L’Afrique de Fatoumata Diawara

Publié le 09 novembre 2011 par Africahit

Voix langoureuse, sensuelle et de révolte, pour porter au-delà des frontières de l’Afrique un message fiévreux (contre l’excision ou l’abandon des enfants), l’urgence du retour à la sagesse, la solidarité avec ses sœurs maltraitées et leurs fils perdus.

Que chante-t-elle en bambara ? Sa solitude, après sa première dispute avec son bien-aimé qui avait tari la source de tendresse de ses mains sur ses cheveux, son cou, sa taille et rendu ses yeux sans regard. La supplication adressée aux mères démunies de ne plus donner leurs propres enfants à élever par d’autres. L’humiliation et la tristesse provoquées par les moqueries, le mal que peuvent faire des paroles blessantes.

Un appel à l’unité des femmes pour qu’elles demandent aux chefs d’État de ne plus se lancer dans des guerres qui tuent fils, frères, fiancés et maris. Son soutien et son admiration pour la chanteuse malienne Oumou Sangaré, que Fatoumata Diawara enveloppe de sa musique tel un châle posé sur des épaules.

VIBRANT PLAIDOYER POUR LA DIFFÉRENCE

Elle lance aussi un vibrant plaidoyer pour la différence « qui n’est pas une maladie »  ,  ou comment accepter un enfant qui n’est pas comme les autres sans penser qu’il est « possédé par les mauvais esprits » . DansAlama , elle fait entendre les accents autobiographiques d’une enfance qui« se confiait au feu, à l’eau, et au souffle du vent »,  ses seuls amis. Le drame et la malédiction des femmes, libres et fières, qui refusent les mariages forcés mais se choisissent des hommes incapables d’aimer.

Dans ses chansons, Fatoumata Diawara demande à ses sœurs africaines de ne jamais perdre confiance en elles, de ne pas se sous-estimer ni se laisser affaiblir. Elles sont la clé de voûte du groupe, de la société. Par elles, la généalogie et la transmission. Et malheur à celle qui rejette les leçons des générations qui la précèdent. À chacune de savoir reconnaître« l’âme que nous croisons chaque jour et qui nous guide ».  

Fatoumata Diawara entonne, en guise de final, un hymne déchirant à la dignité des clandestins, ces hommes de l’aventure , dignes héritiers des nomades, dont personne ne veut, morts en route, au bout de leur chemin de larmes. 

 Fatou , de Fatou Diawara. CD World Circuit. En concert au New Morning (Paris), le 29 novembre.

Jean-Claude Raspiengeas