Ciné Mix [Février 2oo8]

Publié le 07 mars 2008 par Lulla

07 mars 2008

Ciné Mix [Février 2oo8]

Coup de Coeur


NO COUNTRY FOR OLD MEN

Attention, chef d'oeuvre ! Décidément, en ce début d'année, le cinéma américain nous réserve de bien belles surprises. Into the Wild le mois dernier (qui a dépassé le millions d'entrées !! Yes !), No Country ce mois-ci (dont les chiffres sont décevants malgré son Oscar du meilleur film). Je ne suis pas expert des frères Coen, à vrai dire c'est le premier film qu'ils ont réalisé que je vois (je sais, je devrais avoir honte de n'avoir pas vu Fargo) No Country est un film terriblement puissant. La puissance de la réalisation d'abord. Pas de grands effets de style, pas d'effets spéciaux ou de cascades en chaîne. Tout est dans la sobriété. Le silence est d'or. C'est une feinte pour mieux nous suprendre quand le bruit de la bouteille d'air comprimé que le serial killer du film utilise pour tuer encore et encore, résonne dans la salle et fait sursauter le plus vaillant des spectateurs. La puissance de l'interprétation ensuite. Josh Brolin, en cowboy des temps modernes, est excellent. Tommy Lee Jones, en vieux shérif désabusé, est amusant. Javier Bardem, en serial killer au sang chaud et à l'humour à froid est impressionnant. C'est son personnage qui apporte le petit plus du film qui en fait un must. Chacune de ses répliques vous glace le sang tout en vous faisant rire jaune avec culpabilité. Il joue avec la mort comme on se laisse guider par le hasard. Il frôle parfois l'absurde. Il n'a pas de limites. L'incarnation même de la puissance de la violence, l'allégorie de ce mal qui ronge l'Amérique depuis des décennies. La contemplation de la désolation devient alors fascinante. L'horreur fait place au désenchantement. Les paysages calcinés deviennent beaux et mélancoliques. Il n'y a plus d'espoir.

C'est tout ça que raconte le film et plus encore. Il est d'une richesse incroyable. Si la fin a tendance à légérement se traîner, c'est bien la seule miniscule fausse note que l'on peut relever. Tout le reste est passionnant. La puissance de la réalisation. La puissance de l'interprétation. La puissance de la violence. La puissance du sens. Le suspense est au rendez-vous, lui aussi. L'humour permet d'apporter au film un certain recul et allége le propos. Je terminerais par l'argument du film, parce que j'avais envie de faire les choses à l'envers pour une fois. Alors qu'il chasse dans les vallées texannes, proches de la frontière mexicaine, Moss tombe sur un spectable des plus macabres: une huitaine de corps ensenglantés et une camionette qui renferme en son coffre une malette remplie de millions de dollars. Moss s'en empare et c'est là que son calvaire va commencer. Poursuivi par un serial killer prêt à tout, il va tenter de sauver sa peau. Le pitch est assez simple, voire pas original, et pourtant il amène un des meilleurs films de ces dernières années. Ce serait insulter le cinéma que de ne pas aller le voir.

Les Autres Films


JUNO

Juno a 16 ans et un jour d'ennui, elle couche avec Bleeker, son meilleur ami. Et elle tombe enceinte. (Pourquoi dit-on "tomber" enceinte d'ailleurs ?) Sa vie va en être bouleversée. Elle va devoir annoncer la nouvelle à Bleeker, à sa meilleure amie et bien sûr ses parents. Elle va décider en accord avec elle-même de mener sa grossesse à terme puis confier le bébé à des parents adoptifs. Elle va alors se mettre en quête du couple parfait. Et elle va le trouver, en apparence du moins. Juno fait parti de ces films qui vous émerveille par sa simplicité et son réalisme romancé (c'est un concept que j'ai inventé). C'est d'abord un film qui vous fait rire. Beaucoup ! La scène chez le gynéco est un moment d'anthologie par exemple. Mais le principal réside dans l'humour caustique mais redoutable de Juno. Ellen Page balance ses lignes de dialogue avec une facilité étonnante mais pas déconcertante. Il suffit de quelques secondes pour être séduit par le personnage. Certains lui reprocheront de ne pas être réaliste du tout. Qu'aucune fille de 16 ans ne peut faire preuve d'autant de maturité et de culture. Juno connaît tout de la musique rock des années 70 à nos jours par exemple (du coup on a droit à une bande-son excellente) Oui et alors ? Quand bien même il n'existerait pas de vraie Juno dans la vie, pourquoi bouder son plaisir ? Elle est excellente et c'est tout ce qui compte. On est dans une fiction après tout. Bref, le rire est omniprésent et pourtant, la tendresse n'est pas mise de coté. Elle est également présente par petites touches subtiles et atteint à un certain moment son paroxysme. Juno et Bleeker sont sur le lit d'hopital, après l'accouchement, et elle craque, à bout de forces. C'est le moment du film qui m'a beaucoup ému. Les apparitions de Bleeker sont aussi souvent touchantes. Michael Cera a quelque chose dans le regard qui l'entraîne bien plus loin que dans le rôle du simple benêt que l'on voudrait lui donner à la base. Et puis Jennifer Garner prouve une fois de plus qu'elle n'est pas que Sidney Bristow. Elle est attendrissante et irritante à la fois. Une jolie performance. Au final, ce petit film a tout d'un grand. On pense imanquablement à Little Miss Sunshine, qui avait créé la surprise il y a deux ans dans des conditions similaires. Le cinéma indépendant dans ce qu'il fait de mieux. Et on gardera un oeil sur Diablo Cody (quel nom !!), la scénariste du film. Parmi ses projets, une série pour Showtime, The United States of Tara, avec l'excellentissime Toni Collette. Si elle est aussi bien écrite que Juno, ça promet ! Ah au fait, il n'y a qu'à moi que Juno fait penser à Daria¨, l'héroïne culte de la série animée de MTV ?

