"John Rambo" de Sylvester Stallone

Publié le 12 février 2008 par Laterna Magica

Ce que vous appelez l'enfer, il appelle ça "chez lui" (Rambo II).

John Rambo est d'abord un personnage de roman crée par David Morell et si en France, l'ensemble des films portent très simplement le nom du personnage, le titre original renvoie lui au titre du roman : The First blood. Le premier sang. Le premier sang, ce n'est jamais Rambo qui le verse, seulement voilà, il y a toujours quelqu'un pour venir le sortir de sa quiétude et vouloir lui faire la peau. En 1982, Rambo permettait un débat sur le difficile retour des boys du Viet-nam. John Rambo est une victime. On a fait de lui une machine de guerre, un être de pur survie, on l'a laissé s'aguérir au combat avant de le jeter comme un vieux pailliasson à son retour chez lui.

Quand Rambo retourne au pays en 82, il cherche de vieux amis Bérets Verts qui sans doute sont les seuls à pouvoir comprendre ce qui le rongera pour toujours. Ces amis sont morts, Rambo est seul et surtout, il trouve une autre guerre, "une guerre qu'il ne peut pas gagner". La problématique du film est différente de celle insérée par exemple par Scorsese dans Taxi Driver via le personnage de Travis Buckle. Mais Travis et John ont ceci en commun que le Viet-nam les a traumatisé et que la société ne peut plus tolérer des gens comme eux.


Avec Rambo 2 et Rambo 3, le personnage culte incarné par Stallone est devenu un symbole fort de la politique étrangère américaine de l'époque. Très exactement vingt ans après avoir repoussé à lui seul l'envahisseur russe d'Afghanistan, Rambo chasse le serpent dans le sud-est de l'Asie. Le retour de Rambo pourrait sans doute s'assimiler au nouvel ordre du monde dessiné depuis le 11/09/2001 et les politiques des différentes administrations de George W. Bush. Mais ce ne sera évidemment et heureusement pas le cas. John Rambo a été abandonné par son gouvernement depuis bien longtemps et n'a plus de compte à lui rendre. Rambo est seul, mutique, replié sur lui-même et désabusé. Il est le même qu'à son retour sur le sol US dès Rambo 1. La foi en l'humain, John l'a perdu bien avant, probablement dans les jungles vietnamiennes. Maintenant, il vit au coeur de la jungle birmane car il sait que là au moins, on devrait le laisser tranquille. Et la jungle, c'est chez lui.

Le revival de John Rambo ne s'accompagne donc pas d'un soutien quelconque aux politiques gouvernementales actuelles. Stallone au contraire à choisi de placer son personnage dans un contexte méconnu, la guerre génocidaire qui se joue en Birmanie. Le générique du film propose des images d'archives de cette guerre bien réelle et dès plus barbares. Dans John Rambo, le personnage joué par Stallone n'est plus capable de gagner une guerre à lui seul. Il est plus humble que ça face à la barbarie insupportable d'un groupe de militaires. Stallone choisit de ne rien épargner de cette violence là, une violence qu'il condamne clairement en la montrant dans tout ce qu'elle à de plus abjecte.


John ne souhaitait pas sortir de sa nouvelle routine, il n'avait aucune intention de reprendre les armes. Un groupe de missionnaires américains le sollicite pourtant pour les conduire en Birmanie, là ou ils pourraient exercer leur oeuvre bienveillante. Rambo a beau faire comprendre que l'idéalisme forcené qui les anime ne se conjugue pas avec le réalisme de massacres gratuits, les missionnaires ont encore quelque chose que Rambo a perdu depuis très longtemps : la foi en l'humain.
On a quelques exemples bien réels dans l'actu récente ou les intentions humanistes mais non raisonnée de quelques ONG auront contribuées à mettre un peu plus le feu aux poudres. Dans la réalité, il y a rarement des John Rambo pour remettre un peu d'ordre dans le chaos. Il en faudrait pourtant au moins pour ne libérer par exemple Ingrid Betancourt. Mais John Rambo est un personnage de pure fiction, une machine de guerre programmée pour survivre dans des jungles ou nul autre homme que lui ne peut garder la vie très longtemps.


Le personnage de John Rambo n'a plus rien a prouver, plus rien a gagner d'être encore en vie. Il préfère néanmoins "mourir pour quelque chose que vivre pour rien". Rambo retrouve un peu de foi à mesure que les idéaux des missionaires s'échappent sans possibilité de retour. John Rambo est peut-être un film ultra-violent mais il reste surtout un film qui dénonce la barbarie. Stallone à ceci de génial qu'il est tel un phoenix. Il y a un an, il réussissait un come-back exemplaire avec Rocky Balboa. La nouvelle légitimité qu'il redonne au personnage de John Rambo est tout autant impressionnante. Comme Rocky, John est devenu humble, conscient de ce qu'il a été et qu'il n'est plus, conscient de ces échecs et déterminé à vivre simplement sans pour autant renier le sang qui coule dans ses veines. Rambo est un personnage redevenu humain. Stallone n'est lui plus seulement une star stéroïdée de films d'action, il est devenu un véritable cinéaste, réfléchi, posé, lucide. John Rambo, comme Rocky Balboa, en est la preuve. Bravo et merci.

Benoît Thevenin


John Rambo - Note pour ce film : Réalisé par Sylvester Stallone
Avec Sylvester Stallone, James Brolin, Paul Schulze, ...
Année de production : 2007