Le Chemin de Fer du Salève - La nostalgie n'est plus ce qu'elle était

Publié le 06 avril 2012 par Pierrehk

Depuis longtemps, je ne peux m'empécher d'être ébahi par l'audace qu'avaient nos ancètres du XIX ème siècle dans l'élaboration et parfois la réalisation de projets un peu fous.

Le plus frappant étant pour moi celui du Tramway du Mont-Blanc qui conduit le passager au Nid d'Aigle mais qui était prévu à l'origine pour monter jusqu'au sommet du toit de l'Europe, et dont l'ambition fut revue à la baisse après la Grande Guerre.

Mais plus près de nous, une autre réalisation aujourd'hui disparue m'a toujours interpellé et fait réver. Or j'ai récemment retrouvé l'excellent article que Gérard LEPERE lui a consacrée en 2004 (corrigé en 2012) et dont je souhaite vous faire découvrir les principaux passages.

Embarquez sur les traces du chemin de fer à crémaillère du Salève et plongez dans un passé pas si lointain où le pittoresque le dispute aux légendes.

 

Le chemin de fer électrique et à crémaillère du Salève
(Haute-Savoie)

 par

Gérard LEPERE

Juillet 2004

1   Avant-propos

En 1994, La Salévienne (société d'histoire) publiait Le chemin de fer à crémaillère du Salève, Échos Salèviens n°4, ouvrage de 128 pages comportant 79 illustrations. Le succès fut immédiat et, malgré un tirage de 2000 exemplaires, le livre fut rapidement épuisé. En attendant une réédition avec des compléments, j'ai rassemblé dans cette brochure quelques informations techniques et sélectionné quelques cartes, dessins et photos parmi les plus intéressants. Certains clichés n'ont jamais été publiés.

2   Présentation

Le XIXe siècle a vu l'invention du chemin de fer et le développement de grands axes ferroviaires. Parallèlement à ces grandes lignes, un fin maillage de lignes secondaires et d'intérêt local s'est constitué entre 1890 et 1925.

La région genevoise n'échappe pas à ce destin. Situé au sud-est du canton de Genève, le Mont-Salève est depuis longtemps le lieu d'excursion favori des Genevois ; il est même considéré encore aujourd'hui, à tort, comme partie intégrante du patrimoine suisse. Depuis le sommet on peut admirer la chaîne des Alpes suisses et françaises, dont le massif du Mont-Blanc, le Jura et une partie du Lac Léman. Comme l'ascension demandait trois bonnes heures de marche, l'idée d'y construire un chemin de fer électrique à crémaillère germa très vite.

C'est l'histoire de ce "petit train" que je vous propose de retracer ici en quelques pages[1]

3   Construction

Le 18 juin 1887, une concession est donnée à MM. de Meuron et Cuénod pour la construction d'une ligne de chemin de fer reliant la commune d'Etrembières au lieu-dit "Les Treize-Arbres" près du sommet du Grand Salève via les villages de Mornex et Monnetier. La longueur de cette première ligne est de 5,7 km. Une branche reliant Veyrier (frontière suisse) à Monnetier (3 km) est prévue ultérieurement [Fig. 02 et 03].

Le 9 juin 1888, déclaration d'utilité publique qui prévoit que le chemin de fer ne bénéficiera d'aucune subvention.

En 1890, création d'un syndicat de financiers. Les capitaux sont principalement suisses ; on trouve diverses banques qui participent au capital comme suit : banques genevoises : 29 % ; bernoises : 18 % ; bâloises : 21 %.

En juillet 1890, le premier coup de pioche est donné sur la ligne Etrembières - Les Treize-Arbres ; les terrassements sont terminés le 30 novembre 1891.

En juillet 1891, la concession définitive est accordée par le département de la Haute-Savoie.

En décembre 1891, début de la pose de la voie sur la section Etrembières - Les Treize-Arbres ; les travaux de pose sont terminés le 6 avril 1892.

Le 9 décembre 1891, une concession est accordée pour la ligne entre Veyrier et Monnetier-Mairie.

En décembre 1892, ouverture de la ligne Etrembières - Les Treize-Arbres : le chemin de fer du Salève est le premier chemin de fer électrique de montagne au monde totalement à crémaillère[2].

