Les entreprises françaises doivent se préparer au risque d’un choc violent

Publié le 30 mai 2012 par Copeau @Contrepoints

Selon les calculs de Christian Saint Étienne, professeur au CNAM, le choc fiscal de François Hollande devrait représenter plus de 14% de l’excédent brut d’exploitation des entreprises françaises, soit le choc fiscal le plus important qu’elles aient eu à subir depuis la deuxième guerre mondiale.

Par Jean-Jacques Netter.
Article publié en collaboration avec l’Institut des Libertés.

Aucune proposition concrète n’est sortie du sommet du G8 pour relancer la croissance. Cela parait logique quand on examine les grandes lignes des plans qui s’affrontent en Europe. La France a une position curieuse. Sa stratégie consiste à soumettre les entreprises à un choc fiscal violent. Si le programme de François Hollande est appliqué en totalité, elles vont avoir en effet à payer 32,7Md€ de hausses d’impôts, 13Md€ de hausse de cotisations sociales, soit 45,7Md€ de prélèvements supplémentaires. Selon les calculs de Christian Saint Étienne, professeur au CNAM, cela devrait représenter plus de 14% de leur excédent brut d’exploitation, soit le choc fiscal le plus important qu’elles aient eu à subir depuis la deuxième guerre mondiale.

Ces dispositions montrent une fois de plus que la classe politique et médiatique n’a pas l’air de se rendre compte que les profits des PME ne sont pas ceux des sociétés du CAC 40, qui pour l’essentiel sont réalisés hors de France ! En attendant, les outils de l’État-providence continuent d’être démolis par la mondialisation : la solidarité est tuée par un marché dual du  travail avec ceux qui sont dans le système et ceux qui n’y sont pas (les jeunes). L’élitisme républicain est tué par une école en échec. L’innovation est tuée par l’égalitarisme des chercheurs. La classe moyenne est tuée par l’atrophie de l’industrie…

Le coup d’arrêt à l’endettement public ne semble pas clairement sur les rails. Pourtant il devrait mettre un terme au creusement de la principale inégalité, qui est l’inégalité intergénérationnelle. Il appartient à la génération qui est au pouvoir de régler les factures de ses excès, et non à ses enfants et petits-enfants. Le rôle des politiques est de nous y préparer, ce qui n’est pas facile dans un pays où près de la moitié des électeurs sont fonctionnaires ou retraités !

L’Allemagne, qui a très bien réussi avec ses PME , les fameuses Mittelstand allemandes particulièrement performantes à l’exportation, prépare un plan en six points pour soutenir la croissance dans les pays en difficulté de la zone Euro. Il prévoit notamment la création de zones franches dans les États touchés par la crise afin d’attirer les investisseurs étrangers. Parallèlement les États devront réformer leur marché du travail sur le modèle allemand.

La Grande Bretagne a comme d’habitude une stratégie pragmatique qui part de l’idée  que ce sont les petites entreprises qui sont susceptibles de créer le plus rapidement possible des emplois. C’est pourquoi elle privilégie les PME avec la  mise en place du Small Business Act, qui consiste à encourager les entrepreneurs par des avantages fiscaux au moment du lancement de leur entreprise, les investisseurs par des exonérations de plus value jusqu’à un certain montant et les conseiller avec le Small Business Service, qui est le guichet unique de l’administration pour aider les entrepreneurs dans leurs démarches. Cette mesure parait être efficace, car on peut constater actuellement qu’un flux d’exilés fiscaux britanniques sont en train de revenir dans leur pays pour créer des entreprises et payer des impôts dont la tranche marginale vient d’être baissée !

Le sort de l’Europe et la pérennité de l’Euro dépendront en partie du résultat des élections grecques du 17 juin prochain. Faute de vision claire, les investisseurs sont suspendus aux petites phrases des dirigeants européens.

La situation préoccupante ne justifie de sombrer totalement dans le pessimisme. Selon Kenneth Rogoff, l’économiste directeur de la recherche du FMI,  qui a rencontré un très grand succès avec son livre « This time is different. Eight centuries of financial folly », était un des invités du séminaire Cheuvreux à Londres, on pourrait avoir de bonnes surprises, car la globalisation oblige inévitablement tous les pays à s’adapter  et la technologie peut apporter des ruptures inattendues qui permettent de résoudre des problèmes jugés insolubles…

La vraie bonne nouvelle c’est peut-être un article du Financial Times intitulé « La mort des actions ». La dernière fois que ce titre avait été utilisé c’était en 1979. Et le marché américain avait progressé de façon quasi ininterrompue pendant 20 ans !

