Trente-trois textes savoureux, qui auraient tout aussi bien pu servir de sketches à un artiste de la scène cultivant l’humour grinçant, paranoïaque, l’ironie douce-amère, le tout traité au second degré. Ce n’est probablement pas un hasard si François Rollin a accepté de préfacer ce livre.
L’argument en est simple, si simple et si évident qu’il nous échappe, comme La Lettre volée d’Edgar Poe (et je ne serais pas étonné que Topor ait apprécié cet écrivain féroce, tant il entretenait avec son œuvre une belle communauté d’esprit) : nous ne nous méfions jamais assez de notre environnement quotidien.
Et s’il n’y avait que les vaches noires ! Mais d’autres êtres ou objets malfaisants nous guettent à notre insu : les freins qui lâchent, les escaliers (bien plus angoissants que les ascenseurs), le facteur et son courrier du matin, la table (aux attaques toujours perfides), les passants sur le boulevard, le répondeur téléphonique, les toilettes publiques (toujours occupées lorsqu’on a besoin de s’y rendre), Mickey Mouse, etc. Tout concourt, non sans perfidie, à nous pourrir la vie. C’est très inquiétant et, décrit par un Topor au meilleur de son talent, hilarant. De plus, ce qui ne gâte rien, bien au contraire, tout cela est servi comme un petit chef d’œuvre de belle littérature.
Illustration : Roland Topor, L'Escalier, lithographie, 1976.