Comédie… jouissive

Par Borokoff

A propos de Turn me on de Jannicke Systad Jacobsen 3.5 out of 5 stars

A bientôt 16 ans, Alma vit seule avec sa mère dans un bled perdu entre des fjords en Norvège. En pleine crise d’adolescence, elle est sujette à des fantasmes et des désirs sexuels incontrôlables qui virent aux hallucinations. Un jour, elle raconte qu’Artur a sorti effrontément son sexe devant elle lors d’une soirée. Personne ne la croit bien entendu et Alma devient la risée du village en même temps qu’une « pestiférée ». Mais a-t-elle tant que cela menti ?…

Adapté d’un roman culte en Norvège, sorti (mais pas en France) en 2005 et intitulé Få meg på, for faen (littéralement « Donne moi la baise ») d’Olaug Nilssen, Turn me on décrit les tourments et les émois d’une belle adolescente blonde en manque d’amour… et surtout de sexe.

Mais le désir d’Alma butte soit sur la lourdeur et la bêtise des garçons de son âge, soit sur son incapacité à distinguer ses fantasmes de la réalité. Dans le deux cas inassouvi, son désir tourne à la frustration, et Alma se retrouve rapidement isolée…  Seule Sara, une de ses copines qui rêve de partir au Texas pour y abolir la peine de mort, a des doutes sur la folie supposée d’Alma et ne l’abandonne pas.

Outre qu’il est interprété par des actrices issues du cru non professionnelles et remarquables (Helene Bergsholm en tête, alias Alma), la grande force de Turn me on tient dans la capacité de son scénario et de sa mise en scène enlevée à créer des décalages burlesques entre la réalité et l’imaginaire d’Alma. Situations cocasses auxquelles les compositions de Ginge Anik ne sont pas étrangères.

Sur un mode souvent ironique, Jannicke Systad Jacobsen dépeint avec subtilité la cruauté du monde qui entoure Alma (comment ses camarades la conspuent et la rejettent), la maladresse parfois touchante de ses relations avec Artur tout en parvenant à dédramatiser (sans le minimiser) le conflit intérieur qui mine la jeune fille et qu’elle n’arrive pas  résoudre.

Avec sensibilité et humour, la réalisatrice décrit bien les malheurs de cette adolescente conspuée et le malaise grandissant qui est le sien. Adepte du « téléphone rose », sujette en plein travail à des fantasmes avec un patron de supermarché, Alma peut de moins en moins contrôler ses pulsions. Sa mère ne comprend pas non plus ce qui arrive à sa fille, et son impuissance à l’aider culmine dans les sanctions dérisoires et désespérées (et donc comiques) qu’elle prend à son encontre. La sous-exposition dans la quelle baigne Turn me on lui donne un charme un brin rétro voire désuet que renforcent ses musiques « pop » et les vêtements « vintage » (années 1970) de certains de ses personnages (notamment la sœur de Sara qui roule dans une voiture de la même époque).

Grâce au ton sur lequel est traité le sujet du film, la crise d’adolescence, Turn me on est une comédie au final assez jouissive et qui rappelle parfois dans son traitement cinématographique, sa manière très imagée voire baroque d’exprimer les sentiments d’Alma (utilisation du ralenti notamment) le romantisme des films du Canadien Xavier Dolan. Lors des scènes en forêt par exemple.

www.youtube.com/watch?v=RhIiPdKBz0I

Film norvégien de Jannicke Systad Jacobsen avec Hélène Bergsholm, Malin Bjoerhovde, Matias Myren (01 h 16).

Scénario : 3.5 out of 5 stars

Mise en scène : 3 out of 5 stars

Acteurs : 3.5 out of 5 stars

Dialogues : 3 out of 5 stars

Compositions : 3.5 out of 5 stars