Les quelques minutes ouvertes à une poignée d’abonnés de la saison de l’Opéra ont laissé des traces : «habitée», «voix magique», ainsi qualifiait-on la prestation de la mezzo-soprane newyorkaise Isabel Leonard, dont on a pu entendre l’aria phare de son rôle de Ruggiero, «Mi lusinga il dolce affetto» («sous le charme d’une douce émotion»). Et même sans costumes, les quelques scènes des deux premiers actes suffisaient à vous transporter ailleurs... Comme par magie.
«Énergique, enlevée, explosive»
Car c’est bien de magie – et d’amour, forcément – qu’il est question dans ce chef-d’oeuvre de Haendel, qui fit un tabac en clôture de la première saison du mythique Royal Opera de Covent Garden en 1735. Coutumière des métamorphoses d’anciens amants en animaux et autres formes improbables, l’enchanteresse Alcina épargne le chevalier Ruggiero (rôle originellement dévolu à un castrat), que sa fiancée Bradamante vient secourir grimée en guerrier Ricciardo, dont s’éprendra Morgana, la soeur d’Alcina. La confusion des genres joue à plein dans cette pièce, que le metteur en scène américain David Alden décrit comme la «plus érotique» du compositeur. Les décors entrevus montrent son parti pris de déplacer l’action hors du temps, dans une atmosphère post-moderne d’une Amérique 50’s. «La mise en scène va représenter le royaume d’Alcina comme un petit théâtre imaginaire, abandonné», explique-t-il, jouant à fond la carte du rêve et de la frontière invisible entre réel et imaginaire. Assez audacieux pour qu’on ait hâte d’y être déjà ! • Sébastien Le Jeune
Une conférence ouverte au public sera donnée demain à 18h30. Au Grand-Théâtre, les 2, 4, 8, 11 mai, à 19h30 et le 13 à 15h30, durée : 4 heures, 8-35€. Tél. 05 56 00 85 95. www.opera-bordeaux.com