Oui, Anders Breivik est un magnifique détecteur de cuistres

Publié le 04 août 2011 par Copeau @Contrepoints

Oui, Anders Breivik est un magnifique détecteur de cuistres

Dans un article foutraque, Jacques de Guillebon avait écrit, sur Atlantico qui l’avait laissé faire, que le tueur d’Oslo était un fondamentaliste plus « néolibéral » que « chrétien ». On pouvait s’y attendre : n’ayant ni l’élégance ni la réflexion d’un Koz, le gentil Jacques, heurté dans sa sensibilité chrétienne, avait décidé de cogner sur le libéralisme, ennemi facile de toute une génération de cuistres divers. Dans un bel effort, Daniel Tourre avait répondu en s’insurgeant contre une telle utilisation du mot « libéralisme ». Piqué au vif, Jacques s’excite à nouveau. Et encore une fois, Atlantico, qu’on a connu plus inspiré, offre ses colonnes à ses petits couinements.

Je tiens à le dire tout de suite : je suppose que toute la rédaction d’Atlantico ne se place pas comme un seul homme derrière l’éditorialiste qui a pondu cette réponse, afin de le défendre, lui et ses discours hallucinés.

J’ai en effet la gentillesse (ou la naïveté ?) de penser que ce journal fait preuve de plus de discernement et qu’il a surtout joué la carte marketing et buzz en laissant la polémique s’installer dans ses colonnes ; après tout, c’est un journal récent, il a besoin de se faire connaître et un peu de trolling fait parfois du bien.

Mais tout de même, là, c’est un troll très très baveux.

Jacques, si tu me lis (tu me liras, j’en suis sûr), je te le dis tout net : tu es un gros troll baveux. Il faut apprendre à faire plus subtil dans ton attaque frontale du libéralisme ; ainsi, même s’il enfile des sabots aux proportions schtroumpfesques, Michel Rocard est plus raffiné que toi !

Et si tu vises bêtement l’audience, quitte à dire d’énormes bêtises, tente un truc osé, dans le style « Plus c’est gros plus ça passe » ; par exemple, tu peux expliquer que son action est typique des fondamentalistes islamistes et qu’il est donc un musulman refoulé. Je te laisse trouver les arguments, tu sembles assez fortiche pour ce genre d’exercice.

Tiens, j’ai même une photo pour illustrer ton « article » ensuite.

Bon. Trêve de plaisanteries, il faut revenir sur terre, deux minutes.

Mon cher Guilleret (tu permets que je t’appelle Guilleret, parce que « bon », tu ne l’es pas, hein), tout ton article illustre une fois encore une tendance naturelle de certains journalistes à verser dans la pignouferie de presse, catégorie de plus en plus large où les auteurs d’articles bourrés d’erreurs factuelles s’ébrouent bruyamment dans la fange d’une pensée indigente et de lieux communs camouflés sous un déluge de références pseudo-savantes avec des morceaux de name-dropping dedans (miam !).

Il suffit pour s’en convaincre de parcourir ton article entre deux bâillements pour découvrir ainsi des perles magnifiques, comme ta définition de comptoir du libéralisme (« De l’addition de nos tendances naturelles au mal, faisons le bien ») qui a la délicatesse d’estropier plusieurs centaines d’années de réflexion politico-philosophique dans l’emporte-pièce d’une pensée au calibre vraiment trop étroit.

Pour toi, c’est dit et tu n’y reviendras pas : Breivik est un sale petit libéral !

Le plus drôle, c’est que tu nous offres les arguments suivants pour étayer ta thèse consternante :

C’est un homme sans foi (…). Il craint l’islam (…) Il craint parallèlement le marxisme rampant, qu’il accuse de vouloir détruire les valeurs de liberté individuelle propres à l’occident. Il récuse le racisme. C’est donc un occidentaliste qui estime que sa civilisation se résume le mieux dans les valeurs de « liberté individuelle » qui sont celles que prône M. Tourre – et que donc celles-ci doivent être défendues par tous les moyens.

En somme, pour le Jacques, un athée qui n’aime ni le marxisme, ni l’Islam, et qui aime la liberté est forcément un libéral (fondamentaliste de surcroît). C’est idiot. C’est plus qu’idiot, c’est complètement et indubitablement crétin, ne serait-ce que par le fait évident qu’il a buté 80 personnes innocentes et que c’est parfaitement et totalement contraire à la doctrine libérale que notre ami Jacques, toujours aussi guilleret, prétend pourtant connaître.

En outre, je ne crois pas qu’un seul parti (qu’il fut de droite, de gauche, d’un extrême ou de l’autre) n’ait jamais prétendu autre chose que vouloir la liberté de ses adhérents ; on voit mal, du reste, un groupement politique réclamer ouvertement l’esclavagisme de ses membres. Même les pires sectes ne font pas ce genre de coup marketing.

Bref : l’argument de notre rigolo se résume donc à assembler des éléments qu’on retrouve facilement chez les libéraux, mais aussi dans toute une ribambelle d’autres mouvements, d’autres tendances, parfois très éloignées du libéralisme. Pour le dire simplement : ce n’est pas un argument. C’est un petit patch mal collé sur les trous béants d’un raisonnement franchement gonflé.

Du Bi, Du Bidon, Du Guillebon : mon brave Jacques, c’est bien d’avoir lu moult ouvrages, mais encore aurait-il fallu les comprendre, et non les recracher, en vrac et dans un sabir pénible à lire, à seules fins de ventiler tes poussées colériques…

Si Breivik fut bien quelque chose en commettant son massacre, c’est détecteur de cuistre : tout ceux qui voulurent ainsi récupérer son acte odieux sont maintenant marqués de façon indélébile.
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