Dieudonné survivra !

Publié le 05 février 2008 par Elronchon

Il est toujours intéressant d'essayer de se débarasser de ses a priori. C'est une lutte intérieure qui se joue. Il n'est pas anodin de douter de sa propre capacité à démêler le vrai du faux, séparer le bon grain de l'ivraie.

J'ai, dans mes archives, un bon gros dossier de presse sur Dieudonné. L'acharnement des médias sur ce cas d'école m'a terriblement intéressé. Pourquoi, alors que les Français avait choisi Jean-Marie Le Pen pour le deuxième tour à l'élection présidentielle de 2002, un sketch de Dieudonné moquant la politique israélienne, en 2003, a-t-il suscité un tel tollé ? J'avoue que je n'ai pas la réponse. Ou, si je pense l'avoir, ne pensez pas que je vais vous la livrer telle quelle. Je ne voudrais pas être référencé parmi les sites anti-sionistes.

Je suis attaché à la personnalité de Dieudonné à double titre. Tout d'abord parce que je pense qu'il est un très grand humoriste. Bien au-dessus des bourgeois du rire qu'il fustige dans l'interview qui suit. Ensuite, parce que c'est dans son théâtre que j'ai pu débuté. Et croyez-moi, à Paris, il n'est pas facile de trouver un beau lieu comme le théâtre de la Main d'Or pour commencer.

En décembre 2003, lors du sketch de Dieudonné chez Fogiel, je jouais justement au Théâtre de la Main d'Or. Je ne jouais pas ce fameux soir, j'étais devant ma télé à regarder Dieudo invité par Jamel chez Fogiel. Mon metteur-en-scène de l'époque, Sainte Nicole, n'a pas arrêté pendant toute la soirée d'envoyer des sms pour faire notre promo en bas de l'écran d'On ne peut pas plaire à tout le monde. Aucun des sms n'a été projeté, et pourtant le portable de mon pote a bel et bien été débité de la coquette somme correspondante. Mais là n'est pas le sujet du débat. Quoique... Nous sommes bien dans un cas de "Deux poids, deux mesures". J'ai senti ce soir-là que le sketch pouvait heurter la sensibilité des téléspectateurs les plus pointilleux. Mais je me croyais encore en France-la-patrie-des-droits-de-l'homme-et-de-la-liberté-d'expression. Que nenni ! Dieudonné avait mis un pied dans la porte du direct, et avait honteusement pollué le temps de cerveau disponible des téléspectateurs d'idées honteuses.

Durant les jours suivants, le procès se mit en place. Le procès médiatique évidemment. Le seul qui comptait. Fogiel encaissait les rediffs de son émission et les photos vendues à la presse. Tous les spécialistes furent interrogés. Elie Semoun ne comprenait pas. Tomer Sisley trouva le sketch "pas drôle", et cela suffisait pour condamner l'humoriste. Guy Carlier trouva que l'humoriste poussait au communautarisme. On convoqua Pierre Desproges, pensant entendre dans la fameuse sentence "on peut rire de tout mais pas avec n'importe qui" la preuve que Dieudonné était allé trop loin. Enfin, dans une émission de jury populaire présentée par Thierry Ardisson, on entendit un propos qui semblait tout expliquer :

"Beaucoup d'artistes soutiennent Dieudonné, mais ne le disent pas publiquement, pour ne pas se couper d'une partie de leur public."

Ah ! Ah ! Ah !

Rappelons que tous les procès ont jugé la relaxe pour le sketch2. Sur le papier, Dieudonné est innocent, mais pas dans la pratique. Il vit un purgatoire médiatique, alors qu'il joue un spectacle, visible dans son théâtre parisien et en province.

Dieudonné a attisé toutes les tensions. Et ces tensions sont diablement présentes. J'en veux pour preuve un épisode assez récent. Il y a quelque mois, lors d'un stage avec l'ANPE-spectacle, j'ai évoqué mon passage au théâtre de la Main d'Or, déplorant que Dieudonné soit passé d'humoriste à Ennemi public numéro 1. Qu'avais-je dit ! L'animateur de cette formation m'a vivement rabroué, l'affect prenant le pas sur son job. Quatre ans après les faits, on ne peut toujours pas pas évoqué Dieudonné, sans le condamner. Le simple fait de le soutenir est un acte d'héroïsme en ces temps d'absolutely correct.

C'est donc avec une certaine gourmandise que j'écoute parler Dieudonné. Cet humoriste fait vraiment son travail. Il demeure boycotté par les médias, tandis qu'on ne peut pas zapper sans tomber sur Guillaume Canet ou François Cluzet, en pleine promotion des Liens du sang. En matière de promotion, Dieudonné fait parti des exclus. Il y a quelques jours, je suis passé devant le théâtre de la Main d'Or, le Théâtre de Dieudonné à Paris. Il est toujours à l'affiche. Heureusement qu'il y a ce lieu et le bouche à oreille pour lui permettre de survivre dans ce monde de brutes.

Dans l'interview qui suit, extraite de Ce soir ou jamais, en janvier 2007, Dieudonné rappelle que son métier d'humoriste demande de vivre dans le risque. Il rappelle que les "Grands du rire" sont rarement des potes du pouvoir. Il fustige donc les bourgeois du rire qui font des sketches sur les portables.

La parole est à l'accusé :


Dieudonné - trop raison
envoyé par oa5151
Sionisme et ardisson ou le 2 poids 2 mesures
envoyé par anouarparis