PARIS

Inconditionnel de Klapisch (je ne me suis toujours pas remis des Poupées Russes), j'attendais ce film avec beaucoup d'impatience. Dire que j'ai été déçu serait un peu fort. Disons que je m'attendais à un peu mieux. Notamment sur les vues de Paris. Même si elles sont belles, elles ne sont pas non plus à ce point transcendantes. Peut-être est-ce le juste reflet de la ville après tout ? Le pari était risqué: faire un film choral qui va jusqu'au bout du bout du concept en faisant cohabiter une douzaine, si ce n'est plus, de personnages. Le pari est réussi pour moi. On regrette évidemment de ne pas en voir plus de la vie de certains d'entre eux. Je pense à Karin Viard. Elle est plus que jamais désopilante dans son rôle de boulangère raciste mal embouchée. Ses "En vous remerciant" sont irresistibles et nous rappelle Agathe, l'esthéticienne dans Tatie Danielle. Fabrice Luchini fait du Luchini face à une Mélanie Laurent qui rayonne. Ses textos d'amoureux transit sont désopilants. Le duo autour duquel le film se construit est constitué de Romain Duris, alias Pierre, gravement malade, qui risque de mourir, et Juliette Binoche, alias Elise, sa soeur, qui tente de l'aider du mieux qu'elle peut tout en gérant ses enfants qu'elle élève seul et son boulot dans le social. Cette histoire est très touchante et apporte au film la profondeur qui aurait pû lui manquer. Du haut de son balcon, Pierre suit la vie des habitants de son quartier. C'est ce qui le distrait et qui l'aide à garder l'espoir. Malheureusement, certains personnages n'ont aucun lien avec lui, vraiment aucun, et ça gâche un peu l'effet d'ensemble. Je pense aux mannequins qui vont draguer les pauvres bonhommes du marché. Plus que dispensable. Je pense aussi au personnage de François Cluzet, pas très réussi. Il y a une scène qui m'a marqué par son atrocité: Gilles Lelouche qui force cette pauvre Julie Ferrier à faire la brouette. Dis comme ça, ça paraît totalement ridicule mais je vous jure que c'est troublant. Ce qui se passe ensuite aussi d'ailleurs. C'est surprenant. Au final, Paris est loin d'être un mauvais film. Il est juste un peu bancal sur certains aspects, ce qui n'empêche pas de passer un bon moment.

CLOVERFIELD

J.J Abrams a encore frappé ! Je vais passer sur tout ce qui concerne l'opération marketing magistralement orchestrée depuis plus d'un an autour du mystère du film. C'est typiquement du J.J, c'est très habile et c'est ce qui a probablement permis au film de s'en sortir honorablement au box-office. Autrement, il serait passé un peu inaperçu. New York, une fête d'étudiants friqués bat son plein quant tout à coup, la ville est frappée par une étrange menace, d'abord matérialisée par une énorme secousse. La statue de la liberté s'effondre et se retrouve au beau milieu de Manhattan. Que se passe-t-il vraiment ? Un des étudiants va nous en donner les principales réponses en filmant de A à Z la catastrophe. Eludons tout de suite le problème, qui pour moi n'en est pas vraiment un: oui, ça n'est absolument pas crédible et pas plausible que le mec puisse filmer des heures et des heures ce qui se passe. Une fois que l'on a réussi à dépasser cela, on peut profiter du film en toute quiétude, ou presque. Le fait de filmer tout à la caméra à l'épaule est ce qui différencie Cloverfield de ce qui a déjà été -plus ou moins bien- fait: Godzilla & co. Et c'est mille fois plus efficace que les multi-caméras !! Là, on se sent vraiment concerné par ce qui se passe, on est dans le feu de l'action, impossible d'avoir un quelquonque recul ou une vue d'ensemble. C'est là que réside la principale réussite du film. Le reste est plus classique: une bande de jeunes adultes peu farouches et très courageux, qui vont, au péril de leur vie, tout faire pour sauver la copine du héros, coincée à l'autre bout de la ville. On voit peu le monstre, puisqu'il s'agit du monstre et là aussi, le procédé est très efficace ! Cela rajoute au mystère et à la peur. Cloverfield est donc un film de monstre classique dans le fond mais original dans la forme, qui tente vaguement d'exorciser les démons du 11 Septembre 2oo1, encore très présents dans la mémoire collective mondiale. Les acteurs ne sont pas vraiment bons, ils sont juste beaux à voir. Les décors et les effets spéciaux rattrappent largement les faiblesses du scénario. Ce film est déjà culte, à tort ou à raison.

