Pour un tourisme accessible aux handicapés

Publié le 18 mars 2008 par Philippe Barraqué

Le salon du tourisme bat son plein en ce moment au Parc des Expositions de la Porte de Versailles. L'accessibilité pour les personnes handicapées est confidentielle, par contre l'entrée payante est sans tarif réduit. On cherche un moment l'accès réservé aux fauteuils roulants, tout comme les mamans avec leur landeau.

Dès l'entrée, on a du mal à saisir une cohérence dans ce salon. Qui fait quoi? - La palme d'or de l'incongru aux stands français divisés en région, en ville, avec des interlocuteurs qui rechignent à décliner leur fonction : il y a pêle-mêle des tours-operator, quelques syndicats d'initiatives, des représentants de certains conseils régionaux. Toujours pareille, la France se distingue par sa désorganisation, son morcelage culturel, son esprit étriqué de clocher, son manque d'accueil et de transparence : la panne de joie de vivre d'un peuple en perdition. Que dire aussi du stand "Tourisme et Handicap". Ah! très beau le label, très bien la communication, mais un tuyau creux, vide, après sept années d'existence. L'hôtesse nous tend le malheureux catalogue des Bouches du Rhône où se battent de rares gites d'accueil, les sempiternels Ibis et kyriad hôtel, et la plage du Prado avec ses trois malheureux fauteuils de plage. Franchement, il suffit de consulter les pages jaunes pour avoir ces infos. Reflet de la misère ambiante, rares sont les offices du tourisme qui dans les alentours de Marseille disposent d'un accueil spécifique: le guide précise avec un humour involontaire que dans telle bourgade il y a une toilette accessible mais avec une aide. Faut-il prendre rendez-vous avec le paysan du coin pour avoir le droit de satisfaire ses besoins naturels? - Sûr, les vaches sont mieux loties! Restons un instant dans les métaphores animalières : savez-vous que dans la majorité des guides de tourisme français, on indique plus souvent que les hôtels ou les gîtes sont accessibles aux chiens qu'aux personnes handicapées? - Il vaut mieux être chien, même tenu en laisse, qu'une personne en situation de handicap. Encore une exception française dont on se passerait bien. Et puis il y a les stands étrangers : l'Espagne est accueillante avec sa jeune madrilène qui donne spontanément l'adresse d'une association qui organise des voyages pour les personnes handicapées; les USA sont impeccables, comme toujours, avec leurs croisières où tout est prévu pour tout type de besoins spécifiques (handicap, obésité, troisième âge, intolérance alimentaire, etc.); la Corée est formidable avec cette jeune femme bouddhiste qui nous donne deux posters, un DVD gratuit et un guide complet; l'Egypte est chaleureuse... Mon Dieu que fait-on encore dans ce pays où chaque acte de la vie est un combat perpétuel contre des mentalités archaïques? Résistances d'un passé révolu. Comme nous le disions à un responsable français d'agence de voyages, cela ne coûterait rien de rajouter une ligne sur le questionnaire destiné aux professionnels du tourisme concernant l'accessibilité des lieux. Beaucoup de personnes en situation de handicap n'ont nullement envie d'être parquées dans des centres, des gîtes, des hôtels qui leur sont particulièrement réservés. Nous demandons qu'on tienne compte du handicap, que des équipements soient prévus à cet effet mais intégrés dans un cadre normal. Le chien a sa gamelle bien au chaud dans son trois étoiles, nous demandons la même chose pour nos fauteuils et pour nos âmes épicuriennes! 

Philippe Barraqué

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