La concession du téléphone

Par Araucaria

Quatrième de couverture :
Demander une ligne téléphonique : quoi de plus banal, pensera-t-on. Oui, mais pas en 1891. Et pas à Vigàta, bourgade de Sicile, relevant d'un préfet notoirement susceptible.Le fringant Filippo Genuardi, qui s'est malencontreusement trompé d'une lettre en écrivant le nom dudit préfet, va sans le savoir être soupçonné d'agitation révolutionnaire. Et, par contrecoup, attirer sur lui le regard de la mafia locale... Un comble, surtout quand on connaît la véritable (et inavouable) raison de sa demande!Rebondissements, retournements, surprises : cette satire malicieuse de la mesquinerie et de la paranoïa humaines, qui sont éternelles, est menée tambour battant. Elle donne la mesure du talent d'Andrea Camilleri, devenu romancier après une carrière consacrée au théâtre, et qui connaît un grand succès en Italie.
Un extrait :
(Commandeur Longhitano - Pippo)*
"C'est pas une surprise, ça?
- Don Lollo! Vous, ici? Dieu du ciel, je suis un homme mort!
- Monsieur Genuardi! Monsieur Genuardi! Qu'avez-vous, vous vous évanouissez? Il tourne de l'oeil ce petit merdeux! Je vais le réveiller vite fait!
- Assez... Assez... Vous n'y allez pas de main morte!
- C'est pour mieux vous réveiller.
- Pitié... vous voulez m'achever?
- En voilà des histoires pour quelques beignes! Pourquoi diable cela sent-il si mauvais?
- Commandeur, j'ai fait dans mon pantalon. Avant de... me permettez-vous de dire une prière? Je voudrais réciter l'acte de contrition. Mon Dieu, j'ai un très grand regret de vous avoir offensé...
- Monsieur Genuardi, arrêtez vos simagrées.
- Sainte Vierge, comme j'ai froid! Je gèle! Puis-je me mettre une couverture sur le dos?
- Mettez donc et arrêtez de pleurer comme un veau.
- Je ne peux pas m'en empêcher. Sainte Vierge, quel froid! Je tremble de la tête aux pieds.
- Monsieur Genuardi, calmez-vous et écoutez-moi. Mal en point comme je suis, je me suis donné la peine de venir de Montelusa à Palerme, pour tirer les choses au clair entre vous et moi.
- Je vous demande pardon, mais seriez-vous armé?
- Naturellement.
- Jésus, Marie, Joseph! Pourquoi sortez-vous votre révolver? Vous voulez me tuer? Mon Dieu, j'ai un très grand regret de vous avoir offensé...
- Vous allez vous taire, une fois pour toutes?
- Impossible! Comment pourrais-je me taire? Je voudrais pleurer, parler, prier...
- Regardez, ce révolver qui vous donne des sueurs froides, je le pose là, sur la commode, hors de ma portée.
- Sainte Vierge, comme j'ai chaud! Que j'ai chaud! Je ruisselle de sueur! Pouvez-vous rouvrir la fenêtre? Je n'arrive même pas à me mettre debout, si je me lève, je m'écroule à côté du lit.
(...)
* (Commandeur Longhitano : Calogero ("Don Lollo" Longhitano, commandeur, parrain de la mafia. - Pippo : Filippo Genuardi.)
Andrea Camilleri - La concession du téléphone - Le Livre de Poche n° 15052 -
Ce roman alterne deux sortes de chapitres, des choses écrites et des choses dites. Les choses écrites sont pour la plupart des lettres administratives aux tournures ampoulées. Les choses dites sont souvent des dialogues très imagés au vocabulaire un peu cru.
Ce roman est très divertissant, très amusant. Il comporte des rebondissements. Je n'ai éprouvé aucune lassitude en le lisant, bien au contraire, j'ai beaucoup ri. A découvrir donc pour passer un très bon moment.