Le plateau de fromages est souvent le parent pauvre d'un bon repas. Noëlle Paolo, responsable des études consommateurs de la Collective des Produits laitiers nous a fait part au cours de la table-ronde du samedi matin de la tendance de présenter un fromage unique, mais beau. On peut espérer qu'il s'agisse alors d'un AOC.
Les producteurs ne doivent pas désespérer pour autant : la moitié des actes de consommation ont lieu à l'apéritif, ce qui réactive la question de la présentation. A ce titre l'exposition Design sur un plateau, proposée par la Milk Factory, et présentée dans la grange à Dîmes, pouvait donner de nouvelles idées. J'en ai retenu quelques-unes.
Le designer y répond à sa manière avec une seconde proposition (non photographiée). Fromaj 2.0 possède, sur chaque couvercle, un code QR lisible par un smartphone et renvoyant vers la page « fromages » du site www.produits-laitiers.com. On peut y glaner des informations sur la provenance du fromage, des suggestions d’accord, des propositions de recette ou des commentaires nutritionnels, tout cela en diverses langues. Le fromage qui parle devient avec lui réalité.
Quand je me "limite" à un seul fromage, je varie alors les accompagnements. Avec par exemple un fruit fruit, un confit, ici le "pomme et poire au pommeau" de Fauchon, un beurre de qualité, d'Isigny lui aussi, et un pain croustillant.
Que boire avec les fromages normands me direz-vous ? Un cidre, AOC bien sûr, je n'ai plus aucun doute sur cet accord depuis que je l'ai expérimenté. Et j'ai en mémoire la jolie formule que Félix Leclerc a écrite dans le Calepin d'un flâneur : chaque pomme est une fleur qui a connu l'amour ...
Ce n'est pas Dominique Hutin, journaliste à France Inter, animateur de l'émission "On va déguster", qui dira le contraire. Ardent défenseur du cidre du Cotentin, avouant un faible pour l'extra-brut. On devrait d'ailleurs parler de cette boisson au pluriel, comme on le fait des vins. Et la proposer en magnum pour l'entourer d'une valeur festive et susciter l'étonnement.
On pourra aussi expérimenter un cocktail à base de Calvados comme je le proposais il y a quelques jours. Le Calvados s'accorde parfaitement avec le Pont l'évêque.
Sans les AOC nos campagnes perdraient la variété de leurs paysages qui s'uniformiseraient sur une forêt unique. Les consommer revient donc à un acte politique et écologique. Puisque AOC comme AOP rendent l'économie indélocalisable.
En version multiple on suit les conseils d'un spécialiste comme Gérard Petit. Il n'a pas son pareil pour pulvériser la légende attribuant l'invention du camembert par une certaine Marie Harel dont il nous apprend qu'il s'agissait de faire plaisir à un américain dans les années 1920.
Il nous a expliqué aussi que le lait cru actuel était moins chargé en bactéries que le lait pasteurisé d'il y a 35 ans et qu'il était par conséquent aberrant d'en avoir peur. Il nous a alerté sur les crottins faits à Chavignol avec du caillé importé du Chili, ou sur les camemberts moulés en Normandie avec du lait venant de Pologne. Il nous a appris que l'AOC Pont l'Evêque comportait quatre formes différentes. Il a pointé les différences entre brie de Meaux et de Melun, me donnant envie de servir ce dernier sur mon plateau.
Il connait tous les fromages. Ses avis avisés ont pimentés l'atelier sur les fromages AOP et vins AOC d'Auvergne animé par Véronique Hucault.