MÉDICAMENT: L’IGAS bouscule les institutions et réclame une réforme d’envergure – Inspection générale des affaires sociales (IGAS)

Publié le 22 juin 2011 par Santelog @santelog

Création d'un nouveau Comité du Médicament, suppression de la notion d'AMM au profit de celle d'évaluation et de progrès thérapeutique, réaffirmation d'une politique française du médicament et “reprise en mains” du rôle des labos dans l'information en santé publique avec interdiction de visite médicale, les propositions sont nombreuses et radicales pour améliorer le dispositif du médicament. Une réforme d'envergure de la pharmacovigilance, une reconstruction complète de la politique du médicament et un positionnement nouveau de notre pays dans le paysage sanitaire européen, pour la protection et la promotion de la santé publique, c'est ce que réclame sans concession, ce second rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur la pharmacovigilance et gouvernance de la chaîne du médicament. Un rapport qui souligne à nouveau et sévèrement, les limites actuelles du système, les ruptures de la « chaîne » et l'absence de l'Etat.


L'affaire Mediator aura souligné, rappelle la mission de l'IGAS, la gravité et l'ampleur d'anomalies et de fautes commises durant 35 ans, responsables de plusieurs centaines de décès, révélant des dysfonctions de portée plus générale et atteignant de surcroît la confiance des usagers en le médicament et ses fabricants. La mission s'est appuyée notamment sur de très nombreuses auditions, une analyse de la littérature et sur des comparaisons internationales.


Ce cas particulier aura mis en cause de multiples responsabilités, celle du laboratoire Servier, mais aussi celles de l'Agence chargée du médicament, l'Afssaps, des politiques et autorités publiques du médicament en général, du système français de pharmacovigilance que la mission analyse comme “un affaiblissement du rôle de l'Etat depuis la fin des années 90, et d'un retard pris par rapport aux pays comparables”.


Modifier fondamentalement le principe de pharmacovigilance: La pharmacovigilance ou surveillance du risque d'effet indésirable résultant de l'utilisation des médicaments comprend le recueil d'informations sur ces effets jusqu'à leur interprétation pour la mise en place d'une démarche de prévention. Pour l'Igas, il s'agit aujourd'hui de simplifier le mode de notification et l'autoriser selon différentes modalités en ligne, par téléphone ou par courrier, d'en harmoniser le codage, d'en réduire les délais d'exploitation, d'en élargir les notificateurs, ce qui vient d'être rendu possible aux patients et de supprimer la notion d'imputabilité – qui revient à écarter de manière quelque peu arbitraire et selon la position des experts des cas d'effets indésirables jugés comme douteux ou non en rapport avec la prise du médicament-. Développer les méta-analyses et la recherche documentaire à mener par l'Afssaps, et non par les laboratoires et assurer une veille des signaux à analyser ensuite au sein de l'Agence, prenant en compte l'ensemble des données de notification et de prescription (PMSI, SNIIRAM) sont 2 autres axes réclamés par la Mission.


La création d'un comité du médicament réunissant l'AFSSAPS, la HAS, le CEPS, la CNAMTS, la DSS de la DGS et de la DGOS aurait pour mission d'impulser les grandes orientations de la politique du médicament et d'orienter les études par un système d'appel à projets. Doté d'un comité scientifique composé de 15 membres scientifiques désignés par l'Institut des données de santé, le Comité consultatif national d'éthique, l'AFSSAPS, la HAS, la CNAMTS et l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation (ATIH).


L'AFSSAPS doit adresser des signaux forts aux laboratoires, comme exiger les données complètes des essais cliniques ou imposer des délais de réponse aux industriels. Renforcer son expertise interne, restructurer les commissions à restructurer, centraliser le pilotage du réseau des centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV), pour l'AFSSAPS, il s'agit d'une réforme d'envergure de la pharmacovigilance qu'il convient de mettre en oeuvre.


L'absence de politique du médicament en France résultant d'une absence de chaîne du médicament où 3 institutions principales coexistent sans véritables liens, l'Afssaps, la Commission de la transparence et le CEPS, traduit, pour la mission, un double désengagement de l'Etat et face aux agences sanitaires “internes”, et face à l'Union européenne. Face à l'Europe, l'Etat français devrait revendiquer sa prérogative régalienne sur la sécurité sanitaire sur la base d'une révision de la pharmacopée française et d'un critère de valeur ajoutée thérapeutique (service médical rendu et non « rapport bénéfice/risque ».


3 réformes importantes proposées:


·   Supprimer « autorisation de mise sur le marché » (et la Commission d'AMM) au profit d'« Evaluation thérapeutique » ou « Appréciation de la valeur ajoutée du médicament » - qui conditionnera son prix et son taux de remboursement,


·   ouvrir l'accès public possible à toutes les études cliniques préalables pour tout médicament candidat à cette évaluation,


·   n'admettre que les nouvelles molécules égalant ou médicaments apportant un progrès thérapeutique, dans une logique d'un nombre suffisant de médicaments.



Pas d'alternative à l'interdiction de la visite médicale: Ces réformes entraînent d'importantes conséquences, sur la formation initiale des médecins en pharmacologie, thérapeutique, vigilance et sécurité sanitaire et en formation médicale continue (FMC). Leur information, indépendante des laboratoires serait assurée par un organisme public d'information sur le médicament « filiale commune » de l'Afssaps, la Has, l'Assurance maladie en remplacement de la visite médicale. Les laboratoires pharmaceutiques seraient tenus à une totale transparence sur toute action participant à la politique de santé et à un strict respect des règles actuelles de non promotion des médicaments vers le grand public.



Source: IGAS Rapport sur la pharmacovigilance et gouvernance de la chaine du médicament


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