La droite se droitise

Publié le 18 mai 2012 par Omelette Seizeoeufs
 

Repartons de cette citation, de Rioufol, que j'ai mentionnée dans un billet précédent :

En réalité, le scrutin était gagnable, dans une société convertie majoritairement aux valeurs de la droite. Mais deux millions de Français ont préféré voter nul ou blanc, souvent dans le but de sanctionner un président ayant redécouvert trop tardivement son intérêt pour la nation.

Rioufol voit dans la victoire de François Hollande la preuve que la société "se droitise", puisque les gens qui auraient pu voter droite ont préféré voter blanc. La logique est imparable, vous en conviendrez. Seule une victoire de Mélenchon aurait pu signifier un plus radical virage à droite.

Dans le même billet, j'ai essayé de réfuter cette affirmation, elle-même fondée sur la supposition que La Droite puisse réunir le spectre allant des bayroutistes qui ont voté blanc (et non Hollande comme Bayrou) au sarkozysme libéré de la croisade héroïque des quinze derniers jours de sa campagne, en passant par le Front National et la Droite Populaire. La question mérite qu'on y retourne.

 

L'idée, dans sa forme la plus simple, est qu'en additionnant les votes blancs, les votes frontistes, les votes bayroutistes et les votes UMP, on arrive à plus de 50 %. Donc la droite a gagné. L'idée, c'est qu'il suffit d'étendre l'UMP sur ses deux bords pour finir par représenter tout ce qui n'est pas la gauche farouche. Au moment où Jean-François Copé a annoncé l'introduction des mouvements au sein de l'UMP, je l'ai pris pour le signe que l'ensemble était sur le point de craquer, et qu'il fallait donner un peu plus de liberté aux uns et aux autres. Avec un peu recul, il commence à devenir clair que la manoeuvre est plus offensive : le but est certainement de trouver une structure à partir de laquelle l'UMP peut aspirer un pourcentage important du vote contestataire-xénophobe-populaire, "siphonner" disait l'autre, et le garder en orbite pour les rendez-vous de second tour. Car, pour l'UMP, le Front Nationaliste est bourré de qualités, sauf qu'il ne s'aligne jamais derrière l'UMP.

D'où la thèse lancée dans l'autre billet : la société n'est pas droitisée, mais il y a désormais un groupe d'électeurs assez important qui est désormais en position de faire basculer bon nombre d'élections. La force politique qui arrive à mettre le grappin dessus aura un énorme avantage pour toujours.

 

Habituellement on dit que les élections se gagnent au centre, puisque c'est là où sont les indécis, ce petit cinq pourcent qui peut faire basculer l'ensemble. L'analyse UMP est en train de changer. Ils sont forcément en train de se dire qu'ils peuvent lâcher les indécis du centre, car à droite – très à droite – il y a une population beaucoup plus importante qui, en plus (et ça, c'est le truc génial), ne votera jamais à gauche. Ou du moins ils en sont persuadés.

Ce n'est donc pas la société dans son ensemble qui se droitise. C'est la géométrie électorale qui se modifie et qui va pousser l'UMP vers sa droite. Il y a de bonnes raisons pour penser que cela ne marchera pas, mais ils ont cinq ans pour trouver une solution.