Couleurs vénitiennes : demeures abandonnées...

Publié le 16 avril 2012 par Venetiamicio



     Le chemin labyrinthique n'est qu'un effet de miroir et de l'eau - il enseigne l'écart entre soi et le monde, comme entre soi et soi, renvoyant à un canal, à un coin de ciel. Que déchiffrer des signes parmi cette jubilation chatoyante de pierres, de briques, de canaux ? Que lire sur cette interminable fugue de murs : l'empreinte du périssable, de l'éternel ? Les traces d'une beauté ruinée, ou celles de la métamorphose joyeuse des matières ? Ces choses amies sont l'oeuvre d'autres destins et leurs indices nous donnent une plus tangible perception du réel. Il faut donc se laisser aller, ne pas s'attacher à trouver. Ce que l'on ne peut voir là-bas, on le rencontre ici dans une vision approchante, et ce qui se répète revient comme possible.
     S'il arrive que soit ouverte une porte sur un rio, les yeux ne rencontrent que de l'inutile, alimentant la substance d'éléments délaissés - elle parle d'un autre temps, suggère un autre espace, pour un tout autre voyage.
     On ne peut se perdre dans Venise. Nous n'étions jamais partis, n'arriverons jamais, et continuerons à naviguer entre les murs comme si nous étions en mer ou traversions l'immensité d'un désert.
Bernard NEAU, Venise Miroir des signes