1892-1893 : les travaux sur Veyrier-Monnetier avancent péniblement : les propriétaires des terrains sont réticents à céder leurs terres pour permettre le passage du petit train. La compagnie doit recourir à l'expropriation, ce qui demande plus de temps que les accords amiables ; l'ouverture de la deuxième ligne ne pourra pas avoir lieu en 1893 comme prévu.

Le 24 mars 1894 : ouverture de la ligne Veyrier - Monnetier-Mairie ; il n'est plus nécessaire de monter à pied les 120 marches de pierre taillées dans le rocher pour passer le Pas-de-l'Echelle, le tout nouveau "funiculaire" emporte ses passagers à travers le tunnel (Fig. 01, en couverture].

Altitudes des gares et des haltes :

Etrembières [Fig. 11 et 12]

407 ou 408 m

Bas-Mornex [Fig. 14]

env. 534 m

Haut-Mornex [Fig. 17]

env. 570 m

Monnetier-Mairie [Fig. 20 à 23]

650 m

Veyrier [Fig. 29 et 30]

428 ou 432 m

Monnetier-Eglise [Fig. 38 à 40]

700 m

Les Treize-Arbres [Fig. 24 à 27]

1142 m

4   Exploitation

Le trajet Etrembières - Treize-Arbres ou Veyrier - Treize-Arbres dure environ une heure, soit une demi-heure pour chaque branche (ou section) de 3 km. Dès l'origine, le service comprend quinze allers-retours par jour en semaine et jusqu'à vingt les week-ends et jours fériés.

Le trafic marchandises est faible : les six wagonnets [Fig. 09, 12 et 18], poussés par les automotrices, transportent principalement des matériaux nécessaires à l'entretien du réseau mais assurent aussi le ravitaillement du restaurant de la gare des Treize Arbres. Nourriture, bois de chauffage et eau potable sont souvent présents. Tarif : 1 F par kilomètre par tonne en 1891.

1895 : le chemin de fer du Salève devient vite une entreprise rentable : 1 F dépensé procure 1,36 F de recettes puis près de 1,75 F jusqu’en 1914.

1912 : la fréquentation de la ligne atteint son maximum avec 87 000 voyageurs par an.

1914 : la première guerre mondiale provoque la fermeture de la frontière franco-suisse, la clientèle suisse déserte le Salève. Tout au long de la guerre, la faible exploitation s'accompagne d'augmentations des tarifs.

1919 : retour à la normale et dernière augmentation de tarifs due à la guerre.

1928 : la fréquentation n'est plus que de 62 039 voyageurs par an.

5   Fin du chemin de fer du Salève

La bonne fréquentation des premières années est suivie par l'effondrement du trafic pendant la première guerre mondiale ; les problèmes financiers s’aggravent, les déficits se succèdent malgré certaines économies réalisées sur le personnel : les postes des chefs des gares de Bas-Mornex, Haut-Mornex et les Treize-Arbres sont supprimés.

Décembre 1931 ou début 1932 : le trafic cesse sur la section Etrembières – Monnetier-Mairie ; le train est remplacé par un service d'autocars.

1932 : une route permet aux automobiles de gagner le sommet du Salève. La mode est aux moyens de transports modernes et le chemin de fer devient vétuste, les employés sont démotivés, les temps de parcours sont longs (une heure), l'audace financière n'est pas au rendez-vous. La compagnie remet l'exploitation aux employés qui forment une coopérative et les coûts d'exploitation diminuent légèrement.

Août 1932 : mise en service du téléphérique qui relie directement le hameau du Pas-de-l'Echelle à la crête du Grand Salève (1097 m) et cela, dix fois plus vite que le train. Son promoteur, Auguste Fournier (1902-1979), propose l'établissement de billets circulaires (montée en téléphérique et descente en train ou le contraire), aucune suite n'est donnée.

28 février 1934 : arrêté de déclassement de la section Etrembières à Monnetier-Mairie.

1935 : l'Assemblée Générale extraordinaire des actionnaires de la Compagnie des Chemins de fer du Salève prononce la dissolution de la Société.

1936 : le courant électrique est rétabli dans le troisième rail : la démolition du réseau commence par le haut, rails, traverses et crémaillères sont descendus par les automotrices puis récupérés par un ferrailleur. Hélas, la destination exacte du matériel est inconnue ; ferrailleur d'Annecy ou d'Albertville ? Carmen Fontaine [Fig. 08 et 34], fille du chef de gare de Monnetier-Mairie, se rappelle avoir vu passer les automotrices sur des camions alors qu'elle était à Annecy. La destination était très certainement la démolition.

