CONAC: Peut-on vaincre la corruption au Cameroun?

Publié le 17 août 2011 par 237online @237online

Écrit par Cameroon Tribune   

Mercredi, 17 Août 2011 13:52

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Les observateurs les plus avisés de la scène socio-politique nationale s'accordent pour soutenir que la croissance économique du Cameroun serait nettement plus soutenue si les efforts de développement entrepris ne se heurtaient de manière chronique aux méfaits de la corruption. Une véritable gangrène sociale qui hypothèque considérablement les chances de progrès de la communauté nationale injustement spoliée. Tant il est vrai que de nombreux échecs et autres avatars du même genre s'expliquent par la mauvaise gouvernance sous tous ses aspects : fraudes diverses, détournements de deniers publics, etc.

En somme, une grosse ombre au tableau que le chef de l'Etat n'a cessé de dénoncer en des termes les plus véhéments. Et pour cause ! L'enrichissement scandaleux de quelques-uns s'opère au détriment de la fortune publique, réduisant ainsi à néant les actions entreprises pour faire reculer la pauvreté. Dénonciations et mises en garde musclées n'ont cependant pas suffi à décourager les criminels à cols blancs qui continuent d'écumer les allées de l'administration. Avec les dégâts qu'on sait. Et ce, en dépit de l'entrée en scène de quelques organismes de lutte contre certaines pratiques répréhensibles : CONAC, ANIF, Chambre des Comptes... Le butin engrangé jusqu'ici ne semble pas à la hauteur de la mobilisation et des moyens engagés.

D'où la question : peut-on vaincre la corruption au Cameroun ? Si oui, comment ? Sinon pourquoi. Vaste sujet qui est loin de faire l'unanimité. Nous vous proposons ci-dessous un regard croisé de deux personnalités bien connues de la scène politique nationale : Adamou Ndam Njoya et Pierre Moukoko Mbonjo.

« Il faut la volonté politique et tout un programme »

Dr Adamou Ndam Njoya, président national de l'UDC.

«Il est question de saisir la Corruption, ce phénomène social, véritable fléau dégradant, appauvrissant l'être humain spirituellement, intellectuellement, moralement, matériellement, financièrement, bref enlevant tout son sens et son essence à la dignité humaine. La saisir, la diagnostiquer pour lui trouver un remède efficace permettant, à défaut de l'éradiquer parce que participant de la nature profonde des personnes avec des degrés divers, tout au moins, d'atténuer, de réduire l'ampleur du mal et en arriver à le cantonner à des manifestations exceptionnelles sortant ainsi du champ du droit commun que nous lui connaissons aujourd'hui.
Accepter cela et s'inscrire dans cette logique, c'est s'engager dans une première porte de sortie.
Au Cameroun, nous devons nous inscrire dans cette optique et cette dynamique en prenant profondément conscience que ce phénomène s'analyse comme comportement humain porté par toute une culture et toute une éducation et que, de ce fait, c'est par la culture et l'éducation qu'on arrivera à lui faire face en arrivant dans la société à cultiver des comportements positifs, constructifs par rapport au bien commun, à la chose publique, à l'intérêt général.
Il faut, pour ce faire, la volonté politique et tout un programme.
Dans cette voie, les discours, les lois doivent être suivis par des actes forts de concrétisation, de traduction dans les faits ; tout cela étant appuyé par tout un travail d'éducation, de la culture des valeurs humaines, de l'éthique comme fondements, éclairages et dynamiques de la vie et des activités aussi bien des citoyens, des populations données dans un espace donné que des institutions tant nationales qu'internationales.
Parce que devant l'ampleur du phénomène, il faut être concret, pratique, il y a des expériences vécues, vivantes qui s'offrent comme sources où puiser dans les actions et les démarches pour atteindre le noble objectif qui est de réduire à l'impuissance ce fléau.
Nous pouvons ainsi partir de ce que le Cameroun a connu avec la Nouvelle Ethique de l'Education et de l'Educateur, puis la Nouvelle Ethique de l'Administration et de gouvernement débouchant sur l'expérience du Renouveau avec la rigueur et la moralisation. On doit y tirer des leçons.
Nous avons abouti à la loi de l'Ethique qui en appelle à vivre les valeurs, l'éthique comme fondements, éclairages et dynamiques de la vie et des activités aussi bien des personnes humaines que des institutions et puis à les cultiver. Ce qui invite aux enseignements, à l'éducation pour les nouveaux comportements, ceux-là profondément républicains, démocrates. Il y a là tout un programme pour l'Ecole africaine d'Ethique dans le cadre de laquelle sont enseignés le Nouveau Contrat Social et le Contrat républicain qui, mettant l'être humain au centre de tout sont à passer avec soi-même pour le triomphe des valeurs humaines, pour l'éducation éthique qui sont des impératifs dans notre monde où les crises des valeurs sont à la base de la corruption, des crises économiques, politiques et sociales. Il est question de la culture en chaque personne, dans la société et les relations entre les sociétés, de l'harmonie, de l'esprit de responsabilité faisant des acteurs et des actrices de la vie dans la société des partenaires parties prenantes pour sortir ce qu'il y a de meilleur pour faire vivre la Res Publica. Ainsi vont se développer l'auto-contrôle, l'auto-sanction, l'auto-censure que génère et entretient le fort sens de la chose publique, du sentiment national, de l'humain, de notre dignité humaine et de notre commune humanité. ».
Propos recueillis
par MAKON ma PONDI

« L'éthique a été mise au cœur de l'action de Paul Biya »

Pr Pierre Moukoko Mbonjo, ancien ministre de la Communication, Secrétaire adjoint à la Communication du RDPC.

