, non ?


Offrez-vous un tronçon bien épais de merlu par personne (visez les 163 grammes) que le poissonnier vous tranchera sans mot piper.
Offrez-vous
de beaux borlotti, ou cocos roses, dans leurs cosses (visez les 227 grammes par bouche à nourrir), une botte de thym frais, quelques tomates cerise venues d’Italie, de minces rondelles de chorizo (visez les quatre tranches par convives), un petit piment rouge et voilà.
Rentrez à la maison.
Ecossez les borlotti. Balancez dans de l’eau frémissante (sans sel, because le sel à la cuisson, ça te durcit le coco ; ne me remerciez pas pour le tuyau). Une vingtaine de minutes, que le haricot s’attendrisse mais ne s’effondre guère.
Hachez une échalote et une pointe d’ail. Blondissez le tout au fond d’un poêlon. Réservez. Emincez le chorizo en lamelles. Faites revenir sans matière grasse. Déglacez d’une larme de vin blanc. Ajoutez l’ail, l’échalote, les tomates coupées en deux, le piment émincé finement, les cocos roses et le thym. Sel, poivre. Laissez mijoter avec une larme d’huile d’olive, à couvert et pépère. Puis goûtez. Il faut que ça soit bon, parfumé et picotant. Parfaitement.
Salez, poivrez, farinez mollo le poisson. Poêlez à feu vif dans une noisette de beurre, deux minutes et demi de chaque côté (ou plus, ou moins, selon épaisseur et affinités). Saupoudrez d’une tombée de piment d’Espelette. Puis installez la bête sur un mamelon de haricots, avant de servir en dandinant du joufflu (facultatif).
A boire ? Oui, il le faut. Un gamay plein et épicé siouplait, naturel aussi, par exemple la drolatique mais convaincante cuvée «Amène» de la maison mâconnaise P-U-R.
Très bon jus, merci.


A plutarque