23 août 1938 : arrêté de déclassement des sections entre Veyrier et les Treize-Arbres paru au Journal Officiel.

6   Matériel roulant

Le matériel roulant du chemin de fer du Salève comporte le strict minimum nécessaire à l'exploitation, à savoir douze automotrices et six wagonnets.

6.1   Automotrices

Initialement prévues à deux essieux et pesant 8 tonnes, les voitures automotrices construites sont longues de 8,50 mètres, larges de 2,10 m et hautes de trois mètres au-dessus du rail. Elles pèsent 10,4 tonnes à vide, 14,4 tonnes en charge et peuvent transporter 40 passagers à une vitesse comprise entre 5,4 et 10,8 km/h grâce à leurs deux moteurs de 40 CV (29 kW) à 4 pôles avec un enroulement en série ; ils sont du type Thury. Développant normalement 30 CV à 600 tours/minute, ils peuvent être poussés quelques instants à 1200 tours/minute où leur puissance atteint alors 50 CV. Après une double démultiplication, ils attaquent les roues dentées de la crémaillère [Fig. 06].

Les automotrices sont montées sur trois essieux, celui du centre est sans boudin de manière à faciliter l'inscription dans les courbes ; les essieux sont uniquement porteurs car l'effort de traction est transmis par les roues dentées attaquant la crémaillère [Fig. 10].

Les caisses des automotrices ont été fabriquées par la Société Industrielle Suisse (SIG) à Neuhausen près de Shaffhouse, l'équipement électrique est, quant à lui, fourni par les Ateliers de Sécheron à Genève (ateliers de René Thury) ; la prise de courant est réalisée par quatre patins (deux de chaque coté) frottant sur le troisième rail.

Le freinage est assuré par trois dispositifs :

ØFrein électrique instantané : le freinage est obtenu en renversant le courant dans les moteurs. Cette technique est peu utilisée car elle produit de violentes secousses.

ØFrein électrique rhéostatique : les moteurs sont utilisés comme des génératrices qui débitent le courant dans des résistances situées, à l'origine, en dessous des automotrices. Par suite d'échauffements trop intenses, les résistances sont installées sur le toit des automotrices vers 1910.

ØFreins à main mécaniques : ces systèmes de freins sont les plus visibles par les passagers et sur les photographies : les deux manivelles placées sur les plates-formes serrent des tambours fixés à l'axe des moteurs.

La livrée des automotrices a changé deux fois au cours de l'exploitation du chemin de fer :

ØPremière époque : 1892 à 1908-1911 : les douze automotrices sont livrées peintes d'une couleur foncée : sans doute en brun [Fig. 07, 14, 16, 17, 22, 24, 33, 36 et 39].

ØDeuxième époque : 1908-1911 à 1927 : les automotrices sont bicolores (par exemple jaune et bleu ou jaune et vert) pour différencier les deux classes instaurées en 1895 [Fig. 08, 18, 19, 23, 27, 34 et 40].

ØTroisième époque : 1927-1936 : dix automotrices sont peintes en rouge grenat, la n°7, utilisée comme machine de service, reste de couleur bleue [Fig. 09 et 26].

6.2   Wagonnets

Les six wagonnets sont numérotés de 20 à 25. Munis de deux essieux et d'un frein à vis, de couleur grise ou gris-bleu, ils sont principalement utilisés par la compagnie pour les besoins du service : transport de ballast, d'outils, de pièces détachées, etc. [Fig. 09 et 12].

En service, un wagonnet est placé en amont de l'automotrice, la liaison est assurée par un levier-tringle et deux chaînes de sécurité.

Deux ont été équipés de citernes : l'une de 1000 litres, perpendiculaire à l'axe de la voie et l'autre de 2000 ou 3000 litres, parallèle à l'axe de la voie [Fig. 18].

On sait très peu choses des wagonnets sinon qu'ils n'avaient pas de hangar propre et que le rapport de gestion de la compagnie mentionne en 1930 "la réfection à neuf d'un wagonnet".

7   Technique

La voie d’écartement métrique est constituée de rails de type Vignole de 15 kg/m posés sur des traverses métalliques ; la crémaillère, de type Abt, est à simple lame dans les rampes inférieures à 10 % et double dans les rampes de plus forte déclivité [Fig. 10]. Roman Abt, l’inventeur, a été nommé expert pour la voie, la crémaillère et le matériel roulant. Les 18 aiguillages sont de type classique avec lames de crémaillère mobiles.

