"Representative Brody" (Homeland - 1.10)

Publié le 07 décembre 2011 par Shoone

Homeland: 1.10 Representative Brody



Souvent, dans les thrillers, le manque de relief des personnages et leur soumission totale à l'intrigue sont des caractéristiques qui me dérangent particulièrement. Dans Homeland, je n'ai pas ce problème. Il y a toujours un vrai équilibre entre l'histoire et le développement des personnages, aucun ne prenant le dessus sur l'autre. Pendant que l'intrigue progresse, la série prend donc aussi dans cet épisode soin de s'attarder sur les vies privées de Carrie et Saul. Ce dernier est celui qui reste le plus en retrait mais, si je m'en plaignais la semaine dernière, c'est après réflexion un bonne façon d'aborder son chagrin. Sa femme partie, son existence devient vide, entièrement dévouée au travail pour combler le manque. Au fond il n'y a rien donc à raconter mais la série le fait terriblement bien, retranscrivant toute la mélancolie du personnage. Carrie pour sa part bénéficie d'une plus grande attention avec le retour sur le tapis de sa relation complexe avec Brody. Ainsi, quand celui-ci l'appelle pour fixer une rencontre, c'est à un rendez-vous galant que la jeune femme s'attend. A nouveau, on a alors la confirmation d'une réelle attirance pour le soldat. Forcément, Carrie finit déçue mais n'en laisse rien paraître en public et si elle l'exprime, ce n'est qu'une fois seule, ce qui retranscrit bien toute sa maîtrise d'elle-même. Toutefois, quand finalement, elle tombe le masque, c'est à un vrai effondrement qu'on assiste mais rendu toujours très naturel grâce à l'incroyable Claire Danes. Tout le côté extrême du personnage est là bien traduit et ne peut qu'émouvoir. Non, Carrie ne fait pas les choses à moitié, mais cela vaut aussi pour sa vie sentimentale et lorsqu'elle se jette à corps perdu dans une idylle imaginaire, le retour à la réalité ne s'en trouve logiquement que plus brutal.

Carrie est donc un personnage d'une obstination rare et l'évolution des investigations sur Tom Walker, bien plus efficaces cette fois, se charge également de le montrer. Ainsi, lorsque l'interrogatoire d'un diplomate saoudien suspect ne mène à rien, loin de se démotiver, Carrie n'hésite pas une seconde à se montrer plus agressive, proférant des menaces loin d'être orthodoxes sur sa famille. Le fait que le diplomate finisse par y céder, mais aussi le personnage en tant que tel, dans son attachement à l'occident, sont sinon intéressants dans la mesure où ils permettent une nouvelle nuance de la représentation de la guerre contre le terrorisme. Tous les alliés islamistes ne sont pas tous des fanatiques absolus dépourvus de tout sentiment. C'est bien plus complexe que cela et on le montre bien.

Pour en revenir à Carrie, là où sa nature extrême impressionne le plus, c'est définitivement lors de la fameuse attaque à la bombe. Alors même que la jeune femme sent que l'utilisation du diplomate comme apât va se retourner contre la CIA, c'est elle la première à se précipiter pour limiter les dégâts. La scène en elle-même est tout à fait maîtrisée, créant une vraie attente angoissante en délayant l'arrivée de Walker puis suggérant peu à peu une mascarade. La confusion de Carrie renforce de plus le sentiment d'attente et de trouble qui font du coup toute la force de surprise de l'explosion. Celle-ci matérialise par ailleurs enfin clairement la menace terroriste qui se fait donc plus concrète pour la fin de saison. Elle sert aussi à bien mettre en évidence l'existence d'une taupe au sein de la CIA et devrait pousser l'enquête à se concentrer là-dessus désormais.

Brody se fait quant à lui assez discret, occupé à préparer son entrée en politique. Et hormis la scène de rencontre avec le vice-président, tout bonnement ridicule, ça se suit toujours très bien. J'ai toutefois pensé être frustré par le léger freinage de l'intrigue par l'opposition de Jessica au projet mais j'ai finalement adhéré à l'idée. Elle est l'occasion pour la jeune femme de marquer quelques points en se montrant lucide sur la situation. Mais mieux encore, elle donne à nouveau à la liaison avec Mike un intérêt puisque Brody en joue pour convaincre sa femme. La stratégie est d'ailleurs un admirable moyen d'exploiter à nouveau l'ambiguïté du soldat. Est-il vraiment compréhensif de la situation ou en tire-t-il simplement profit? C'est toute la question.


En conclusion, sans histoires, il n'y a pas de divertissement mais sans personnages, il n'y a pas de série. Homeland l'a bien compris et s'attache donc à les chouchouter justement. En résulte une intrigue d'autant plus consistante et crédible qui n'utilise pas les personnages comme des pions sans vie et nous pousse réellement à nous soucier d'eux, à espérer pour eux et surtout à nous intéresser à eux. On n'oublie cependant pas non plus d'ajouter une bonne dose de rebondissements et de mystères pour un cocktail final largement captivant.