Est ce la fin des concentrations dans le secteur automobile ?

Par Frédéric Quaranta

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08.11.2007

Est ce la fin des concentrations dans le secteur automobile ?

Première partie è pourquoi des concentrations ?

Les annonces de regroupement se succèdent depuis des années dans le secteur automobile. La course au gigantisme fait partie de la stratégie de croissance des principaux acteurs. Le dernier exemple en date est le rachat de la branche automobile de Siemens (Siemens VDO) par la société Continental. Permettant ainsi à ce nouvel ensemble de devenir le 5ème équipementier automobile mondial.

Ce phénomène a toujours existé dans le secteur automobile, et je dirais même que l´industrie automobile est née avec les fusions : General Motors, premier constructeur mondial jusqu´à peu, est né en 1909 par la fusion de Buick, Cadillac et Oldsmobile.

Mais sur quels éléments cette stratégie est elle fondée ? Quelles contraintes poussent les constructeurs et équipementiers à se concentrer ? Pourquoi il y a actuellement un changement de tendance chez les constructeurs ?

Demon point de vue, 6 piliers sont à l´origine de ces fusions.

 Pilier n°1 : Limiter la concurrence.

Chaque entreprise doit faire face à la concurrence sur son marché. Plus il y a de compétiteurs, plus il est difficile de conserver ses marges : la concurrence ayant tendance à faire baisser les prix. Cette évidence économique s´applique à l´industrie automobile. La meilleure manière de faire face à un concurrent, c´est de l´absorber. De façon naturelle, la concurrence pousse les Entreprises à rechercher la concentration. L´Entreprise cherche à fuire la concurrence pour assurer sa profitabilité : le monopole étant la position permettant d´optimiser au plus sa profitabilité. Aujourd´hui, il y a un petit nombre de d´offreurs qui se partagent le marché automobile (constructeurs et équipementiers). Il s´agit d´un marché oligopolistique. On arrive dans certains segments du marché à la limite avant le passage en monopole.

Pilier n°2 : Les marchés occidentaux sont matures, et tirés par le renouvellement.

Les constructeurs automobiles occidentaux doivent donc jouer sur les 2 dynamiques concurrentielles génériques qui sont la différenciation et la compétitivité.

Différenciation par le mix produit, et la réduction du cycle de vie des véhicules. Il faut donc investir le moins possible pour permettre l´amortissement des investissements sur une courte durée. Cela est possible en utilisant des plateformes communes à plusieurs modèles et en rationalisant les composants non différenciants. Plus le constructeur est gros, plus il peut rationaliser et faire jouer l´effet plateforme pour limiter les immobilisations financières.

Compétitivité pure par la baisse de coûts grâce à des effets volumes. Et l´on retrouve l´effet volume par les plateformes. Plus vous vendez de véhicules, plus vous pouvez baisser les coûts de vos composants grâce aux plateformes communes.

Imaginez que Audi, Bentley, Bugatti, Lamborghini, Seat, Skoda, Volkswagen font toutes partie du Groupe Volkswagen.

Pilier n°3 : La croissance se trouve sur les marchés internationaux. C´est la globalisation

Comment déployer une marque sur un marché en pleine croissance où l´on n´a pas de positions ? Comment développer des parts de marchés sur un marché où les marques locales sont fortement positionnées ? Comment comprendre les contraintes du marché local et appréhender les attentes des clients ?

Une des contraintes du lancement sur un nouveau marché est le temps, et les risques financiers associés. Or les investissements dans l´industrie automobile sont extrêmement importants.

Lorsqu´un constructeur étranger (marque coréenne par exemple) s´implante en Europe, il développe sa marque sur le long terme. Les positions sont déjà prises, les marques locales sont extrêmement fortes, Il y a de fortes barrières à l´entrée. La croissance des parts de marché ne peut se faire que lentement sur un marché qui stagne.

Les marchés de croissance sont eux extrêmement dynamiques. Les positions doivent se prendre très rapidement au risque d´être définitivement perdues. Le seul moyen est de prendre des participations dans les constructeurs locaux, et de nouer des alliances industrielles. L´achat de parts de marché peut être un moyen indispensable pour s´implanter.

Pilier n°4 : Les échecs commerciaux doivent avoir le moins d´impact possible sur les résultats de l´entreprise.

L´exemple de PSA est particulièrement intéressant. En 1976, Peugeot absorbe Citroën pour devenir PSA, et du même coup le premier constructeur Français. Pendant de nombreuses années, ces 2 marques ont continué de se faire concurrence, malgré leur appartenance au même groupe. Durant sa présidence, Jean-Martin Folz s´est efforcé de développer des synergies industrielles et une forte différenciation entre les 2 marques. Il a créer les conditions permettant de préserver les résultats malgré des échecs de lancement. Les échecs de l´une étant contre balancés par le succès de l´autre. Les résultats sont lissés, malgré des hauts et des bas de chacune des marques. Les Entreprises absorbées deviennent des marques avec leurs lignes produit spécifiques. Plus le portefeuille produit est large, plus le risque commercial est diffusé et donc moins impactant.

Pilier n° 5 : Equilibrer les rapports de force : les équipementiers

Les effets de plateforme permettent d´assurer des volumes importants aux équipementiers, et donc d´assurer du chiffre d´affaires conséquent sur plusieurs années. Le revers de la médaille est leur forte dépendance aux plateformes. Chaque renouvellement de plateforme devient un enjeu financier, social et industriel. La prochaine plateforme BMW (PL7) qui est la base technique de la nouvelle série 3, représente un peu moins de la moitié du volume de production total de BMW. Les impacts de la perte d´un marché de cette ampleur sur l´équilibre social et sur les résultats financiers sont énormes. C´est pourquoi, de la même manière que les constructeurs avec leurs marques, les équipementiers cherchent à lisser les résultats et à limiter leur dépendance. Plus le fournisseur est gros, plus il a de clients, plus il a de plateformes, plus le risque commercial est limité. C´est également un des objectifs de l´élargissement du portefeuille produit.

Pilier n°6 : La création de valeur.

La création de valeur fait partie des justificatifs que les Managers d´Entreprises fournissent au marché, lors de grand regroupement. Il est vrai que théoriquement, cela présente des intérêts certains :

  • Moins d´investissements pour un résultat identique è augmentation de la valeur ajoutée
  • Optimisation des services centraux, donc réduction des coûts pour un résultat identique è augmentation des résultats.
  • Parfois en fonction du profile des deux entreprises, complémentarité des lignes produit, des positions géographiques, des savoirs faire è avantage concurrentiel, donc un potentiel de croissance et de résultats augmenté.

Est ce qu´en réalité, les Fusions Acquisitions dans l´industrie automobile sont si efficaces et génératrices de valeur ? Est ce que cette tendance à la concentration va continuer ? Quelles sont les stratégies actuelles des constructeurs et équipementiers ?

Ces interrogations sont le point de départ de la deuxième partie à venir.

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