Les automotrices captent par deux patins le courant continu de 600 volts sur un troisième rail latéral. Celui-ci est identique aux rails porteurs, mais retourné et supporté par des isolateurs en porcelaine [Fig. 10].

Le cahier des charges interdit les courbes inférieures à 50 m de rayon, pas de déclivité supérieure à 25 % et impose une distance de 20 m minimum entre courbes et contre-courbes [Fig. 21].

A bord de chaque automotrice, un mécanicien conduit debout sur la plate-forme inférieure et un contrôleur se tient sur la plate-forme amont près des freins mécaniques [Fig. 40].

La conduite sur le chemin de fer du Salève est assurée à vue. En cas de forte affluence, deux ou trois automotrices peuvent se suivre, toujours en marche à vue : la vitesse limite sur le réseau étant de 10 km/h [Fig. 22].

Deux automotrices partent simultanément de Veyrier et d'Etrembières ; lorsqu'elles se rejoignent à Monnetier-Mairie l'une des deux ou les deux montent vers les Treize-Arbres en fonction de l'affluence [Fig. 23].

Les aiguillages sont manœuvrés à la main par le contrôleur, parfois en équilibre sur le marchepied de l'automotrice ! [Fig. 40]

L'entretien de la voie est simple et réalisé à peu de frais : il consiste principalement au graissage à la main des crémaillères (147 200 dents !), au rajout de ballast et à l'entretien des divers talus et fossés. Il est porté une attention particulière à la clôture bordant la ligne. Le service de la voie occupe entre deux et six personnes selon l'année [Fig. 10 et 15].

8   Accidents et incidents

La vie du chemin de fer du Salève ne fut troublée par aucun accident d'exploitation grave : quelques rochers sont bien tombés sur la voie, sur la section Veyrier-Monnetier, mais sans causer de dommages importants et sans heurter d'automotrices ou d’employés.

Ce qui a le plus marqué les riverains, les passagers et le personnel était le rail électrique [Fig. 10 et 15] : malgré les protections installées le long de la voie, les 600 volts faisaient peur à tous et nombre de personnes, dont quatre enfants, ont été blessées ou tuées par l'électricité.

Quelques animaux (vaches, chiens, ânes...) auraient également été tués par le rail électrique.

8.1   Accidents dus à l'électricité

Cette électricité à ras de terre généra trois accidents mortels entre 1892 et 1936.

Alexandre Rivollet (1888-1934) était chef d'exploitation du chemin de fer et fut le premier à être tué par le courant. Le 2 janvier 1934, après avoir effectué la paye des ouvriers à Monnetier-Mairie, il redescendait sur Veyrier, sur la plate-forme d'une automotrice. Vers 17h15, comme il se penchait à l'extérieur pour voir l'automotrice qui suivait, il fit une chute sur le troisième rail, à la hauteur de l'aiguille aval du croisement du tunnel [Fig. 34] : le loquet du portillon aurait cédé.

Le 14 août 1934, Charles Descombes (1899-1934) cherchait des champignons avec son cousin, sur le Grand-Salève ; il pleuvait. En voulant traverser la voie près du Restaurant du Mont-Blanc, son pantalon a touché le troisième rail et l'a électrocuté. Sa veuve, Yvonne, n'a pas "touché d'indemnités de la Compagnie des Chemins de Fer car il était dans son tort puisqu'il avait traversé la voie clôturée et interdite".

La dernière victime, Marcel Perréard (1922-1936), trouva la mort alors que le chemin de fer était en cours de démolition, le 27 août 1936 à 15h30. Il faisait beau, l'enfant était allé ramasser des cyclamens et il commit l'imprudence de s'asseoir sur le troisième rail, remis sous tension après plusieurs mois d'arrêt du trafic, afin que les automotrices descendent les matériaux de démolition.

L'histoire de la mort de Marcel Perréard illustre de façon frappante la fragilité des témoignages humains : alors que la date de l’accident est parfaitement connue, selon les témoins que l'on interroge, la victime avait entre 8 et 18 ans, tandis que l’année de l'accident oscille entre 1910 et 1937. Cependant, tout le monde est d'accord sur le temps ce jour-ci ainsi que sur le but de la promenade de l'enfant : cueillir des cyclamens pour sa maman.

