Comment Pépito m'a réconcilié avec la vie

Publié le 06 juillet 2011 par Francisbf

Longtemps, j'en ai voulu à mes parents de m'avoir affublé de l'hideux prénom qu'est Francis (1)(2). Quand de base, vous êtes un blondinet à lunettes avec un an de moins que tout le monde, une coupe au bol et plein de bons points, c'est normalement amplement suffisant pour vous faire frapper dans la cour de récréation. Si vous y ajoutez un prénom qui ne ressemble pas à Laurent, Florent, Sébastien ou Alexandre (3), ça peut être considéré comme de la provocation au troisième degré (ça ne l'était pas ! Je vous jure !) et ce, jusqu'à la fin du lycée, au moins.

Comme j'ai haï mon prénom. Je n'en ai jamais rien dit à mes parents, qui ne pensaient certainement pas à mal. Quoique. On m'a appris par la suite que quand ils avaient annoncé vouloir appeler leur enfant Francis, leurs amis avaient signé une pétition contre. Et ma soeur était née, heureusement pour elle, mais moi, j'y ai eu droit. Comme quoi, ils n'ont pas retenu la leçon (5).

Cependant, à l'orée de la pré-puberté, un événement survint dans ma vie, qui me fit accepter ce que je n'aurais de toute façon jamais pu changer. Un événement qui a, quelque part, changé ma vie, et m'a aidé à accepter ce que je suis, et même à le revendiquer. Un Francis.

A l'époque, les vacances étaient synonymes de longs trajets en voiture, qui étaient synonymes de baffrage de sandwichs à midi, et de petits gâteaux plus tard, parce que c'était une époque où on se foutait d'avoir des miettes dans les sièges.

Il faut que vous sachiez, nous étions plutôt une famille BN, par tradition ancestrale. Mais ce jour-là, miraculeusement, nous avions acheté une boite de Pépitos à la station service, que j'entamai sans ménagement. Puis, en mastiquant, j'étudiai la boîte (j'avais dû finir mes deux club des 5 et il ne me restait rien à lire). Et là, sur la boite, dans un encart rouge, était annoncé le GRAND JEU DES PRÉNOMS Pépito !!! (avec les points d'exclamation). Sans me faire d'illusion, je sortis le carton ondulé de la boîte, et là, le choc.

Sur le carton blanc étaient imprimés les mots qui jamais ne me quitteront : « Bravo FRANCIS, tu as gagné un porte-clé ! »

Quelles étaient les chances ? Je n'en sais rien. Mon coeur se mit à battre la chamade, je tendis la carton à ma maman sans un mot, elle fit « ho, bravo » ou quelque chose du genre, pendant que j'étais encore sous le coup de l'émotion. Mon prénom n'était pas qu'une tare ! Mon prénom pouvait me faire gagner des trucs ! Un porte-clés Pépito, dont j'étais sûr que personne à l'école n'avait d'autre exemplaire !

Ce fut à partir de ce jour que je me réconciliai avec la vie, et avec mon prénom. Aujourd'hui, pour célébrer ce moment, je voudrais rendre un dernier hommage à Pépito, qui a permis ce tournant dans ma vie (6).


  1. (1) prénom non contractuel

  2. (2) Et encore, si vous connaissiez mon troisième prénom.

  3. (3) En fait, vu qu'en primaire j'habitais au Maroc, ce serait plutôt Youssef, Karim, Taoufik ou Nabil (4), mais je ne voudrais pas avoir l'air raciste sur internet, et les petits français sont tout aussi salauds que les petits arabes.

  4. (4) Quoique, Taoufik était un de mes meilleurs copains, il ne s'est jamais moqué de moi. Karim, il me battait en maths, le salaud, mais sinon il était sympa. Et Nabil, on l'appelait Nabil le débile, ça devait pas être plus facile à porter que mon prénom. Pauvre Nabil le débile.

  5. (5) Ce doit être un truc de parents. Quand mon cousin (qui s'appelle Thomas, il ne peut pas savoir) et son épouse ont eu leur dernier enfant, ils ont pensé l'appeler également Francis. Nous avons su les en dissuader, mais ils lui ont collé le prénom Ambroise. Je compatis d'avance avec ce pauvre bambin.

  6. (6) Pour l'anecdote, au bout de trois semaines, mon porte-clés Pépito était pété, mais ce n'est pas ça l'important.