Marchés actions : la réindustrialisation de l’Amérique est engagée

En Europe, les niveaux de valorisation sont attractifs à horizon dix ans nous a expliqué Russell Napier de CLSA. Le problème, dit-il, c’est pour l’année qui vient… Pour Christopher Potts , le Chef Économiste de Cheuvreux, l’Europe est actuellement dans une ambulance, les États-Unis ne sont pas pour une fois au cœur des angoisses et des peurs des marchés. Quant à la Chine, elle est comme un éléphant dans un magasin de porcelaine. Il pense que les marchés européens devraient remonter à partir du troisième trimestre.

En Allemagne, les salaires des employés affiliés au syndicat IG Metall seront augmentés de 4,3% sur les 13 prochains mois. C’est une nouvelle positive pour le reste de l’Europe. Elle intervient au moment où l’indice PMI manufacturier  se retrouve à 45 soit son plus bas depuis 35 mois. Jens Weidmann, le patron de la Bundesbank reste toutefois extraordinairement attaché à ce que la politique d’austérité de sa banque centrale soit poursuivie.

En Grèce, les chiffrage sur le coût d’une sortie de la Grèce de l’Euro se multiplient. Ils vont jusqu’à 450Md€ pour David Hauner de BOAML. Il est vraiment sidérant de voir que l’Europe n’aura pas su régler à temps le problème de la Grèce qui ne représentait que 2% du PIB européen. Si la Grèce sortait de l’Euro, aucun pays ne l’imiterait pense néanmoins Bruno Cavalier, responsable de la recherche économique chez Oddo Securities.

L’Italie est dans une récession dure puisque son PIB devrait baisser de 2% en 2012 et de 1% en 2013. Le seul facteur positif est l’amélioration de la balance commerciale. Tito Boeri, professeur d’économie à l’Université Bocconi à Milan, regrette que la réforme du marché du travail n’ait pas été assez loin. Pour lui, l’évolution des salaires doit être liée à celle de la productivité.  Il pense que Mario Monti restera à son poste jusqu’en avril 2013.

Les États-Unis sont en train de se réindustrialiser à grande vitesse grâce à un coût du travail en chute dans certains États : 20$ de l’heure en Louisiane ou Alabama contre 34$ dans les États du nord et 46 à 47$ en Europe. Grâce au recours massif aux gaz de schiste leur coût de l’énergie va baisser fortement et diminuer leur dépendance par rapport aux pays producteurs de pétrole. Nous sommes  en train d’assister à un retour de la suprématie américaine pense Christopher Potts de Cheuvreux. Ce qui change, c’est qu’en plus du crédit bon marché, on va avoir du capital bon marché. Cela signifie que la surperformance des actions américaines va s’accélérer car c’est pratiquement le seul pays à pouvoir offrir de la croissance (technologie) et de la sécurité.

Marchés obligations : baisse du rendement des OAT françaises

En France, le rendement des obligations à dix ans (2,41%) a atteint son plus bas niveau jamais constaté. Il ne faut pas en tirer de conclusions définitives sur la qualité de de la dette française car le niveau des Credit Default Swap est encore supérieur à 200 points de base. En Allemagne, les obligations à 10 ans offrent un rendement de 1,36%. Le prix des Credit Default Swap sur les obligations allemandes est à 100 points de base, soit moins que celui des obligations japonaises, mais plus que sur les titres britanniques et américains. Les allemands sont exaspérés par l’intransigeance du Président français. Bild Zeitung dans son éditorial écrit : « Il y avait un couple Merkozy. Merkhollande n’existe pas… »

Matières premières : baisse du pétrole, hausse du sucre

Le pétrole se retrouve en dessous de 90 dollars pour la première fois depuis octobre dernier. C’est une bonne nouvelle pour la France.

Le cours du sucre est tombé pour la première fois depuis deux ans sous le seuil de 20 cents par Livre en baisse de 45% depuis le plus haut de 2011. La situation s’explique par le fait qu’il y aura une surproduction de 7 à 8 MT pour la campagne 2011-2012 et encore de 4 à 8MT pour 2012-2013. Il faudra surveiller la « parité éthanol » qui est le niveau où les producteurs brésiliens ont plus intérêt à vendre leur sucre aux producteurs d’éthanol qu’à l’industrie agroalimentaire. Le niveau, avec la baisse du Real se situe à 18 cents…


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