«Dans l'absolu, la corruption peut-être vaincue au Cameroun à condition, bien entendu, que tous les Camerounais acceptent de jouer le jeu. Dans la réalité, je dirais que c'est un peu plus compliqué. L'expérience des pays plus développés que le nôtre, évoluant dans un système d'économie de marché, prouve à suffisance que la corruption a des reins solides. Et venir à bout complètement de la corruption appartient plus à l'univers du souhaitable qu'à celui du possible. Ceci étant, dans le cas qui nous intéresse, si le chef de l'Etat, son Excellence Paul Biya, n'avait pas la conviction que la corruption pouvait être vaincue ou à tout le moins, ramenée à des proportions acceptables ou supportables pour l'économie, il n'aurait pas, dès les premiers jours de sa magistrature suprême engagé le pays dans un combat sans merci contre ce fléau. Il me souvient que quatre concepts fondamentaux ont été au départ du Renouveau national : libéralisation et démocratisation d'une part et rigueur et moralisation d'autre part.
L'éthique a donc été mise au cœur de l'action politique du chef de l'Etat, au cœur de la dynamique de changement social initiée par le Renouveau national. La conviction est établie que cette lutte n'est pas vaine. Il s'agit bien d'une lutte à la fois utile et nécessaire. Cependant, nous devons considérer la situation réelle de notre pays et rappeler le contexte historique dans lequel la lutte contre la corruption s'est intensifiée.
Le Cameroun a vécu pendant deux décennies une situation économique très difficile. Le président Paul Biya est arrivé au pouvoir en 1982. Son prédécesseur avait dit au pays que les finances publiques étaient saines. Mais pour ceux qui suivaient l'actualité économique, à ce moment-là, la situation économique du Cameroun n'était plus bonne. Les indicateurs macroéconomiques indiquaient que nous allions tout droit vers des difficultés. Et ces difficultés se sont précisées quelques années plus tard sous la forme d'une crise de l'endettement extérieur.
Des mesures d'ajustement structurel ont été prises en accord avec le FMI et la Banque mondiale, conformément au consensus de Washington consistant en une batterie de mesures déflationnistes. L'Etat était ainsi contraint de diminuer ses charges, notamment par la diminution des salaires intervenue en janvier et octobre 1993. Certains salaires ont été diminués de 50%, d'autres de 70%. Quelques mois après la deuxième baisse des salaires, intervient l'ajustement monétaire, c'est-à-dire, la dévaluation du Franc Cfa en janvier 1994. La combinaison de ces deux éléments (baisse des salaires et dévaluation du Franc Cfa) a nécessairement rogné le pouvoir d'achat des fonctionnaires et agents de l'Etat, les rendant plus vulnérables aux sollicitations malsaines des uns et des autres. Ceci explique en partie la raison pour laquelle on a assisté à partir des années 1990 à l'augmentation de la corruption.
Le problème qui se pose dans la lutte contre la corruption est qu'il n'y a pas de corrompus sans corrupteurs. C'est une relation binaire, d'où la difficulté que rencontrent les différentes structures mises en place par l'Etat du Cameroun (Chambre des comptes, ANIF, CONAC, etc.) pour traquer les différents acteurs de ces transactions illicites qui se font généralement sans temoins. L'honnêteté intellectuelle nous dicte de saluer l'action courageuse et vigoureuse de l'Etat en la matière : sanctions administratives et pécuniaires diverses, poursuites judiciaires ...
Mais l'Etat ne peut pas tout faire seul. Et c'est là qu'intervient l'aspect éthique de cette lutte qui revêt trois dimensions.
L'éthique personnelle : chacun face à sa conscience, à ses convictions religieuses, spirituelles et morales doit connaître la ligne rouge à ne jamais franchir ; l'éthique professionnelle qui trace les limites entre un comportement licite et illicite pour toute profession et l'éthique sociale, c'est-à-dire ce que la société, dans son ensemble, admet comme normal ou anormal et qui participe donc de la culture du bien public dans une société donnée, à un moment donné du développement historique de celle-ci. Et nous retombons dans les principes fondateurs et moteurs du Renouveau national tels que promus par le président Paul Biya : rigueur et moralisation et dont l'actualité est des plus brûlantes. ».
Propos recueillis par BADJANG ba NKEN


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