Parce que ce n’est jamais que notre vie

Publié le 04 mai 2012 par Lana

Souvent on est plus indulgents avec les autres qu’avec nous-mêmes. On admire, on envie, on trouve du sens à leurs actes, on idéalise, on voudrait être à leur place. Chez nous on ne pardonne rien, on se dévalorise, on soupire, on se décourage, on ne trouve pas de sens à notre vie. Et pourtant parfois ces autres nous admirent, nous envient, trouvent du sens à nos actes, nous idéalisent, voudraient être à notre place. Notre vie leur paraît plus intéressante quand nous trouvons la leur plus intéressante.

Mais nous n’envions que des images. Et ceux qui nous envient ne voient que ce qu’on veut bien leur montrer.

Parce que derrière les choses enviables, il y a la solitude dans laquelle on les a créées,  la souffrance du soir et le découragement du matin, il y a la succession d’échecs et de doutes, les mois d’attente, il y a ce qu’on porte en nous, les amours déçues, les larmes d’amour perdu, le coeur brisé et rebrisé, la fatigue de vivre, l’odeur du tabac froid et la poussière qui revient sans cesse, les mots qui blessent et rabaissent quand on attend, depuis toujours, depuis cet enfant qu’on était, un mot d’admiration qu’on n’aura jamais, on le sait, mais quand même, il y a les gens qu’on a perdus, et ceux qui sont là mais loin, trop loin pour notre coeur qui leur crie des mots qu’on ne dira pas, parce que ça ne se fait pas, parce qu’on aime trop, qu’on demande trop, et que ça laisse du vide presqu’aussi douloureux qu’une absence, mais tant pis on souffre en silence pour ne pas perdre ces gens qu’on aime, qu’on admire, qu’on idéalise, et qui sont notre vie.

Parce qu’on espère toujours plus, et qu’on a souvent moins, parce qu’il faut vivre avec ses douleurs et sa solitude, parce que la vie est bassement domestique quand on la voudrait romantique, parce que le romantisme ce n’est beau que dans les livres, et que dans la vie ça fait juste mal à crever, parce que les larmes ça donne une sale gueule, et la douleur trop forte, au quotidien, ça fait fuir les gens, parce que les joies ne durent jamais longtemps et le succès ça n’enivre qu’un temps, parce que notre vie n’est jamais que notre vie, on sait qu’elle n’est pas plus enviable qu’une autre. On sait que derrière les sourires il y a parfois les larmes, derrière la politesse l’indifférence, derrière les mots d’autres mots qu’on ne dit pas, derrière les corps apprêtés et enjolivés la pourriture de la mort. On sait que la vie c’est tout ça, et on oublie que la vie des autres n’est jamais que leur vie, à eux aussi.


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