Dix raisons de voter Poutou

Publié le 15 avril 2012 par Livmarlene


Il y a trois jours, sur France 2, les téléspectateurs ont pris une claque. Alors que la campagne commençait sérieusement à virer à la purge, voilà que grâce à l'obligation d'égalité du temps de parole, le public a pu découvrir Philippe Poutou. Ce mec que l'on disait fade et sur lequel personne n'aurait parié un clou rouillé, ce simple ouvrier n'a eu besoin que de vingt minutes face à Pujadas pour que son capital sympathie décolle à en rendre les Nord-Coréens jaloux. De là à voter pour lui... Quoique. Voyons voir comment je pourrais justifier ce choix extrême. 1. C'est le seul véritable "homme du peuple". Philippe Poutou nous l'a rappelé lors de son grand oral, après le premier tour il reprendra le cours de sa vie à l'usine Ford, à faire les trois huit. Sur France Info le lendemain, il expliquait que pour les besoins de la campagne, il était passé à mi-temps d'octobre à mars. En avril, il a pris un congé sans solde. C'est le NPA qui compense le manque à gagner. Pas de quoi lui tourner la tête. 2. Pour lui, les copains, c'est sacré. A un David Pujadas pour le moins amusé, l'ouvrier-candidat a expliqué ce qui lui manquait depuis qu'il était en lice pour la présidentielle : "Là, je suis seul. D'habitude, on envahit les salles de réunion du patron en groupe, on séquestre en groupe, on fait la grève en groupe." 3. Il n'a pas rendez-vous avec le Pape. Petit coup de patte aux candidats qui croient depuis l'enfance avoir un destin exceptionnel. Philippe Poutou affirme qu'il n'entend pas de voix et cette simplicité pourrait bien lui en rapporter quelques unes, de voix. 4. Etre candidat, ça le fait chier, ça l'emmerde... et ça nous régale ! Il parle comme tout le monde, Philippe... Même quand on le cherche sur le terrain de l'économie. Ça nous change de tous ces culs pincés usent de périphrases quand ils se traitent de noms d'oiseaux, pour éviter de salir leurs mouilles avec le langage du bas peuple. Merde, putain, chié, au moins tout le monde comprend. 5. Il lui tarde de retourner à l'usine. Voilà la France qui se lève tôt, celle qui fait les trois huit et qui claque pas tout son budget de campagne dans des costards qui coûtent les yeux de la tête ! 6. Quand il sourit, on le sent sincère. Il ne se fait pas d'illusion, pour lui, le scrutin du premier tour sonnera la fin de partie. Le candidat n'a rien à perdre ni à gagner. Son sourire n'a donc rien de carnassier, c'est la joie de vivre de quelqu'un qui croit encore à la lutte sociale. 7. On le disait insignifiant, il est charismatique. Depuis le début de sa recherche de parrainages, il s'en est entendu, des critiques et des comparaisons assassines avec son prédécesseur. Mais comment voulez-vous juger des qualités de l'homme sans lui donner de réelle occasion de s'exprimer ? Grâce à France 2, c'est chose faite et maintenant, plus personne ne dit que ce nouveau venu a les épaules trop étroites pour la veste de Besancenot. 8. Il est lucide sur le pouvoir. Pour Philippe Poutou, le pouvoir ne devrait pas être dans les mains de ceux qui le veulent. Justement parce qu'ils ont une ambition personnelle, plus que le souci de l'intérêt général. Pas dénué de bon-sens au fond. 9. Le public l'applaudit, malgré les faiblesses de son programme. Une première depuis que l'émission Des paroles et des actes existe. Alors qu'avec un discours assez proche sur le fond, la candidate de lutte ouvrière a quitté le plateau comme elle était arrivée, inaperçue ou presque, Poutou, tout fier d'avoir fini pile sur le gong, a déclenché une vague de sympathie. Mais bon, une élection présidentielle, est-ce un concours de popularité ? Dans une certaine mesure, oui. Quand on constate à travers l'Europe que les dirigeants soit disant de gauche, mènent la politique que leur dictent les marchés financiers, on se dit qu'au fond, mieux vaut choisir le candidat dont la bobine nous revient le mieux. Je n'ai pas la révolution chevillée au corps comme le candidat du NPA. Mais qu'ils soient de droite, de gauche ou une fesse de chaque côté, les politiciens ne savent pas (ou plus) à quoi ressemble la vie du Français moyen. Pour se faire élire, ils jouent la proximité pendant quelques mois, serrent des mains comme Poutou serre les boulons à l'usine. Mais ils ont tous le cul bien au chaud grâce à un ou plusieurs mandats. Même Mélenchon qui exhorte les foules à la révolution citoyenne, même lui touche des indemnités parlementaires qui donneraient le vertige aux huit millions de pauvres comme à beaucoup de classes dites moyennes. Pour résumer mon sentiment (et notez que je ne prétends pas détenir la vérité) : *Hollande est trop mou. De peur de déplaire à qui que ce soit, il joue à l'équilibriste, sans conviction. *Sarkozy est trop dur, l'exercice du pouvoir lui a fait oublier que si le métier de président est de prendre parfois des décisions inhumaines, celles-ci concernent néanmoins des millions de vies humaines. *Bayrou se prend pour Henri IV, mais voilà, nous sommes en 2012 et le monsieur, s'il ne bégaie plus pas, manque sérieusement de vivacité pour l'ère de Twitter. *Marine Le Pen veut moderniser l'image de son parti en abordant de nouveaux thèmes... C'est pour ça qu'elle propose de dérembourser les IVG "de confort"! C'est dommage, parce que quand on est stressées ou fatiguées, un bon petit avortement, c'est vrai que ça détend... *Mélenchon joue les révolutionnaires, mais c'est un fin calculateur. Son but n'est pas de rendre le pouvoir au peuple, mais bel et bien que son parti en ait sa part si le PS conquiert l'Elysée. *Eva Joly, c'est un peu la Tatie Danielle de l'écologie : parfois, on se dit que ce n'est qu'une vieille dame rigolote et une seconde plus tard, elle balance une horreur et on a envie de lui filer une baigne. *Nicolas Dupont-Aignan... Ça ne prend pas, je ne saurais dire si c'est sa façon désuète de défendre le souverainisme ou sa gestuelle et son élocution rigoureusement pompées sur les présidentiables. Mais non, vraiment, non. *Jacques Cheminade, comme son nom l'indique, il a la cafetière qui fume. Cet homme veut partir à la recherche d'une intelligence extraterrestre, alors que nous citoyens français, c'est sur Terre que nous la cherchons désespérément, l'intelligence, parmi nos candidats à la fonction suprême ! *Nathalie Arthaud a un je ne sais quoi d'Arletty, mais pas le potentiel sympathie d'Arlette. La situation est grave, certes. Mais c'est pas une raison pour tirer la tronche en permanence. 10. Philippe Poutou ? Je ne partage pas toutes ses idées, loin s'en faut. Mais je crois qu'il mérite de faire un score honorable... Du coup...