Les nouveaux défis d’Apple

Publié le 02 septembre 2011 par Tcuentofr @tcuento_fr
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Auteur: Paul Loubière – Source: Challenges

Certes, le départ du plus charismatique des PDG du high-tech a été anticipé. Et les caisses du groupe sont pleines. Mais Tim Cook n’est pas Steve Jobs…

Steve Jobs, malade, a annoncé le 24 août qu’il quittait la direction d’Apple. Il garde un pied dans la maison, comme président du conseil d’administration, mais n’exercera plus de fonctions opérationnelles. Pendant trente-cinq ans, le cofondateur de la firme à la pomme a incarné le high-tech en créant des objets qui ont bouleversé nos habitudes. « La seule idée qu’un ordinateur soit désirable pour un consommateur vient de lui », rappelle Charles Golvin, du cabinet Forrester.

Depuis le premier Mac en 1984, Apple-Steve Jobs a volé de révolution en révolution, à tel point que, le 11 août, la capitalisation boursière d’Apple a été-momentanément-la première du monde (362 milliards de dollars), devant ExxonMobil, détenteur historique du titre. Motif? Le groupe a connu un trimestre en or avec les résultats financiers les plus époustouflants de son histoire: chiffre d’affaires en hausse de 82%, bénéfice de plus de 7 milliards de dollars, en progression de 125%. Cerise sur le gâteau, les caisses sont pleines: Apple détient 76 milliards de dollars en cash. Difficile de faire mieux. Mais si l’entreprise est incontestablement solide, le départ du patron charismatique laisse d’importants défis à relever. Les voici.

Rassurer les marchés

A l’annonce du départ du PDG, le titre Apple a aussitôt plongé de 5%. Dès le lendemain, les investisseurs s’étaient ressaisis, et le titre repartait à la hausse. A de rares exceptions près, la plupart des analystes financiers de New York ont maintenu leur mot d’ordre: « buy ». Scott Kessler, de Standard & Poor’s, explique sobrement : « Apple is cheap » « Contrairement à l’idée que Steve Jobs a propulsé le titre vers des sommets, la peur de son départ a empêché Apple de vraiment décoller », estime Matt Nesto, correspondant boursier de Yahoo! Finance. La preuve: sa performance boursière suit plus ou moins celle du S&P 500, alors que sa rentabilité est incomparablement supérieure. » En clair, le départ de Jobs a été anticipé par les marchés, qui sont convaincus de la pérennité d’Apple. Comme le note Michael Gartenberg, du cabinet Gart ner, « il ne faut pas exagérer le charisme de Jobs. les consommateurs achètent des produits Apple parce que ce sont de bons produits, pas parce qu’ils viennent de Steve Jobs ». En tout cas, les résultats annuels et trimestriels seront publiés, comme prévu, le 25 septembre, et les analystes s’attendent à une année exceptionnelle: l’estimation moyenne est un chiffre d’affaires en hausse de 66% pour 2011, et de 23% pour 2012 avec des bénéfices qui devraient dépasser 32 milliards de dollars en 2012. Plus qu’ExxonMobil en 2010!

Eviter la fuite des cerveaux

Difficile de travailler avec Steve Jobs, connu pour être autoritaire, sec et cassant. Mais il dégage une aura qui attire les inventeurs les plus brillants. Qu’ils partent, et Apple serait plongé dans une crise sévère. Selon la presse britannique, Jonathan Ive, le designer d’Apple et désormais numéro deux derrière Tim Cook, envisagerait de quitter le groupe pour revenir vivre en Grande-Bretagne. Apple a refusé de confirmer. Ron Johnson, vice-président d’Apple Retail et artisan du succès d’Apple Store, part en novembre pour la chaîne de boutiques de mode JCPenney; tandis que Bertrand Serlet, directeur de l’ingénierie logicielle des Mac, est parti en mars. Cas isolés? Pour l’instant, oui. Mais conserver l’équipe des top-managers sera difficile: ils ont déjà fait fortune grâce à leurs stock-options.

Rester différent

Le portrait de Picasso, les cheveux ébouriffés d’Einstein. Une légende: « Think different. »La campagne de publicité, démarrée en 1997, martelait qu’Apple était différent, que les utilisateurs d’Apple étaient différents et formaient une élite du hightech. Tout reposait sur l’inventivité de Steve Jobs, s’interrogeant sans arrêt sur le prochain produit. « Ce qui m’a le plus surpris chez Steve Jobs, c’est son incroyable optimisme, note, par exemple, Daryl Plummer, de Gartner. Non pas son optimisme sur la concurrence ou les résultats financiers, mais sur les produits à venir. »

Le fait que son successeur, Tim Cook, est capable de diriger l’entreprise ne laisse aucun doute. Mais, s’il a fait preuve de génie pour déployer les ventes d’Apple en Asie, est-il pour autant capable d’incarner le « think different »? Jean-Louis Gassée, ex-numéro deux d’Apple, ne le pense pas: « Après Steve, qui va maintenant nous protéger du bon marché et du médiocre? »

Gérer une position dominante

Ironie de l’histoire, après avoir été victime de la position dominante de Microsoft, la firme à la pomme suscite à son tour une opposition. Le succès d’iTunes, qui, dans un premier temps, a réconcilié l’industrie de la musique avec le numérique, commence à devenir pesant. Impossible de percer sans passer par Apple. Impossible de vendre sans passer par Apple.

Une question écrite a été déposée au Parlement européen en février pour dénoncer l’abus de position dominante d’Apple. Même panique dans les tablettes, dont Apple détient 75% du marché. « Apple va dominer les tablettes jusqu’en 2015″, confirme une étude du cabinet Gartner, à tel point que HP a cessé la production de sa propre tablette. Google, de son côté, rend coup pour coup avec son propre système d’exploitation, Android. L’enjeu dépasse celui du terminal physique et concerne le gigantesque gâteau de la distribution des contenus. Un marché sur lequel Apple prélève 30%. Sans réelle concurrence.

Réussir les prochains lancements

Le calendrier des sorties d’Apple n’a pas varié d’un iota. Prochain hit annoncé: l’iCloud, un système permettant d’héberger n’importe quel contenu de façon qu’il soit immédiatement accessible sur tous les supports – iPad, iPhone, iPod, Mac et PC, plus besoin de disque dur… Le système est disponible en test, et devrait être commercialisé prochainement. La sortie de l’iPhone 5 est toujours prévue pour cet automne. L’écran sera plus grand, l’antenne de meilleure qualité, et il sera doté d’un appareil photo de 8 méga-pixels, contre 5 actuellement.

Le plus important n’est pas là Selon Reuters, Apple aurait demandé à ses sous-traitants de se tenir prêt pour une production de 45 millions de téléphones, le double de ses ventes du dernier trimestre (20 millions). Serait-il sur le point de basculer vers le mass market, une façon de pénétrer les marchés émergents? « C’est ce qu’Apple a fait avec succès avec l’iPod », rappelle Mathieu Drida, PDG de Meilleurmobile.com. En tout cas, la part de l’Asie dans le chiffre d’affaires d’Apple a doublé en un an, passant de 11 à 22%.

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