8.2   Incidents dus à l'électricité

Au cours de la vie du chemin de fer du Salève, quatre enfants furent blessés par le courant du troisième rail.

ØEn traversant la voie en gare de Monnetier-Mairie vers 1900, Jeanne Burnet (1887-1968) s'est prise dans le troisième rail. Elle garda toute sa vie les cicatrices de ses brûlures aux genoux, bras et menton.

ØMartial Arnaud (1917-1990), secoué vers 1926 en gare de Monnetier-Eglise.

ØEn jouant avec un wagonnet près de la gare de Veyrier, Michel Sorlut, (1927) s’est fait également secouer.

ØJacques Rochard (né en 1928) jouait trop près du troisième rail en gare de Monnetier-Mairie.

9   Aujourd'hui

Que reste-t-il aujourd'hui du Chemin de fer du Salève ? Peu de choses.

Il n'y a pas de document quant à la destination du matériel roulant, mais il s'agit probablement de la casse. Les caisses en bois ont vraisemblablement été brûlées, les châssis en fer et les engrenages en bronze refondus.

Des automotrices, il ne reste qu'une plaque métallique indicatrice de première classe qui n'avait servi que quelques années au début du 20e siècle ainsi qu'une main montante extérieure.

La plupart des ouvrages d'art sont encore visibles. Le mieux conservé étant le tunnel du Pas-de-l'Echelle [Fig. 34 à 36], très facile d'accès depuis Monnetier, mais fermé par des grilles. Le tracé de la ligne entre Etrembières et les Treize-Arbres est aujourd'hui un sentier destiné à la promenade, divers petits ponts sont facilement reconnaissables et ne trahissent pas leur âge. (Voir §11.7-Les ponts et le tunnel)

Les gares ont été progressivement démolies, la dernière en date étant celle de Veyrier en 1993. Seules subsistent la gare des Treize-Arbres, quasiment dans son état d'origine [Fig. 24 à 27], et celle de Monnetier-Mairie dont les travaux d'agrandissement ont à peine dénaturé le charme originel [Fig. 22 et 23].

L'usine hydro-électrique d'Arthaz est maintenant propriété de l'EDF qui a conservé les bâtiments et le barrage ; on peut encore voir la station électrique à Monnetier qui servait autrefois à alimenter le réseau : c'est maintenant un poste de transformation électrique qui alimente le village de Monnetier. C'est le seul élément du Chemin de Fer du Salève qui remplit encore sa fonction d'origine [Fig. 05].

Les deux dépôts ont eu des sorts opposés. Alors que celui d'Etrembières est quasiment intact (seulement raccourci de quelques mètres) [Fig. 11], les ateliers et hangars de Veyrier [Fig. 29] changèrent plusieurs fois de propriétaires avant d'être vendus à Henri Chavaz en 1974, qui fit tout raser. Des ateliers, il ne reste que les fosses de visite des moteurs d'automotrices.

Divers petits tronçons de rails et de crémaillères sont aujourd'hui propriétés d'habitants de Monnetier-Mornex ou Etrembières ; il est encore assez facile de trouver des isolateurs de troisième rail en parcourant l'ancienne plate-forme.

Parmi quelques rares objets ayant été conservés, citons une paire de tréteaux en bois gravés "CIE SALEVE", un tampon encreur "Société Anonyme des chemins de fer du Salève", une machine à poinçonner les billets et deux pinces à billets.

Disparu il y a près de 77 ans, le Chemin de Fer du Salève a toujours ses nostalgiques qui regrettent ce moyen de transport pittoresque et rêvent de le voir ressusciter. Mais, le coût de reconstruction du Petit Train est tel que ce rêve n’est pas prêt de se réaliser.

Pour ceux que cet article a interessé, je ne saurais trop vous conseiller de lire l'article original de Gérard LEPERE en cliquant sur le lien suivant: www.monnetier-mornex-esserts.com/docs/funiculaire.doc pour la version 2004 et www.la-salevienne.org/G-LEPERE-CF-SALEVE-217-09.pdf pour la version 2012.

Vous y décrouvrirez toute une série de photos de l'époque absolument admirables qui décrivent l'atmosphère du début du XXème siècle, ainsi que toutes les notes bibliographiques utilisées par l'auteur. On y trouve aussi de nombreuses informations sur le tracé et ses ouvrages d'art, ainsi qu'une foultitude d'informations sur les transports en Haute-Savoie et sur le mode de vie de l'époque.