Bals costumés des années folles

Publié le 23 septembre 2011 par Cameline

Une fois de plus je trouve mon inspiration dans les journaux des années 1920. Aujourd'hui, même si nous sommes encore loin de la saison du carnaval, je vais vous parler des bals masqués, appelés alors bals travestis.


"Voici venir avec les rigueurs du froid et la tristesse de la pluie, la consolation charmante des bals travestis. Ils sont la supême joie de l'hiver, puisqu'ils ajoutent aux heures joyeuses de leur réalisation la période passionnante des préparatifs.

Mais maintenant un bal masqué n'a plus son caractère classique ; il a gagné en fantaisie et en imagination.

Autrefois on ne s'inquiétait guère du costume. La tradition voulait que les femmes brunes s'habillassent en Espagnoles ou en bayadères ; les blondes en colombines ou en pierrettes. Ces costumes eux-mêmes étaient presque immuables dans leur coloris et leurs détails."

"La mode qui a fait des progrès si remarquables dans tous les domaines ne pouvait négliger celui-là, et les travestis modernes sont remarquables par leur variété, leur originalité, et même leur luxe. Que tout cela laisse en arrière le cortège classique d'Arlequin, de Colombine, de l'Espagnole et du petit pâtissier ... Seul le Pierrot garde tout son succès. Il le doit à ce charme mystérieux éternel qui n'appartient qu'à lui."

"Aujourd'hui, une jolie femme s'en voudrait de ne pas chercher une idée piquante et neuve ; de ne pas s'ingénier à trouver le déguisement inattendu, inédit qui la classera reine du bal !"

"Est-ce à dire qu'il faut dépenser beaucoup ? Mais non ! Pour mettre à l'exécution un costume original, il est possible presque toujours d'utiliser des matériaux, des étoffes que l'on a déjà et qui dorment dans des tiroirs."

Admirez donc les illustrations suivantes, avec des costumes étonnants, et dont les commentaires précisent en détail couleurs et tissus.

"La pêche est symbolysée par un filet d'or à grandes mailles, jeté sur un fourreau de satin noir où sont appliqués des poissons verts.

 "Sauvageonne porte sur une gaine de velours noir un pagne de raphia naturel ou teint. Des colliers de perles multicolores cliquettent autour des bras et des jambes.

"L'abeille : une robe-corselet en drap d'or bruni simule les anneaux, avec, sur les hanches, deux ailes de tulle."

"Vous, Cécile aux fraîches joues, n'avez-vous pas imaginé d'aller au bal la semaine passée, déguisée en "barrière de jardin" ?

Vous avez pris pour cela votre robe cloche de l'an passé en taffetas blanc, sur laquelle vous avez cousu un treillage de larges rubans verts. Puis vous avez fait entrevoir entre ces barreaux des roses trémières que vous avez peintes vous-même, et dont les hampes fleuries s'épanouissent sur votre corsage. De courtes manches en treillage et sur votre tête.

"Un costume égyptien est tout indiqué, en ce temps où l'exotisme règne sur les modes. Vous qui êtes de mignonne stature, ne vous laisserez-vous pas tenter par ce fourreau de lamé d'or brodé de noir et rouge-brique, qui exige de courts cheveux noirs et lisses."

Voici "la faïence de Delft en taffetas blanc, peint de bleu avec un bonnet hollandais.

Viennent ensuite de "charmantes reconstitutions des célèbres tableaux de Greuze, d'une grâce si fraîche qui convient à presque toutes les jeunes filles. Ce serait délicieux pour deux soeurs à peu près du même âge, ou encore mieux pour deux soeurs jumelles que cette évocation de paysannes très conventionnelles : "la Cruche cassée", habillée d'un corselet de velours cramoisi noué par des rubans de même couleur sur la jupe montante, en taffetas vert. Le fichu, les manches bouffantes et l'écharpe débordante de roses sont en mousseline blanche ; les cheveux sont retenus dans une résille verte.

"La laitière" a, elle aussi, un corsage de mousseline blanche et une jupe de velours rouge ; son tablier, si bien drapé autour de sa petite taille cambrée, est en taffetas vert ; son bonnet est en mousseline blanche".

 

Voici une "poupée-coussin". "Sa robe de velours rouge cerclée et maintenue épanouie par de la mousseline raide est son principal attrait ; une bande de fourrure et une autre en tissu lamé or, rouge et noir lui confèrent le luxe nécessaire. Un turban en gaze d'or est prétexte à un flot de gaze d'or plissée qui, versé de côté, simule le gland d'or du coussin".

"Le "parapluie" se compose, lui, d'une jupe de soie plissée, resserrée intérieurement, dans le bas, par un élastique et évasée aux hanches, tandis que le corsage, pour simuler le manche, est taillé dans un tissu imprimé de dessins chinois.

Le "flacon de parfum" est une piquante actualité, puisque jamais les parfums n'eurent autant de succès.