LA FAMILLE SAVAGE

Wendy et Jon n'ont pas vu leur vieux père depuis bien longtemps. Mais lorsqu'il perd son épouse, sa santé déclinante les oblige à le revoir et à s'occuper de lui en mettant de coté leurs rancoeurs familiales toujours vives. Wendy n'arrive pas à percer dans le théâtre tandis que les écrits de Jon, professeur d'université, semblent n'intéresser que lui. Le pitch est relativement déprimant, le film aussi. Mais dans le bon sens ! L'entrée en matière très scatologique donne le ton ! Ce film ne sera pas comme les autres. Il traitera de sujets graves: la vieillesse, la mort, la crise de la quarantaine, la dépression, avec une sorte de lègère profondeur, ou de profonde légéreté, c'est selon. Le film n'émeut jamais aux larmes mais fait réfléchir. Que faire de ses parents qaund ils deviennent trop vieux pour se gérer seuls ? Que faire de sa vie quand elle ne ressemble en rien aux plans que l'on s'était fait ? Ces questions sont traitées avec authenticité et intelligence. Malheureusement le film est un peu long (1h55), on décroche parfois. On ne ressort pas du film dans une joie ennivrante, vous êtes prévenus ! Mais on apprécie les prestations des deux acteurs principaux: Laura Linney et Philip Seymour Hoffman. Aussi bons dans la comédie que dans le drame. Tiens d'ailleurs, on regrettera que le film ne lorgne pas un peu plus du coté de la comédie quand même, tout compte fait. Ce n'est pas un bijou indie mais c'est plutôt honnête. Et ce serait sympa que les producteurs pensent plus souvent à Laura Linney, excellente mais trop discréte !

L'ORPHELINAT

"Le plus grand succès espagnol de tous les temps !" C'est pas moi qui le dit, c'est l'affiche du film ! Un thriller ibérique qui dépasse nos frontières, voilà qui n'est pas si fréquent. Pour ça, on peut déjà dire bravo. Après, peut-on dire que la promesse du film est respectée ? Pas complêtement ! Laura a vécu dans un orphelinat dans son enfance. Devenue adulte, mariée, avec un enfant, elle décide de restaurer la vieille maison et d'y accueillir des enfants handicapés. C'est alors que des phénomènes étranges vont se produire au sein de la batîsse. Son fils, Simon, ne va pas tarder à disparaître dans des circonstances mystérieuses. Malgré les nombreuses qualités du film, je me suis un peu ennuyé. Disons qu'il y a régulièrement des scènes fortes qui relancent notre intérêt mais entre temps, c'est un peu trop calme. On aimerait que les événements s'enchaînent plus rapidement. Et puis le film met du temps à se mettre en place, une bonne demie-heure. Reste alors 1h15 plus ou moins efficace, selon les moments. L'Ingrid Chauvin espagnole (c'est moi qui la surnomme comme ça parce qu'elles se ressemblent un peu, même dans le jeu, si on peut appeler cela un jeu, mais leurs deux carrières sont assez différentes), Belen Rueda, offre une prestation honnête mais sans plus. Son rôle de mére courage est un peu agacant sur les bords. Ce qui m'a le plus plu dans le film, c'est la fin. Je n'en révélerais pas ici le contenu mais elle a un aspect très onirique qui ma séduit. On ne nous donne pas de réponse précise, c'est à chacun d'y voir ce qu'il a envie d'y voir, selon ses croyances et sa sensibilité. L'orphelinat est un thriller qui se tient mais qui aurait peut-être mérité une réalisation un peu plus énergique. Considération purement esthétique: l'affiche est très réussie !

A ne pas oublier


THE DEAD GIRL Lisez la critique postée le 3 Février 2oo8 en cliquant sur les étoiles.

Posté par LullabyBoy à 01:06 - Ciné Box - Commentaires [0] - Rétroliens [0] - Permalien [#]