Mauvaise utilisation des FEP (Fonds Européens pour la Pêche) destinés à éliminer la surpêche

Publié le 02 janvier 2012 par Sequovia

4.3 milliards d’euros qui devaient promouvoir la pêche durable ont contribué à la surpêche, selon un communiqué du WWF. Le 12 décembre 2011 à Bruxelles, la Cour des comptes européenne a publié un rapport démontrant l’échec coûteux du Fonds européen pour la Pêche de 2007 à 2013 visant initialement à l’élimination de la surpêche en Europe.

  • Audit de la Cour des comptes européenne

Ce rapport est le résultat d’un audit réalisé par la Cour des comptes européenne sur la Commission européenne et sept Etats membres (Danemark, Espagne, France, Italie, Pologne, Portugal, Royaume- Uni) sélectionnés en fonction de la taille de leur flotte et des ressources disponibles pour adapter cette dernière dans le cadre du FEP.

La Cour des comptes européenne montre que les 4.3 milliards d’euro du Fonds Européen pour la Pêche (FEP) destinés à rétablir les activités de pêche à des niveaux durables ont au contraire contribué à l’augmentation de la capacité de pêche. Les armateurs ont trouvé des moyens détournés pour recevoir des subventions et augmenter la  capacité de capture de leurs navires,  augmentant ainsi la capacité de pêche de la flotte européenne. La faible part de l’argent effectivement utilisée pour les plans de sortie de flotte a surtout servi à financer la sortie de très vieux navires ou de navires n’étant déjà plus en activité.

La France ne fait pas exception. En 2008 un navire français s’est vu attribuer une subvention de plus d’un million d’euros (dont la moitié provenait du FEP) pour être déclassé et sortir d’activité, alors que son permis de navigation avait expiré en juillet 2006 et qu’il était resté inactif durant toute l’année 2007.

  • Défauts de fonctionnement du FEP

La Cour ne s’est pas arrêtée à la simple critique du gaspillage de l’argent public, mais elle alerte également sur les défauts de fonctionnement qui existent au niveau de l’attribution des subventions du FEP. La France fait partie des pays à qui profitent ces zones d’ombres législatives. Par exemple, la possession d’une licence de pêche d’une espèce suffit pour obtenir des subventions à la sortie de flotte. Certains navires français ont ainsi pu faire partie des plans de sortie de flotte « Cabillaud » alors que cette espèce ne représentait même pas 1% du total de leurs captures.

Toujours selon ce rapport, la surcapacité de la flotte est la première cause d’épuisement des stocks de poissons — trois stocks de poissons européens sur quatre sont surexploités — mais elle menace également la vie marine, ainsi que la viabilité du secteur de la pêche et des communautés littorales.

  • Recommandations de la Cour des comptes

Dans ses conclusions, la  Cour des comptes européenne dresse un bilan assez négatif de la Politique Commune de la Pêche (PCP) et fournit une liste de recommandations très précises qui devrait inspirer la réforme en cours. Elle souligne le fait que la réforme de la PCP n’a aucun sens si les mesures ne sont pas fondées sur une évaluation complète de la capacité de pêche couplée à des échéances claires de réduction de la flotte. Or la proposition de réforme de la PCP par la Commission européenne est encore loin du compte : – A moins de mettre en place des garde-fous, il est très peu probable que les subventions cessent d’alimenter la surcapacité, et encore moins qu’elles arrivent à l’éradiquer. Par exemple, la récente proposition de la Commission n’oblige même pas les Etats membres à établir un bilan entre la capacité de leur flotte et la capacité de production des stocks avant de recevoir de subventions pour la modernisation des navires. –

La proposition de réforme manque clairement d’objectifs et d’échéances concernant la réduction de la flotte. Il est également nécessaire de proposer un amendement au texte afin d’avoir un panel d’options plus large concernant l’attribution des droits de pêche, avec par exemple une attribution privilégiée des droits de pêche aux pratiques les plus durables et responsables. Les ministres des pêches devaient se réunir le 16 Décembre dernier afin d’établir les quotas pour 2012. Ce sera un premier signal, fort et révélateur, de la volonté des gouvernements à donner ou non un avenir à la pêche en faisant de cette réforme un échec de plus ou une véritable plate‐forme pour une pêche durable.

  • Avis Sequovia

La notion de pêche responsable inclue des critères environnementaux, sociaux et sociétaux. En effet, elle consiste à puiser sans épuiser dans un esprit de préservation de la biodiversité. La surpêche a donc un impact sur les écosystèmes notamment à cause des pollutions associées (dues à la transformation du poisson, la fabrication et l’entretien des bateaux etc…) mais aussi en menaçant la biodiversité aquatique.

Les subventions attribuées par le FEP avaient à l’origine vocation à lutter contre la surpêche en Europe, mais des failles dans le fonctionnement d’attribution de ces subventions  ont eu l’effet contraire. Il est donc nécessaire aujourd’hui de réformer ces textes de façon plus poussée pour réguler les activités de pêche.