Hasta La Vista

Par Wherethemoviesare

Hasta La vista, réalisé par Geoffrey Enthoven, avec Isabelle de Hertogh, Robrecht Vanden Thoren, Gilles De Schrijver, Tom Audenaert… Sortie cinéma 07/03/2012

Trois amis décident de profiter de la vie et de partir en voyage. Depuis leur Belgique natale, ils veulent traverser la France jusqu’à atteindre l’Espagne, le soleil, le bon vin… et les bordels. Car s’ils veulent entreprendre ce périple, c’est pour perdre leur virginité dans un bordel réputé pour accueillir spécialement les personnes handicapées. Ils ne laisseront rien les empêcher de mener ce voyage, qu’ils camouflent en périple sur la route du vin. Ni leur handicap (l’un est aveugle, le second est presque complètement paralysé, le troisième est en fauteuil roulant suite à une tumeur), ni l’opposition de leurs parents habitués à prendre soin d’eux continuellement, ni l’aggravation de l’état de santé de l’un d’eux.

Un film abordant la question de la sexualité des handicapés, il fallait oser. Et plus encore, il fallait réussir à parler de ce sujet délicat sans pathos, sans ridicule et sans provoquer la gêne. Ce pari presque impossible est pourtant gagné par Geoffrey Enthoven. Ne vous laissez pas leurrer par l’affiche qui rappelle les « teen movies » du genre d’American Pie, Hasta la Vista a une toute autre profondeur.
Ne vous laissez pas non plus leurrer par le synopsis officiel : le handicap n’est qu’un détail dans cette histoire. Hasta la Vista n’est pas un documentaire, c’est un road-movie sur l’amitié et la nature humaine plus qu’un film revendicatif.

Rien n’est épargné aux personnages : on les voit tour à tour s’enivrer, se laisser aller à des commentaires sexistes, se comporter de manière irrespectueuse, insulter en flamand leur accompagnatrice francophone sans savoir qu’elle les comprend. Des comportements que l’on voit rarement mis en scène à propos de personnes handicapées, politiquement correct oblige…
On les voit aussi désespérer, se soutenir, rire, se laisser aller à des confidences, aimer… Bref, des personnages tels qu’ils sont. Presque réels.

Les acteurs sont tout bonnement extraordinaires. L’actrice qui joue Claude, l’accompagnatrice du trio, devait être Yolande Moreau. On peut la remercier de s’être désistée, puisque cela nous permet de découvrir Isabelle de Hertogh, qui gagne à être connue. En ce qui concerne les trois personnages principaux, tout le long du film on se demande si les acteurs sont réellement handicapés, on n’ose croire à une telle performance. Et pourtant. C’est aussi ce qui différencie Hasta la Vista d’un documentaire, et ce qui en fait un film formidable !

Malheureusement, les médias ne lui accordent que quelques lignes perdues au milieu du reste des sorties de la semaine, malgré le soutien de Claude Lelouch qui distribue le film en France et malgré le nombre impressionnant de prix gagnés dans divers festivals dans le monde : Prix du public au Festival du film de Montréal, Prix du public au Festival Québec 2011, Prix du public au Festival de l’Alpe d’Huez…

Si les médias Français s’évertuent à comparer cette histoire à Intouchables, il n’y a qu’une chaise roulante en commun entre les personnages des deux films. Comme l’a rappelé Isabelle de Hertogh lors de l’avant-première à laquelle j’ai eu la chance d’assister, Hasta la Vista est sorti en septembre en Belgique, bien avant le raz de marée Intouchables. Elle a tenu à rappeler que ce film était destiné à tous, puisque tout le monde a son propre handicap. Qu’elles soient visibles ou non, nos failles font partie de nous et il ne tient qu’à nous de les surmonter.

Rappelons tout de même qu’Hasta la Vista est inspiré de l’expérience d’Asta Philpot, qui a effectué ce voyage et l’a ensuite organisé pour d’autres personnes. Il milite aujourd’hui pour le droit à la sexualité des handicapés. Si ce très beau film ne nous force pas à avoir l’esprit ouvert, la réalité s’en charge à sa place.

8,5/10

Hasta la vista