La Russie va-t-elle disparaître ?

Par Jazzthierry

Lorsqu’on écoute attentivement cette petite conférence de Nicolas Tenzer qui après avoir parcouru le monde, rencontré comme dit-il, les “élites économique, politique et les simples gens“, nous livre son diagnostic et surtout ses prédictons pour 2030, on est un peu surpris par son discours. De quoi s’agit-il ? Il confesse dans son introduction qu’en amont de cette enquête, il pensait naïvement que la situation mondiale était pour le moins catastrophique (terrorisme, guerre civile en Afrique, etc.) mais qu’au gré de ses voyages et de ses contacts il a véritablement revu son jugement. C’est pourtant le même homme qui annonce quelques minutes après, la destruction de la Russie … Mais qu’on se rassure: le vide laissé par cette disparition serait immédiatement occupé par ses voisins immédiats et probablement la Chine. Quel optimisme !

 

En outre, Nicolas Tenzer déclare avec le même sang froid, ne pas croire à l’existence de pôles structurant l’économie mondiale. Pourquoi pas ? C’est un point de vue orginial ! Le problème c’est que dans le même cycle de conférences, un autre expert de renom, Thierry de Montbrial, explique exactement l’inverse… Le monde serait multipolaire, hétégrogène et global. Je précise que la mission du Groupe Xerfi qui organise ces rencontres, est en principe d’éclairer le citoyen... On lit en effet sur leur site: “Le Groupe Xerfi entend participer activement à la réflexion sur les grands en jeux (sic) économiques. Il mobilise à cette fin sa connaissance approfondie de l’économie mondiale et de tous les secteurs économiques, son expertise, sa liberté d’analyse et de diagnostic conférée par son indépendance statutaire et financière.”

Evolution de la population en Russie (1897-2030)

En réalité, je crois que notre expert se trompe, et pour le montrer, je voudrais revenir sur la question du déclin ou de la déliquescence de la Russie. Thierry de Montbrial explique judicieusement que de façon générale, le déclin est réversible contrairement au second terme; on en déduit donc que Nicolas Tenzer croit davantagne à la déliquescence de la Russie. Il se fonde sur certaines observations pour étayer sa pensée comme le déclin démographique, la fuite des élites, etc. Du reste, quand on jette un coup d’oeil sur la courbe démographique que j’ai réalisée à partir de statistiques officielles, on souscrit dans un premier temps à cette analyse d’une chute brutale durant la saignée de la Seconde guerre mondiale, puis ensuite d’une baisse plus régulière et plus lente depuis 1992, autrement dit la fin de l’empire soviétique.

Mais il suffit d’étudier le bilan naturel de la Russie (natalité-mortalité), visible sur le second graphique que je publie, pour constater un certain redressement: la courbe de la croissance naturelle remonte progressivement depuis 2002, grâce à la stagnation relative de la mortalité et la remontée de la natalité. Au surplus, l’espérance de vie, hommes et femmes confondus, est passée de 65,3 ans en 2005 à 68,7 ans en 2009. Comment peut-on dire au mépris des données statistiques et sans sourciller, que le pays bien vivant qui actuellement se révolte contre le système Poutine, le pays de Dostoïevski, Prokofiev, Chostakovitch, et de tant d’autres, va tout simplement disparaître ? C'est encore pour moi un mystère...

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SOURCES: j'ai publié cet article une première fois sur le site GEOVIV. On peut s'y référer également pour obtenir ma petite bibliographie... Je précise également que sur Equinox, je l'ai modifié quelque peu.