Free Tibet, free Beijing

Publié le 19 mars 2008 par Chondre

Ce billet sera le dernier consacré à Pékin. Promis, juré, craché.

Comme déjà abordé dans de précédents billets*, la ville est en pleine mutation. Mutation architecturale, mais également mutation économique et idéologique. La ville se modernise. Des milliers de petits boulots vont progressivement disparaître, du poinçonneur au petit épicier de quartier. La ville a été redessinée. Le centre, formé de la place Tien An Men et de la cité interdite, est maintenant entouré de six énormes boulevards périphériques. Le dernier est situé à environ vingt kilomètres du centre. Un septième est à l’étude. La ville est véritablement labourée par le bitume et les voitures. On peut observer jusqu’à douze voies en plein centre ville (pratique pour faire défiler les chars), sans compter l’espace réservé aux bicyclettes. D’après les autorités, un millier de nouvelles voitures apparaissent chaque jour. Selon le comité international olympique, la pollution à Pékin ne constitue pas une menace immédiate contre la santé des athlètes mais elle pourrait limiter le niveau de performance lors des prochains Jeux olympiques. Il est évident que les représentants de l’honorable institution n’ont jamais tenté de courir à la fraiche dans les rues de la ville.

Officiellement, la pollution ne représente pas un problème. Les industries polluantes ont été déplacées. Les jeux de 2008 seront sous le signe de l’écologie ou ne seront pas. Un label environnement a même été crée. La ville a vu fleurir des poubelles à doubles compartiments afin d’accentuer le recyclage des déchets. Il est amusant de les voir parfois vider dans la même benne à ordures. Le principe est le même: On fait croire que. Toujours d’après le gouvernement, “Après des années d’efforts, et en dépit de l’exploitation intensive des ressources et de la production croissante de matières polluantes, la dégradation de l’environnement a été stabilisée. Le traitement de la pollution dans certaines régions a obtenu des premiers succès. La qualité environnementale de certaines régions et villes a été améliorée. Le volume des déchets industriels a diminué et le public est davantage sensibilisé”. Ces conclusions feraient certainement sourire les centaines de milliers de victimes de la construction du barrage des trois gorges sur le Yangse ou celles des dernières intempéries meurtrières.

Côté apparence, la ville doit également montrer sa puissance financière. Un World Trade Center a été construit à l’est de la ville, non loin de la rue de la soie. Tout y est gigantesque. Un ami architecte me confiait récemment qu’il était très excitant de travailler en Chine. Il y a de l’argent et les bâtisseurs sont prêts à tout pour montrer qu’ils ont la plus grosse et la plus dure. Même si le clinquant voire le mauvais goût sont inévitablement présents, on retourne une audace architecturale disparue depuis longtemps dans les pays occidentaux. On défie l’équilibre et les lois de la pesanteur, un peu comme dans le quartier de Pudong à Shanghai. Cependant, beaucoup de constructions semblent bâclées ou mal finies, même si certaines exceptions demeurent, comme la superbe tour Jinmao. Rouge Cerise pourrait certainement mieux en parler que moi.

Enfin, les jeux sont avant tout politiques. Le parti a commencé à dégainer en accusant les rebelles tibétains de vouloir saboter les jeux. Wen Jiabao, le premier ministre chinois, a mis sur le dos du dalaï-lama la révolte de Lhassa. Le gouvernement aurait en sa possession des preuves accablant le dangereux leader tibétain. Se servir de valeurs universelles pour accentuer génocide culturel et verrouiller encore plus le pays, tel est le résultat de l’attribution des jeux à la Chine (si la Russie avait obtenu les jeux, aurait-elle tenté de rayer de la carte la Tchétchénie ?). Deux cent vingt millions d’internautes chinois sont invités à fermer leurs gueules. En attendant, si certains journalistes sont invités à pondre des sujets à la gloire des jeux, les autres sont persona non grata au Tibet. Côté CIO, on se félicite de l’absence d’appel au boycott. Comme le dirait encore une fois ma tante Agathe, ce n’est pas une fois que l’on a fait dans les draps qu’il faut serrer les fesses. La messe est dite. Les jeux ont été attribués à achetés par la Chine depuis des années, de nombreux contrats sont en cours et le pays est devenu la deuxième puissance économique mondiale. Pourquoi donc politiser les jeux pour de petits tibétains qui puent, qui n’achètent pas de sacs Vuitton ni de Peugeot ou ne s’éclairent pas grâce à nos belles centrales Areva?

En attendant, Alain Delon dénonce le sort des chiens, chats, ours, animaux à fourrure ou de consommation brutalisés, dépecés vivants, mutilés, cruellement sacrifiés, et appelle les autorités chinoises à lutter contre la maltraitance infligée aux animaux domestiques.






Au revoir les poinçonneurs



 
 
* Pour celles ou ceux qui souhaiteraient se rendre à Beijing, voici un aperçu du coût de la vie pour un touriste lambda.

10 Yuans valent environ 1 Euro.

Ticket bus 1 yuan (ou RMB),
Ticket métro 2 yuans,
Entrée cité interdite/palais ete 40/50 Yuans, plus élevé en haute saison,
Course moyenne en taxi 15 Yuans (minimum 10 Yuans),
Course Taxi aéroport-centre ville 70 Yuans,
Course Taxi palais d’été-centre ville 50 Yuans,
Un costume sur mesures 800 Yuans,
Brochette de fruits caramélisés, 5 Yuans,
Bouteille Coca Light 600 ml 2,8 Yuans,
Un restaurant moyen entrée plat dessert 30-40Yuans,
Un CD 30 Yuans,
Un DVD 40 Yuans,
Un faux** DVD, 10 Yuans (déconseillé)

**La Chine dénonce officiellement le commerce du faux mais ne fait rien pour l’interdire. Un centre commercial est même consacré à la vente de tels articles à Beijing, tout comme le Fake Market de Shanghai. On y trouve de tout, de la fausse chemise Paul Smith, aux DVD/CD, sacs Vuittongucci, chaussures Saint Laurent, slip Calvin Klein ou montres Breitling. A voir pour l’ambiance de foire, mais éviter d’acheter des articles de contrefaçon.