Sugar Colt

Par Tepepa

Franco Giraldi
1966
Avec: Hunt Powers
Le titre est stupide, et la première image pitoyable. Une piteuse pancarte indiquant "Snake Valley" au milieu d'une vallée vue cinq cents fois, ça vous sort du film avant même d'y être entré. J'avais ce film en magasin depuis fort longtemps (merci au Chat au passage), mais je n'avais jamais réussi à dépasser le choc psychologique de cette branlante pancarte.
Armé d'une volonté de fer, j'ai passé la vague, bien m'en a pris. Passé le massacre des tuniques bleues presque aussi toc que la pancarte, un fabuleux thème à la trompette de Luis Bacalov se déploie. Et immédiatement ressurgit des entrailles de votre âme tout ce qui vous manque dans le western américain: une ambition dramatique démesurée, une marionetisation des actes et des destins, un sens de la vie forgé dans le sang, une universalité des archétypes humains loin des mythes et de la morale américaine.
Et bien sûr cette ironie toujours présente. Ici le ton louvoie entre comédie et drame sérieux, et cela fonctionne parfaitement. On retrouve avec bonheur un western "enquête", avec des populations qui n'osent pas parler et des hommes de main intimidants. L'originalité réside dans l'objet de l'enquête qui consiste ici à rechercher des soldats disparus mystérieusement. Le héros se fait passer pour un docteur, une "petite gens" sans prétention qui peuple le petit monde du western. L'humour naît des réactions du docteur face aux vexations (une marrante baston type pugilat), du décalage entre sa dégaine et ce dont on le devine capable. Le drame prend de l'ampleur à chaque développement de l'enquête. Pas de message, pas de sous-texte, pas de discours sur l'humain. Une intrigue, des bastons, des morts et une belle musique. La mayonnaise prend.

Pour moi, Hunt Powers n'était qu'un légume de plus à la Robert Woods, perdu à jamais dans les délires de Demofilo Fidani. Surprise, Hunt Powers est ici un excellent acteur. Sorte de dandy séducteur, il se déguise et dégage une très bonne expressivité. Le regard provocateur, le sourire perpétuellement ironique, il est un des atouts indéniables de ce bon petit spagh bien réussi. A ne pas rater évidemment, le festival habituel de tronches du genre (dont le fleuriste du Retour de Ringo), et les idées loufoques habituelles de ce genre de production. Ici, Hunt Powers commence en tant qu'instructeur dans une école de tir pour dames. Et bien sûr, même si Franco Giraldi n'est pas franchement le plus baroque des réalisateurs italiens, ne pas manquer le final, bien excessif dans la mise en scène de la mise à mort du chef des méchants.