Cuisses de poulet au kumbawa & courge au nectar de mangue

Par Eric Bernardin

Ce plat à l'intitulé étonnant relevait du défi, de l'expérience et du système D. Pour tout dire, ça aurait pu tourner à la catastrophe culinaire. Au quel cas, je ne vous en aurais même pas parlé. Mais c'était super bon, en plus. Alors voilà...

Les expériences

J'ai acheté il y a peu des feuilles de kumbawa séchées (ou citron kafir) et je voulais trouver une recette pour les utiliser.

J'étais aussi intéressé par le principe de glisser des ingrédients aromatiques entre la peau et la chair du poulet (comme la poularde demi-deuil avec les truffes).

Pourquoi pas faire ces deux expériences en une? J'ai donc rehydraté mes feuilles dans de l'eau chaude (pas trop longtemps car elles auraient perdu leur arôme), puis je les ai glissés dans les deux faces de mes cuisses entre peau et chair (en y saupoudrant en même temps un peu de sel fin). J'ai du en mettre 5 feuilles par cuisse.

Puis j'ai poêlé mes cuisses 3mn de chaque côté jusqu'à ce qu'elles soient dorées (dans un peu de beurre).

Le système D

Il faut vous mettre dans l'ambiance. On est vendredi soir, veille de marché. La réserve à légume est vide. Et vous vous demandez ce que vous allez bien pouvoir faire pour accompagner ces cuisses de poulet. Parfumée au kumbawa de surcroit. Or une voisine vous apporte à ce moment-là un morceau de courge (musquée de Provence dirais-je). Vous vous dites dans un premier temps: c'est trop barge de la faire avec le poulet. Ca va pas aller du tout. Et votre oeil tombe soudain sur une petite bouteille de nectar de mangue. Et là, vous vous dites: Eureka!

Les défis

Le premier est de rendre ce plat mangeable, et ce n'est pas une petite affaire.*

Le deuxième est de trouver un vin accompagnant ce plat. Je pars sur une Roussanne 2006 de Jean-Louis Denois. Ce vin rond, vif et fruité a des saveurs de pêche et d'abricot. Je table sur le fait que le mariage mangue-courge devrait pouvoir lui faire écho...

Action

En premier lieu, j'épluche et je coupe la courge en gros cubes. Puis je les fais cuire 10mn dans de l'eau bouillante aromatisée avec 4 feuilles de kumbawa.  J'essaie ainsi de créer un premier lien avec le poulet.

Dans le même temps, je réduis mon nectar de mangue de moitié dans une casserole. Puis je le mélange intimement avec mes morceaux de courge égouttés, rajoute à l'ensemble 20g de beurre. Je fais  revenir à la poêle ce mélange 10mn. Je goûte: ça commence à devenir intéressant. Je continue, donc.

Dans un plat, je mets mes deux cuisses et mon mélange. Et je mets le tout au four à 180° pour 30mn.

Validation des tests

C'est le moment de goûter. Lorsqu'on retire la peau de la cuisse, le parfum du kumbawa envahit vos narines. Magique. Lorsqu'on goûte la chair, on s'aperçoit qu'elle s'est totalement imprégnée des arômes des feuilles. Délicieux

Reste à goûter les morceaux de courge. Suspens. Déjà, c'est moelleux, et ensuite, c'est très bon. Ca n'a plus franchement le gout de courge. Et il faut savoir qu'il y a de la mangue dedans. J'ai inventé une nouvelle saveur ;o)

En dégustant ma première gorgée de vin, je sais que c'est gagné! Cette saveur que j'ai "inventé", elle est là aussi, dans le verre! Il est incroyable, ce Denois! Comment pouvait-il savoir que j'allais faire ce plat?

Pour tout dire, j'ai été sidéré du résultat global. Je voyais déjà quelqu'un faire la grimace... Eh bien, pas du tout! Il y en aurait eu plus qu'il en aurait repris!  Comme quoi, faut oser...