Vous pouvez être un parfum en vogue grâce à une excentrique perruque noire, à des ficelles dorées au cou et à la taille, grâce à votre robe d'or à jupe ballonée".*

"Passons à la "boîte à poudre". Avec sa jupe de taffetas jaune rayé de rouge et taffetas rouge uni. Une bande de cygne simule la houppe, mi-sortie.

Puis, joujou du jour, "la poupée de laine" étale ses écheveaux multicolores et secoue sa perruque en bouclettes de laine blonde, tandis que bruissant et féérique, le "jet d'eau" agite ses perles d'argent de son turban, et de ses mille bracelets de cristal ..."

"En général, l'intérêt des bals est de n'en pas mélanger les styles. Il faut bien indiquer dans l'invitation s'il s'agit de bals de pure fantaisie, ou de bals de style. On a pris l'habitude, très intéressante d'ailleurs, de reconstituer une époque. Il y a le bal vénitien du temps de Casanova, le bal chinois, le bal breton.

En 1925, "le Corsaire est au goût du jour. Et si, d'aventure, vous voulez réjouir vos amis, transformez rapidement votre hall ou votre studio suivant ces directives. Les vieux draps teints composeront des voiles glorieuses, quelques filins pendant du plafond, des haches d'abordage, des sabres et parmi les jurons pittoresques ou les termes techniques, figurez l'enlèvement de quelque belle captive.

Avec quelques sans-culottes, des carmagnoles, des cordages, deux ou trois tonneaux de poudre, mèche brûlante, des voiles éparses et des étraves rompues, l'Animateur, ou Organisateur des réjouissances artistiques, compose des divertissements multiformes ensorcelants."

Costumes du Moyen Age :

"Le dameau hennin, échappée d'une miniature précieuse du XVe siècle, porte une robe d'ampleur moyenne, dont la jupe taillée droit fil s'allonge derrière en une traîne arrondie.

Le corsage plat s'ouvre largement en coeur sur une guimpe de tissu d'or, jusqu'à la taille placée assez haut ; elle est soulignée d'une ceinture de métal, galon ou plaquettes.

Le grand décolleté est bordé d'une bande de vair, c'est-à-dire de petit-gris. Les manches collantes descendent très bas sur les mains.

Le grand hennin, fait d'un cornet de sparterie tendu de tissu d'or, est entièrement voilé d'une mousseline légère qui retombe gracieusement sur les yeux et enveloppe  toute la sihouette.

"Si, dans le cours de la saison, vous participez à plusieurs fêtes parées, vous pourrez facilement tranformer ce costume qui est une robe d'apparat du XVe siècle en une robe d'intérieur plus simple de la même époque.

Pour cela, vous supprimerez le hennin et le remplacerez par une gracieuse coiffe de lin comme celle que vous voyez sur le second dessin. C'est un rectangle de mousseline de communiante de 0m,45 sur 0m,85, posé en bandeau très bas sur le front et attaché derrière à la façon des voiles d'infirmières. Les deux pans flottants sont ramenés sur le haut de la tête comme précédemment. Pas un cheveu ne passe et cette mousseline tout près du visage est délicieusement seyante en son austérité.

Pour accompagner cette coiffure, la robe est revoilée d'une sorte de cape en mousseline de soie peinte ou imprimée. Cette cape est un rectangle légèrement arrondi des coins. Au tiers de sa hauteur, une ouverture permet de passer la tête. La partie courte voile à moitié le devant de la robe, la partie longue couvre tout le dos."

"Ajoutons que si les frais du bal inquiètent un peu, on peut remplacer le bal de travesti complet par le bal de "têtes".

Si peu coûteux que puisse être un costume, une "tête" le sera toujours moins. Il faudra surtout dépenser moins de temps, et les femmes qui ont un visage original pourront en faire ressortir toutes les qualités.

Petite figure ronde et rustique, coiffez-vous d'une grosse tomate de satin ; doux visage régulier, d'une corbeille à ouvrage d'où s'échappent des pelotons ... mais point d'aiguilles. Avec des écheveaux de soie floche blanche ou jaune paille, il est facile de reproduire la coiffure excentrique de la poupée à la mode.

Il faut dire toutefois que si le déguisement s'arrête à la tête, il est bon que la toilette de soirée reste dans la note générale et que la tomate ne s'achève point en "princesse", ni la corbeille à ouvrage en "Salammbô".

Les fourreaux de crêpe satin, travaillés dans l'envers de l'étoffe, de forme souple, retenus sur la hanche par une ceinture de perles ou de fleurs sont donc tout indiqués.

* Avez-vous reconnu ce parfum en vogue en 1924 ? Dans ce cas, j'attends impatiemment votre réponse ... parce que je ne l'ai pas trouvé !

Sources :

Journal "La Femme de France", entre 1920 et 1926, d'après les articles écrits par Coline et Pierre de Trévières, illustrés par Seraph