Embarquez pour les dernières années tumultueuses de la République Romaine. Rome revient sur HBO, et un adjectif s'impose dans mon esprit pour qualifier ce premier épisode de reprise : grandiose.
Bluffée, happée par la force, l'émotion, la symbolique de l'ensemble, je suis totalement par conquise par ce brillant retour de la série.
La saison 2 reprend au moment où la saison 1 s'était achevée. Cesar vient d'être assassiné. Niobe vient de se suicider. Au milieu de cette mare de sang, le chaos menace Rome. Tout est suspendu aux prochaines actions des différentes factions.
L'épisode multiplie les scènes marquantes et symboliques. Les silences en disent plus que de longs discours et si les scénaristes choisissent de prendre quelques raccourcis historiques assez drastiques, ils sont immédiatement pardonnés au vu du résultat. Première scène pour nous remettre dans l'ambiance, avec Marc Antoine qui doit fuir du sénat, pourchassé par une bande d'assassins. Une scène qui suffit à retranscrire le souffle de violence, l'embrasement qui risque de suivre la mort de Cesar.
Apprenant l'assassinat, Atia s'effondre déboussolée et l'on sent l'autorité de la famille qui passe peu à peu des mains d'Atia à celles d'Octave. Ce dernier ne perd pas le nord, parfaitement conscient des implications de la mort de Cesar, il montre un talent d'analyse et de tacticien indéniable, potentiel bien présent qui sera progressivement pleinement exploité. Les raisonnements d'Octave sont intelligents, mais il faut surtout s'arrêter sur les scènes après la lecture du fameux testament. Il n'hésite pas à s'opposer aux décisions de Marc Antoine, prises dans la précipitation, pour souligner les failles du raisonnement juridique des conjurés et parvenir à trouver les bons arguments pour convaincre sa mère et Marc Antoine du bienfondé de ses vues. Dans ces scènes regorgent toute la symbolique du futur dernier acte de la République. Les équilibres et affrontements sont annoncés de façon sous-jacente dans une mise en scène vraiment bien menée. Différents moments mériteraient aussi d'être mis en relief, comme l'insistance sur le nom de Cesar notamment qu'Octave acquiert par le testament en devenant son fils adoptif, et surtout son héritier.
Mais si les tempéraments d'Octave et de Marc Antoine n'ont rien de commun, Marc Antoine n'est pas non plus un imbécile. Convaincu par Octave, il se rend seul chez Brutus et Servilla, avec ce mélange d'arrogance et de défi qui lui est caractéristique. Là encore, la scène de l'entrée en dit plus long que bien des discours, comme Marc Antoine arrive alors que Ciceron se lamente auprès de Brutus qu'il soit encore en vie. L'inimité entre Ciceron et Marc Antoine a toujours été présente dans la série, mais cette mise en exergue dans cette scène particulière est encore plus symbolique comme on sait comment finira bientôt Ciceron. Les négociations en elles-mêmes prouvent que Marc Antoine sait également prendre Brutus et les siens à leur propre jeu tant sur la légalité que sur les volontés du peuple romain.
L'amnistie est conclue, dont on sait qu'elle n'est qu'une façade très fragile. Marc Antoine comme Octave sont prêts à se venger. Et d'ailleurs, la série pousse le parallèle jusqu'à montrer la différence d'appréciation dans la vengeance entre les deux hommes. Marc Antoine n'hésite pas à tuer devant la maison de Brutus, après l'armistice, celui qui a manqué de le tuer plus tôt dans la journée. Parallèlement, comme Pullo l'interroge sur ses désirs de vengeance, Octave se contente de répondre d'un ton aussi décidé que froid, "en temps voulu".
L'enterrement de Cesar est encore un grand moment. Les voir tous réunis dans l'obscurité, les visages éclairés par les flammes, autour du cadavre de Cesar, est une scène d'une très grande force. La série choisit de ne pas nous montrer les évènements lors des discours de Brutus et Marc Antoine, optant par un récit d'une tierce personne. Cela n'en donne que plus de force à l'évènement. Marc Antoine sait jouer les orateurs, attiser la colère de la population. Brutus n'est pas perçu par ces derniers comme le 'sauveur de la République', au contraire. L'épisode se termine avec son départ forcé de Rome, sous un prétexte fallacieux.
Parallèlement à cette grande histoire qui s'écrit, Vorenus ploie sous la douleur des drames qui le frappent. La mort de Niobe achève de le perdre dans sa souffrance au milieu de toutes ces trahisons. Comme toujours, il est emporté dans sa colère, maudissant le reste de sa famille. C'est un Vorenus choqué, pris dans un tourbillon de violence, qui traverse l'épisode. Si le chaos est encore plus présent que les dehors policés de la haute société, l'ensemble ne prend véritablement son envol qu'avec le retour en catastrophe de Pullo. L'amitié des deux soldats n'a jamais semblé si soudé et si touchante à la fois.
Le parallèle ensuite entre les funérailles de Niobe et celles de Cesar achève de souligner la volonté des scénaristes de faire se cotoyer et évoluer en parallèle la grande et la petite histoire. Les drames et les réussites semblent devoir se confondre jusqu'au bout. Déjà Pullo a assuré Octave de son soutien pour le futur. Il sera donc du côté du vainqueur (s'il survit jusque là).
Le seul bémol sans doute, s'il fallait en trouver un, se trouve dans les escapades champêtres de Pullo et de sa belle gauloise. Assez inutiles, mais d'un autre côté, il faut quelques moments pour se remettre de toutes ces émotions.
Bilan : C'est historiquement un condensé factuel assumé, mais parfaitement maîtrisé et magistralement réalisé. J'adore la symbolique dont regorge de nombreuses scènes qui préfigurent le futur de façon sous-jacente.
Un grand retour donc.