Fusion Carrefour/CBD : les spécialistes financiers sceptiques

Publié le 08 juin 2011 par Ingridducas
Selon la presse française, Carrefour aurait mandaté la semaine dernière la banque Lazard afin que cette dernière étudie les possibilités de fusion entre la filiale brésilienne de Carrefour et le distributeur brésilien CBD.

Cette stratégie serait liée aux problèmes financiers rencontrés par Carrefour au Brésil où,  « fin 2010, le français a dû provisionner 550 M€ pour dépréciations de stocks et litiges avec les fournisseurs brésiliens ».  L'idée serait de faire entrer la famille Diniz, dans le capital de Carrefour. Propriétaire de CBD, leader brésilien de la distribution, qui compte 1500 magasins et emploie 140.000 salariés, avec un objectif de chiffre d'affaires de 30 Md$, la famille Diniz faciliterait localement  les choses pour Carrefour.

Les analystes financiers français se sont pourtant rapidement montré sceptiques vis à vis de cette information.

Le bureau d'études ODDO explique ainsi que ce scénario lui "semble peu réaliste" pour deux raisons qu'il précise :

"Problème de concurrence : GPA détient une part de marché alimentaire de 17% au Brésil, Carrefour 14.5% et Wal-Mart (le n°3) 14%. Une fusion GPA/Carrefour Brésil créerait un groupe de 31.5% de part de marché, sachant que dans les zones où ils sont présents (Sao Paulo + grandes villes), la part de marché dépasserait probablement les 40 à 50%. Cette opération créerait des situations concurrentielles trop dominantes et pourrait soit entraîner des cessions très importantes de magasins, soit un refus del'autorité de la concurrence.
Casino a le co-contrôle de GPA avec la famille Diniz (33.7% en termes de contrôle économique pour Casino - mais 50% des droits de vote au sein de la holding de contrôle Wilkes). Un rapprochement GPA/Carrefour Brésil exigerait l'accord de Casino (qui serait dilué dans le capital de la nouvelle structure, alors que Casino a la perspective, en juin 2012, de prendre seul le contrôle de GPA en levant son option pour nommer le président du conseil de Wilkes). La fusion, qui engendrerait un mastodonte (avec tous les risques inhérents à une fusion de ce type) ne semble pas dans l'intérêt de Casino qui nous semble avoir les moyens capitalistiques et juridiques de s'y opposer."

Natixis; a également fait preuve de sa surprise face à cette nouvelle "pour le moins inattendue".

"Rappelons que GPA est détenu à 65,6% (droits de vote) par Wilkes, holding de contrôle détenu à parité par Casino et Diniz. A partir de juin 2012, Casino a la possibilité de prendre seul le contrôle de la holding et donc de GPA. Dans ce cadre, même si Carrefour peut prendre une participation dans GPA (par achats de titres sur le marché ?) et Diniz dans Carrefour, il apparaît très peu vraisemblable que Carrefour parvienne à fusionner les deux groupes… Notons enfin que d'ici 2014, les accords prévoient qu'aucun des parti ne puisse vendre de titres de la holding de contrôle à un tiers, et toute décision stratégique doit être prise en commun, chacun disposant d'un droit de veto." 

L'information semble donc peu crédible aux yeux des observateurs financiers pour deux raison : la situation de monopole dans certaines zones en cas de fusion qui ne serait pas acceptée, et l'implication importante du concurrent de Carrefour, le groupe Casino, au sein de CBD.