Le "Feel Good Factor"

Publié le 10 février 2008 par Vonric Vonric
6h10, London, Eurostar Terminal. On se croit dans un point sécurité d'un terminal d'aéroport. Pour la 3e fois en 6 mois on stoppe ma valise: random check! Pourquoi jamais le sac comportant le PC portable, pourtant aussi lourd, bourré de cables, CDs et journaux entre autre? Mystère. Ouverture de la valise. Le préposé ganté enlève méthodiquement toutes les affaires : chemises, pull, T-Shirt, affaires de toilettes qu'il remettra ensuite dans le désordre, pelle-mêle et en tassant le tout dans la valise 5 minutes plus tard. En 9 ans d'Eurostar je n'ai jamais eu un seul contrôle en soirée, aux heures de pointe. Non, c'est toujours lorsqu'il y a peu de monde que les agents pour lutter contre l'endormissement choisissent de suspecter un potentiel déferlement de terroristes.

Même chose dans les aéroports britanniques. Si vous avez pris l'avion depuis 1 an en Europe, vous avez eu à connaître la fameuse règle des 100ml de liquides, dans un sac en plastique transparent. Tout cela nous vient de ce fameux jour d'août 2006 où Heathrow a été pris de panique en suspectant qu'on tentait de faire sauter un avion à l'aide de bombes liquides. Depuis, non seulement les liquides ont été bannis des avions ; mais comme on n'est jamais assez prudent, les aéroports britanniques ont aussi restreint la taille des bagages qu'il était possible d'emporter dans l'avion (il faut savoir que les jours qui ont suivit la panique britannique en 2006, les autorités aéro-portuaires anglaises interdisaient même d'emporter une feuille de papier à bord de l'avion !). Bref, depuis le 7 janvier, British Airways a tout de même autorisé, dans certains aéroports, à nouveau deux bagages à mains, comme cela a toujours été le cas dans le reste de l'Europe. Pourquoi pas partout, et notamment pas à Gatwick ? Parce qu'il est bien connu que le Royaume Uni est infiniment plus dangereux que les autres pays, et que des mesures de précautions s'imposent de façon nettement plus drastiques que dans le reste du monde. Je note simplement qu'au retour de quelques jours à Dubai en novembre, ma compagne ayant oublié une pleine bouteille d'eau dans son sac à main, ne fut nullement stoppée et a pu tranquillement embarquer avec moi dans le vol qui nous emmenait vers Gatwick. Il est vrai que le risque ne proviendra jamais d'un pays moyen oriental ;-)

Comme me le disait l'agent de l'Eurostar, ce traitement particulier, ces fouilles régulières, ces vêtements à passer au détecteur (la prochaine fois qu'on me demande d'enlever mon pull qui contient une fermeture éclaire au col, j'enlève aussi mon jeans - y'a pas de raison !), c'est pour notre bien (il devait avoir peur pour moi le bougre ; moi au contraire ca ne me rassure pas du tout). C'est le feel-good factor (traduire = mesures qui ne servent a rien , mais qui font croire au public qu'on maîtrise le problème).  Car au final, vous savez bien que vous avez autant de chance de gagner le gros prix de l'Euromillion que de mourir en avion.

Voici pour mémoire un résumé des attentats qui ont frappé l'Europe sur les 30 dernières années:

03 octobre 1980 - Paris, Synagogue rue Copernic: 4 morts, 22 blessés
22 avril 1982 - Paris, Rue Marbeuf: 1 mort, 63 blessés
9 aout 1982 - Paris, rue des Rosiers: 6 morts, 22 blessés
15 juillet 1983 - France, Aéroport d'Orly: 8 morts, 60 blessés
1985-86 - Paris (Galeries Lafayette et Printemps, Pub Renault, Tati): 13 morts, 266 blessés
21 décembre 1988 - Lockerbie, Boeing 747 de la Pan Am: 259 morts
1995 - Paris (RER St Michel, Orsay, Port Royal...) : 12 morts, 398 blessés
11 mars 2004 - Espagne: 200 morts, 1500 blessés
7 juillet 2005 - Londres: 40 morts, 700 blessés

Total depuis 30 ans = 543 morts et 3031 blessés (dont 256 concernant les avions)

Soit moins de 20 victimes d'attentats par an en Europe, ce qui, rapporté aux 450 millions d'habitants, nous donne 1 (mal)chance sur 23 millions. A comparer avec 1 sur 14 millions de gagner le gros prix du loto et surtout 1 chance sur 40.000 d'être tué dans un accident de voiture au Royaume Uni (1500 morts chaque année).