Le succès inattendu du nouveau film du réalisateur Radu MIHAILEANU au festival du film d’Abu Dhabi

Par Mickabenda @judaicine

« Aujourd’hui, il y a des gens pour dire que les Arabes sont méchants, que les Musulmans sont méchants et que le Coran est mauvais. Je veux leur répondre que non, qu’ils sont beaux car ils sont des êtres humains comme les autres et je veux montrer cette beauté ».

C’est avec ces mots que le réalisateur roumain de confession juive Radu MIHAILEANU, a présenté son nouveau film « La Source des femmes » au public du festival du film à Abu Dhabi. La presse arabe n’a pas tari d’éloges sur le réalisateur et, d’après les critiques, le public a adoré ce film.

Des journaux des Emirats Arabes Unis rapportent que pour son film « La Source des femmes », Radu MIHAILEANU s’est inspiré d’un événement inhabituel : « J’ai lu des articles dans Libération et Elle qui racontaient que des femmes dans un village turc qui devaient aller chercher l’eau au sommet d’une montagne avaient décidé de faire la grève de l’amour et disaient à leurs hommes Tant que vous n’irez pas chercher l’eau pour la rapporter au village, nous ne ferons plus l’amour. Cet événement a vraiment eu lieu en 2001, mais à part ça, l’ensemble du film est une fiction ».

Radu MIHAILEANU, un juif roumain célèbre pour son film « Le Concert » sur des musiciens russes venant jouer en France sous de faux prétextes, était tout d’abord réticent à l’idée de faire un film sur un sujet aussi sensible, celui de la situation des femmes dans la société musulmane. Préférant tout d’abord produire ce film, il a sollicité un couple de réalisateurs arabes, mais lorsque cela n’a pas marché, il s’est laissé convaincre par ses coproducteurs de réaliser ce film lui-même.

« Il fallait que je vive dans le monde arabe et que j’interview des femmes », raconte-t-il. « Je me suis donc installé dans un village de l’Atlas au Maroc. C’est là-bas que mon récit est né, mais il ne se déroule pas dans un pays en particulier ». Ce film s’inscrit dans la tradition des contes comme Les 1001 Nuits « où l’on ne sait pas où l’histoire se passe ». « J’ai également puisé mon histoire dans le chant et la danse, pratiques fortement ancrées dans les pays arabes », ajoute-t-il.

C’est avec brio que Radu MIHAILEANU a dirigé les actrices Hasfia HERZI, Hiam ABBAS qui incarne une vieille femme aigrie, mais aussi Leila BEKHTI dans la peau d’une jeune fille éduquée qui persuade les femmes de se révolter contre les hommes qui refusent de participer aux tâches ménagères.

Si l’eau est bien la métaphore de la source de la vie, le réalisateur reconnait qu’elle joue un autre rôle symbolique important : « L’eau est la source d’énergie qui sera malheureusement à l’origine des prochaines guerres, parce qu’un jour, l’eau viendra à manquer sur Terre et comptera bien plus que le pétrole », explique-t-il.

Radu MIHAILEANU a également imposé à ses coproducteurs que le film soit tourné en arabe : « Je ne voulais pas que ce film soit tourné dans la langue du colonisateur. Déjà que je viens d’un pays occidental et que je suis juif, je ne pouvais pas en plus raconter cette histoire dans une autre langue ». Le fait que le film d’un réalisateur juif sur une question sociale très sensible dans le monde musulman ait conquis les cœurs et les esprits des critiques et cinéphiles musulmans doit être considéré comme un véritable exploit. Dans tous les cas, « La Source des femmes » est un film audacieux.

Source projetaladin.org

Photo : Xavier Nataf pour Judaïciné