How to Be a Hepburn in a Hilton world

Par Irreguliere

J'avais repéré ce petit ouvrage sur Pinterest (oui, ma vie est un grand drame, même sur Pinterest j'ai des tentations de lecture) et il a tout de suite fait "tilt". Évidemment, Audrey Hepburn est un modèle : sa grâce, son style, son élégance... Je vous ai déjà dit que Breakfast at Tiffany's était un de mes films cultes ? Oui ? Un demi-million de fois ? Très bien. Donc j'ai trouvé ce livre finalement chez Brentano's. En fait, en rayon, il y avait deux ouvrages similaires, et j'ai pris celui qui m'inspirait le plus. Et qui nous propose, donc, de devenir des icônes du chic et de l'élégance, comme Audrey Hepburn, quand toutes les filles ont tendance à être vulgaires, comme Paris Hilton.

Évidemment, vous devez déjà vous demander pourquoi j'ai cru nécessaire de lire un tel ouvrage alors que je suis déjà la classe et l'élégance incarnée (mais pas la modestie, c'est un fait). Disons que j'étais curieuse. Et, comme vous vous en doutez, j'ai été passablement effarée par cet ouvrage, même si par-ci par-là j'y ai trouvé des choses justes. Et je vais vous résumer de manière très précise en quoi consiste ce "guide de développement personnel", qui a mon avis n'est pas à la veille d'être traduit en français, étant totalement américain dans son esprit (comprendre : puritain).

Alors je vais commencer par m'agacer, après ça ira un peu mieux. L'ouvrage donc commence par la question de l'estime de soi, et il se trouve que je suis assez d'accord sur le principe mais pas sur les conclusions de l'auteur. Disons que je suis toujours mise de méchante humeur lorsque je lis (ou entends) des absurdités plaçant l'estime de soi dans la longueur de la jupe et le refus des "one-stand-night" (coup d'un soir). Non, le respect de soi ne passe pas par la chasteté, et j'ai toujours pensé qu'un homme (ou plus généralement une personne) qui jugerait l'intérêt et la respectabilité d'une femme à l'aune de sa "résistance" et de sa "moralité" sexuelle ne méritait même pas que je m'abaisse à le regarder. Donc, lorsque l'auteur énonce cette belle vérité que "s'ils ne nous veulent pas sans le sexe, il ne nous voudront pas avec", j'ai envie de dire exactement le contraire : "s'ils ne nous veulent pas avec le sexe, ils ne nous voudront pas sans". A savoir que si un homme ne respecte pas une femme parce qu'elle a couché avec lui le premier soir, c'est un connard et il l'aurait quand même plaquée après. Dont acte. Mais nous y reviendrons puisque l'auteur y revient aussi.

Passons à la suite, qui rehausse un peu le livre, avec des idées intéressantes : le fait que la classe n'est ni une question de moyens financiers ni de beauté, ok. L'importance du contact visuel, ok. L'importance de la politesse et d'un langage correct, ok (encore que bon, dire qu'il est bien vu de remercier le serveur qui nous apporte notre plat me semble tout de même faire partie des évidences, non ?). L'importance du travail, ok.

L'auteure passe ensuite aux amis, et à l'importance de bien les choisir, et là, j'avoue, j'ai tiqué. Non que ce qu'elle dit ne me semble pas vrai, mais c'est simpliste : disons qu'à mon avis, l'amitié c'est comme l'amour, on ne choisit pas vraiment. Mais admettons.

Ensuite, on passe à un chapitre qui m'a mis les nerfs en pelote vu qu'il revient sur les âneries du début concernant les relations hommes-femmes. Et pourtant, ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas une féministe intégriste, mais là, c'est abusé. Alors il est question, dès le départ, de "laisser l'homme faire le premier pas", et bien sûr ne pas se laisser faire trop vite (à savoir, le repousser). J'avoue que cette prise de position on ne peut plus conventionnelle me laisse perplexe : j'ai en effet du mal avec cette idée sous-jacente que la femme est une sorte de trophée que l'homme doit gagner après de nombreux efforts, qu'il doit bien sûr être le seul à faire. Je ne vois que des inconvénients à cette pratique. Combien d'hommes, peu sûrs d'eux (et c'est touchant, un homme peu sûr de lui) abandonnent la partie devant une femme qui se montre inaccessible, simplement parce qu'ils pensent qu'ils n'arriveront pas à la séduire ? Il faut dire que j'ai toujours pensé que ce "fuis-moi je te suis, suis-moi je te fuis", était une grosse connerie (shame on me je suis vulgaire mais tant pis). Surtout quand l'homme s'amuse à jouer aussi de son côté les inaccessibles (et pourquoi n'aurait-il pas le droit ?) : chacun fuit de son côté pour que l'autre le suive, ça ressemble fort à la chronique d'un échec annoncé ou d'un scénario de comédie sentimentale, mais j'ai peur que dans la vraie vie ça finisse moins bien. Donc je ne suis pas trop d'accord avec ce chapitre, surtout quand l'auteure se vautre avec complaisance dans des considérations oiseuses sur la nature chasseresse de l'homme. Moi je ne suis pas une biche effarouchée, merci. Mais avec de telles considérations, je ne m'étonne plus que certains hommes, quand on leur dit "non", se transforment en pot de glue et insistent, croyant qu'on les repousse par coquetterie. Et ça, c'est désagréable, vraiment... enfin bon, pour terminer sur ce chapitre : comme je dis toujours, l'amour ce n'est pas un gâteau, il n'y a pas de recette infaillible, sinon ça se saurait, et comme dit Carmen, il n'a de toute façon jamais connu de lois !

Ensuite, l'auteure aborde la question de l'importance des apparences et de la tenue vestimentaire dans la première impression que l'on laisse aux autres, et donc de la nécessité de se vêtir avec un minimum d'élégance et de soin. Je suis bien évidemment d'accord sur le principe, et notamment sur la différence entre la mode et le style : le style émane de la personne que nous sommes, et chacune a donc le sien. Pour être brève, dans ce chapitre les conseils sont plutôt judicieux, d'autant que l'auteure termine sur le fait que le seul accessoire réellement indispensable, c'est le sourire, et ça, c'est on ne peut plus vrai.

Le chapitre suivant est consacré au maquillage. Après avoir expliqué qu'il est bon de ne pas se maquiller tous les jours comme si on sortait en boîte de nuit, ce qui est effectivement un conseil judicieux, et fustigé la chirurgie esthétique, elle donne quelques conseils pour mettre en avant ses atouts. Juste, mais pas transcendant non plus...

Le dernier chapitre est consacré à la nourriture, les régimes, le poids, tout ça, de manière globalement juste, mais en enfonçant des portes ouvertes.

Enfin la postface est une espèce de discours à la fois féministe et moralisateur, dont je n'ai pas bien saisi les tenants et aboutissants.

Bref, j'ai globalement détesté cet ouvrage, que j'ai trouvé réactionnaire et pour tout dire puant la morale religieuse, même si c'est bien caché. Je pense que tout est basé sur un malentendu : une définition de l'élégance qui n'est pas la même pour l'auteur et pour moi, car pour moi elle ne se trouve ni dans la longueur de la jupe ni dans la chasteté alors que pour Jordan Christy, si. Un gouffre culturel nous sépare donc... A fuir !

How to Be a Hepburn in a Hilton World

Jordan CHRISTY

Hachette Book Group, 2009