Mondialisation

Publié le 16 mai 2012 par Toulouseweb
Star Alliance fête son quinzième anniversaire.
Le seul vrai géant mondial du transport aérien ? Star Alliance, bien sûr. Une union libre de vingt-cinq compagnies aériennes de tous horizons, artistes absolus du partage de codes élevé au niveau de grand art. Une curieuse non-fusion, non-regroupement au sens capitalistique du terme, mais une vraie cohésion encore que l’on cherche en vain l’expression d’une stratégie commune, impossible à imaginer tant les partenaires poursuivent des objectifs différents. Avec, seul dénominateur commun, la recherche d’une manière inédite de «maximiser» leur chiffre d’affaires par un jeu complexe de complémentarités tous azimuts.
Les alliances «globales» sont trois, et trois seulement : Star, SkyTeam et Oneworld. Ensemble, elles s’arrogent plus de 68% du trafic mondial, un triple rouleau compresseur que les concurrents tentent vaillamment d’éviter. A moins qu’il ne leur soit proposé d’adhérer, moyennant des conditions d’une sévérité commerciale tolérable et à condition d’afficher une réelle bonne santé irréprochable en matière de sécurité.
Star a montré la voie, avant d’autres. Ses membres fondateurs, par ordre alphabétique : Air Canada, Lufthansa, SAS, Thai et United. Vingt autres compagnies ont rejoint ces pionniers d’un nouveau genre pour donner naissance à un ensemble imposant : 20.500 vols quotidiens, 1.293 destinations desservies dans 190 pays, 600 millions de passagers par an. La mondialisation sonnante et trébuchante, encore que la façade, séduisante, cache un ensemble moins harmonieux qu’il n’y paraît à première vue. Les alliances sont faites, en effet, d’un jeu de juxtapositions de lignes, de réseaux, de sacro-saints «code shares» qui reviennent à créer des synergies qui n’avouent pas leur nom.
Cette manière de faire a maintenant prouvé son efficacité en même temps que ses limites tout en conduisant nombre de voyageurs à se perdre dans un magma par moments proprement inextricable. Dans le cas de voyages au long cours exigeant une ou plusieurs escales, la baisse d’attention peut conduire le passager à ne plus savoir quelle compagnie va le mener à bon port. Sauf dans le cas d’accords ponctuels, plus limités dans leurs ambitions, généralement baptisés «joint ventures», notamment la coopération Air France/Delta Air Lines sur l’Atlantique Nord.
Sans cesse reposée, solide leitmotiv des analystes financiers, la question est de savoir si les trois grandes alliances pourraient conduire tôt ou tard à l’intégration, à la fusion de leurs membres. Naîtraient alors des compagnies aériennes véritablement mondiales qui, intervenants régionaux et acteurs low cost mis à part, laisseraient peu de place aux indépendants. Les avis divergent mais, en réalité, l’hypothèse n’est pas réaliste, compte tenu de profondes disparités de statuts, de l’éclatement infini de leur actionnariat, des problèmes posés par les droits de trafic, etc. Dès lors, tout porte à croire que les alliances n’iront pas au-delà de ce qu’elles ont réussi en une quinzaine d’années.
En revanche, leur puissance de feu est telle qu’on est en droit de se demander quelle liberté d’action restera à la portée des indépendants. La Suisse (Swiss), la Belgique (Brussels Airlines), l’Autriche (Austrian Airlines), notamment, ont répondu à cette question existentielle en s’adossant au groupe Lufthansa, Alitalia s’est rapprochée d’Air France-KLM, etc. Reste à savoir, au-delà du «cas» des compagnies du Golfe, comment pourrait évoluer la stratégie de Ryanair et EasyJet. Tout porte à croire qu’elles choisiront de persévérer et d’affirmer haut et clair leur différence, d’autant plus qu’elles en ont désormais les assises et les moyens.
Pierre Sparaco - AeroMorning