Autisme : réponse des équipes de pédopsychiatrie

Publié le 20 mars 2012 par Balatmichel

Ce texte est destiné aux équipes de pédo-psychiatrie. Le groupe qui l'a élaboré demande leur soutien et se propose d'ouvrir un site de débats dont ce texte sera un des fondements.

Des soignants du Secteur Nord-Ouest du Gard

Autisme : réponse des équipes de pédopsychiatrie.

Suite à la parution du rapport de la Haute Autorité de Santé définissant les « bonnes pratiques » dans la prise en charge des enfants autistes, où elle déclare « s'opposer de façon formelle » à la pratique du « packing » et juge que les approches psychanalytiques et la psychothérapie institutionnelle ne sont pas pertinentes pour l'intégration de ces enfants, Suite aux attaques et à la vision caricaturale que certains voudraient donner de nos pratiques,

Nous, personnels des équipes pluridisciplinaires de pédopsychiatrie signataires de ce manifeste, tenons à réagir :

Oui, la psychanalyse fait partie de notre « boîte à outils » pour penser les fonctionnements psychiques et les angoisses terrifiantes auxquelles sont confrontés ces enfants.

Oui, en faisant de nos hôpitaux de jour des lieux de partage de la vie quotidienne, en essayant d'analyser avec des intervenants extérieurs ce qui se joue sur la scène institutionnelle, nous nous reconnaissons dans le mouvement de la psychothérapie institutionnelle.

Non, les hôpitaux de jour ne sont ni des forteresses ni des prisons, et nous ne sommes pas des tortionnaires sectaires. Nous sommes, nous aussi, soucieux de l'avenir et de la meilleure intégration possible de ces enfants dans la société, dans le respect de leurs différences.

Oui, chaque enfant est au centre d'un dispositif d'ouverture permanente au monde qui l'entoure. Nous travaillons de concert avec l'Education Nationale, avec des I.M.E, avec les services de l'ASE et tous les partenaires sociaux pouvant prendre une place auprès des enfants dont nous avons la charge (centres de loisirs, associations culturelles, etc.) et nous pouvons témoigner, ainsi que les parents et les Centres Ressource Autisme (CRA), de l'évolution positive de ces enfants lorsqu'ils bénéficient de ces multiples articulations.

Non, nous ne culpabilisons pas les parents. Au contraire, nous accueillons et partageons leur souffrance, leurs doutes, mais aussi leurs joies et leurs espérances. Nous écoutons et prenons en compte leur demande d'être accompagnés dans la recherche de solutions pour alléger le poids que peut représenter la vie quotidienne avec leurs enfants ; et si nous n'imposons jamais rien, nous sommes toujours engagés auprès d'eux.

Oui, certains d'entre nous pratiquent le « packing » mais toujours avec l'accord des parents et après avoir expliqué en quoi cela consiste, ainsi que les raisons cliniques pour lesquelles nous le proposons. Nous respectons toujours les réactions des enfants et nous nous laissons guider par eux. C'est pourquoi nous pouvons affirmer n'avoir observé que des effets positifs chez la plupart des enfants ayant bénéficié de cette technique.

Oui, nous nous élevons face aux démarches visant à interdire et judiciariser nos pratiques, car lorsqu'on veut les interdire et ne promouvoir qu'une seule forme de prise en charge à l'exclusion de toute autre, on dessine une société qui s'apparente à une forme de totalitarisme. Les attaques faites à la psychanalyse - comme à toutes les formes de thérapies relationnelles qui s'appuient sur la conception d'un sujet libre ne se réduisant pas à une simple collection de comportements à rééduquer - nous semblent s'inscrire dans le mouvement actuel et plus général d'attaques faites à la culture, à la complexité de la pensée ainsi qu'à toutes les formes de créativité qui continuent d'échapper à la volonté scientiste de tout évaluer, de tout quantifier.

Oui, nous continuons à penser que l'usage de la Parole dans nos institutions de soins, sous quelque forme que ce soit, reste le meilleur des outils pour préserver l'humain en chacun de nous.

Afin de permettre à la diversité d'exister, nous nous engageons à faire vivre toute la clinique qui est aujourd'hui la nôtre, à continuer d'accueillir ces enfants pour ce qu'ils sont - en leur offrant des espaces où évoluer et se construire - et non pas pour ce que nous voudrions qu'ils soient, et à encourager la dialectique plutôt qu'à laisser s'installer la simplification et l'uniformisation de la pensée.

C'est aussi dans cet esprit que nous soutenons le professeur Pierre Delion pour son éthique, faite du respect du sujet humain, de l'accueil de la souffrance des enfants et de leurs parents, et pour le portage attentionné des équipes avec lesquelles il travaille.

Nous voudrions que ce texte ne reste pas une simple réaction ponctuelle ; nous souhaitons, avec tous ceux qui sont intéressés, continuer à écrire et témoigner de nos pratiques sur ce site et dans de futures rencontres.

Texte élaboré par des soignants du Secteur Nord-Ouest du Gard avec le soutien de :