ANOTHER EARTH de Mike Cahill

Par Celine_diane


Plein d’un spleen atmosphérique, mi-poétique, mi-clippesque, Another Earth signé Mike Cahill, jeune réalisateur américain, offre un trip SF croisé drame post traumatique délicieusement singulier. Au commencement, un pitch convenu : l’histoire d’une jeune fille (Brit Marling, vraie révélation), responsable de la mort d’une femme et de son fils suite à un accident de voiture, qui tente de se racheter auprès du mari endeuillé (William Mapother, Ethan de la série Lost), quatre ans après les faits. Pourtant, beaucoup de belles trouvailles viennent transcender cette banalité : l’irruption, notamment, d’éclairs fantastiques avec la découverte d’Earth 2, deuxième planète Terre dont jaillissent mille questions existentielles. L’occasion pour Cahill de mêler la dignité d’un mélo blafard aux promesses de l’imaginaire : cette Terre dupliquée est-elle une deuxième chance ? Quels autres possibles se trouvent alors offerts ? Qu’implique cette nouvelle donne dans l’analyse de la destinée humaine ?
Avec un travail impressionnant sur la photographie au vu du petit budget (granulée, glauque, ouatée), sur les sons (tiraillés, disharmonieux)- échos des tourments des protagonistes, et, sur les apartés (métaphysiques, philosophiques), Another Earth prend le temps d’installer son ambiance particulière, entre parenthèse dépressive et vague à l’âme adolescent. Globalement, le film est intense, fascinant, surtout parce qu’il avance masqué, aérien et prudent. Le cinéaste préfère les ressentis aux mots, enveloppe des thématiques vues partout ailleurs (deuil, pardon, rédemption, culpabilité) dans une bulle de désespoir, un peu poseuse mais à l’esthétisme envoûtant. Des accélérés, des rayons de lumière, des silences. Tout du long, Another Earth laisse libre cours à l’imaginaire du spectateur, n’impose pas sa vision d’une planète malade (comme Von Trier sur Melancholia par exemple), et permet au contraire d’évoquer le désespoir commun à la lumière de tragédies individuelles. Troublant. A l’image de cet instantané final, au pessimisme dérangeant.