De « L’euro est là et crapoto basta » … à la Crise de l'Euro est là !!!

Publié le 16 octobre 2011 par Davidmourey25

Le 23 janvier 1999, Jean-Paul FITOUSSI a publié une tribune dans le quotidien Le Monde que je n’ai jamais oublié et vous allez comprendre pourquoi.

En janvier 1999, l’euro, notre monnaie unique, venait d’être officiellement crée.

Même si l’euro n’allait entrer dans les porte-monnaie de tous les agents non financiers que trois ans plus tard entre le 1er janvier 2002 et le 17 février 2002, il fut crée début 1999.

Celui qui était encore le Président de l’OFCE, fonction qu’il a quitté en début d’année 2011, ironisait avec une belle dose d’humour sur le concert de louanges que s’adressaient à eux-mêmes les architectes de l’euro, les institutions monétaires et financières et que ceci fut complètement relayé avec peu d’esprit critique par les médias de l’époque.

A partir d’une métaphore bien trouvée et très drôle, Jean-Paul FITOUSSI comparait le pouvoir officiellement proclamé de l’euro, de résoudre tous les problèmes de l’Europe, au pouvoir de la lessive Omo de nettoyer le linge parfaitement, de résoudre tous les problèmes posés par n’importe qu’elle tache.

« OMO est là et Crapoto Basta »

 

« CE FUT un spectacle étonnant que les médias audiovisuels ou écrits donnèrent en représentation. Entre campagne publicitaire, révélation d'un miracle et expression d'un nouveau chauvinisme européen. La monnaie unique avait toutes les vertus et allait être le deus ex machina d'un destin glorieux de l'Europe.

Elle allait, de par son propre avènement, résoudre tous les problèmes, modifier les cartes de la puissance et de la domination dans le monde, etc.

La première impression qui me vint à l'esprit fut cette association d'idées entre le lancement de l'euro et la campagne publicitaire d'une grande marque de lessive : l'euro est là et crapoto basta. »

(…)

« Des voix discordantes se sont, certes, fait entendre, mais le concert de louanges, d'autosatisfaction, fut à la mesure de l'événement. On entendit même des cris de victoire : l'euro allait étendre son empire sur le monde, le dollar serait bien vite détrôné, le premier round du match s'étant terminé à l'avantage de l'euro, etc… »

 

Une critique humoristique qui prend tout son sens aujourd’hui

 

Il me semble qu’au moment ou nous traversons une crise des dettes souveraines sans précédent, qu’étant donné que cette crise des dettes souveraines est une crise de la zone euro et de l’euro lui-même, cette critique humoristique prend aujourd’hui un tout autre sens.

En effet, sans jeter le bébé avec l’eau du bain, sans rejeter en bloc l’euro et la zone euro, sans ignorer qu’à coté des défauts de l’euro et de la zone euro, il existe de nombreux bienfaits…, on ne peut faire comme si les architectes de l’euro et leurs fidèles partisans ne s’étaient pas trompés sur des points fondamentaux.

L’euro n’a pas crée l’homogénéité attendue

L’euro n’a pas été ce vecteur d’homogénéisation des économies réelles.

Bien au contraire, avec la disparition des risques de change, les spécialisations ont pu se fonder durablement et se renforcer en fonction des avantages comparatifs et dotations factorielles de chaque économie.

Désindustrialisation, dette extérieure et dette publique

Le résultat est qu’une partie de la Zone euro est en excédent courant et commercial (le Nord) et une autre est en déficit courant et commercial (le Sud).

Les premiers ont une assise industrielle forte et peuvent épargner suffisamment pour financer une bonne part de leur endettement privé et public, les seconds sont trop désindustrialisés et doivent emprunter excessivement aux non résidents pour financer leurs déficits extérieurs et budgétaires.

Une architecture institutionnelle fondamentalement défaillante

De surcroit, nous savons indubitablement aujourd’hui qu’une des causes profondes de la crise des dettes souveraines dans la zone euro est liée à une grave faiblesse de l’architecture institutionnelle de celle-ci.

Faire la monnaie unique ne peut être efficace s’il n’existe pas un degré de coordination budgétaire digne d’une Union économique et monétaire.

Avoir une monnaie commune et unique (et donc une politique monétaire commune et unique) sans ce qui ressemblerait à une politique budgétaire commune, voire unique, ne pouvait nous conduire qu’à une crise des dettes souveraines dont la conséquence majeure serait de remettre en question la survie de l’euro et de la zone euro.

 

Excès d’optimisme et surdité

Les architectes de l’euro et leurs plus fideles partisans ont largement péché par optimisme, orgueil et négligence.

Ils n’ont pas écouté les critiques, ne prenant pas la peine de distinguer celles qui venaient de partisans de la création de l’euro de celles venant de partisans de sa disparition.

Dans ces conditions, il ne faut pas s’étonner du résultat. Nous récoltons ce que nous avons semé, ou plutôt ce qu’a semé une minorité !

Ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain

Mais, rien n’est encore perdu.

Il convient, plus que jamais, de dire la Vérité sur les vices et les vertus de l’euro et de la zone euro.

Il est plus que temps, l’impatience est désormais à son comble.

Sinon nous allons droit dans le mur et en accélérant.

Vices et vertus de l’euro : dire enfin la vérité !

Pour terminer son article de janvier 1999,  Jean-Paul FITOUSSI écrivait :

 

« Le camp des impatients aurait aimé entendre un autre discours :

« Grâce à vous, nous avons fait l'euro. Pour aboutir, nous vous avons parfois demandé d'inutiles sacrifices, mais le chemin radicalement nouveau que nous empruntions était semé d'embûches, ce qui explique nos maladresses et nos erreurs.

Mais nous avons fait l'euro pour vous, pour mieux régler les problèmes de votre vie quotidienne, ce dont nous étions empêchés dans le cadre d'une pluralité de monnaies.

C'est un instrument puissant que nous entendons mettre entièrement à votre service, c'est-à-dire au service de la croissance et de l'emploi.

Nous avons travaillé d'arrache-pied, pendant que les informaticiens assuraient la traduction en euros des titres financiers. Voilà le résultat de notre travail, un programme d'expansion économique que nous allons mettre en œuvre sans plus attendre.

Nous n'entendons pas perdre une seconde de plus pour mettre à profit les nouvelles opportunités que nous offre l'euro. Autrement, pourquoi l'aurions-nous fait ? »

Encore une fois, ces remarques prennent beaucoup de sens aujourd’hui !!!

A suivre donc…

A consulter :

« Opération TWIST » pour la Réserve Fédérale américaine FED

Evolution du Prix du Pétrole et Taux de Change de l’Euro en Dollar

Evolution du Taux de change de l'Euro en Dollar depuis1999

Crise de la Zone Euro : « Le FESF proche de la transformation »

Zone Euro : « le politique a constamment un temps de retard »

« Sortir de l'Euro ? – Une idée Dangereuse » par Evariste LEFEUVRE

Le Fond européen de stabilité financière, FESF, raconté aux enfants : FESF, MESF, …, MSE