Les sabres, des objets mythiques. Au XIVème siècle avec le développement du combat à pied le sabre remplace l'arc, utilisation à deux mains pour gagner en précision, une lame longue (katana) et une lame courte de 30 à 60 cm utilisable d'une seule main faisaient partie de la panoplie. La forme des sabres était codifiée et indiquait le statut social, seuls les samouraïs de haut rang avaient le droit de porter les sabres longs, seule l'aristocratie le port des deux. Le forgeron Masamune a laissé une trace dans l'histoire, la légende raconte que lorsque les Portugais abordèrent l'île en 1543 une de ses lames damassée trancha le fût d'un de leur canon. Trancher l'acier sans casser porte un nom en japonais : kotô. Un sabre de qualité devait être suffisamment résistant pour passer au travers de sept corps empilés les uns sur les autres.
Le procédé de fabrication est complexe. Les Japonais ne disposant pas de minerai vu la nature volcanique de leur île, utilisaient du sable ferrugineux. Mais il en fallait d'énormes quantités (la fonte d'un bloc d'acier nécessite de verser près de 8 tonnes de ce sable dans un four et 13 tonnes de charbon de bois, l'opération prend 3 journées entières). Puis deux semaines de martelage (pour répartir de manière homogène le carbone), d'étirage et de repliages (plusieurs milliers de couches) avant de tremper la lame dans l'eau froide pour la durcir. Ensuite le polissage d'un artisan spécialisé avec des pierres de grains décroissants (d'abord des granits, puis des grès et enfin des calcaires), qui prenait une dizaine de journées. En dernier lieu pour révéler le tranchant une pierre très fine le long du fil. Un sabre devait être à ce point tranchant que, placé dans le courant d'un ruisseau, il coupe en deux un nénuphar qui lui passe dessus. Les artisans réputés ne réalisaient guère qu'une dizaine de lames par an. Le sabre va vite devenir le plus fameux produit d'exportation du Japon. En 1543 les arquebuses portugaises sont recopiés en 10 exemplaires puis fabriqués en série par des forgerons de lames reconvertis, elles équiperont très rapidement les fantassins (ashigaru) munis jusqu'à présent d'arcs et de lances. En 1575 on en recense 10.000 dans une bataille, puis dix fois plus en 1615 pour le siège du château d'Osaka par Tokugawa Iyeasu (en comparaison en Europe l'armée espagnole, la plus puissante, n'alignait guère que 30.000 hommes et quelques milliers d'arquebuses). Les arquebuses disparaîtront une fois le pays pacifié par les Tokugawa, mais pas les sabres. Ceux-ci continuent à se perfectionner malgré leur inemploi. Une âme leur est même concédée lors d'une cérémonie shinto.