Prometheus, de Ridley Scott

Publié le 06 juin 2012 par Plugingeneration @Plug_Generation

Entertainmentheus  
Par Meta W.
Retour aux fondamentaux pour Ridley Scott, ceux qui lui ont fait connaître la gloire : les films de science-fiction. Après le décevant Gladiator 2 : la résurrection de Maximus en Robin des Bois, le réalisateur américain is back to basics avec son Prometheus. Et il envoie le pat(h)é.
Rien que la consonance latine du titre écrase le spectateur abasourdi, comme un singe devant un monolithe imposant. Promesse d’une odyssée. Le mythe de Prométhée, celui de la création de l’humanité et de l’apport de la connaissance par un titan, est censé parler à tous les hommes en quête de leurs origines. En tout cas, ça parle à nos protagonistes, qui, suite à une découverte archéologique, parviennent à monter une expédition scientifique financée par une grande compagnie. A bord du Prometheus, nos héros se rendent sur une lune lointaine à la découverte de leur Prométhée dans une grande épopée intergalactique. J’arrête de tout vous raconter, allez voir le film si ça vous intéresse. Il en vaut la peine.Les images sont magnifiques, on sent que Ridley Scott maîtrise l’art du blockbuster et des effets spéciaux. Et puis, il se fait plaisir avec la SF. Une quête originelle, un décor déshumanisé, des références à foison (AlienThe Thing…). Petite parenthèse sur les références : quelqu’un peut-il me dire pourquoi la tête sculptée de l’extra-terrestre ressemble à celle de Marlon Brando dans Apocalypse Now ? Nan sérieux, c’est un hommage à Coppola ou est-ce un pur hasard si le créateur de l'humanité ressemble au colonel Kurtz ?Enfin, la plupart des personnages sont bons. Charlize Theron en commandante froide et implacable, Idris Elba en capitaine de vaisseau drôle et héroïque, Guy Pearce en vieillard mégalo, et surtout, Michael Fassbender en androïde est tout simplement parfait. En résumé, un bon film, bien ficelé et bien réalisé. Et puis bon, la scène de la césarienne est énorme, mais je ne développe pas plus, j'ai pas envie que vous vous évanouissiez.
Mais Ridley Scott peut-il se contenter d’un bon film ? Non, un réalisateur aussi ambitieux ne peut se contenter de nous offrir un bon divertissement. L’ambition de Prometheus n’est pas celle d’Avatar. James Cameron pouvait se contenter de nous offrir de belles images sur une histoire niaise, car l’univers de son film n’appelait qu’à cela. Là, Ridley Scott s’attaque à un sujet beaucoup plus ambitieux, on parle de la Genèse quand même. On ne peut pas se contenter de belles images et d’un discours niais sur la foi. Il faut une ambiance, une tension, un mythe. Mais ça, Ridley Scott ne le peut pas. Ou plutôt, il ne le peut plus. Car oui, le frère de Tony à un jour été capable de réaliser un beau film de science-fiction, le genre de réalisation qui bouleverse le spectateur par la force de son propos. Ca s’appelait Blade Runner, on était en 1982, et c’était beau. C’est de l’ambiance de son précédent film que Ridley Scott aurait dû s’inspirer, cette ambiance mélancolique, en proie au doute permanent. L’appartement de Rick Deckard à Los Angeles est beaucoup plus désolant que la planète où nos chercheurs atterrissent. Les questions métaphysiques transcendent le film de 1982, là où elles sont reléguées au second plan dans celui de 2012.Au minimum, Ridley Scott aurait pu nous faire un film qui fait peur. En science-fiction, si le spectateur n’est pas bouleversé par la découverte des héros, la base c’est de lui filer les chocottes. Et là encore, l’Américain avait réalisé un film qui reste une référence en la matière : Alien. Le scénario avait de quoi nous foutre les jetons, car on ne sait vraiment pas ce qui se trame : qui sont nos créateurs ? Quelle est la menace ? Et bien non, aucune angoisse, tout juste de l’attente et de la violence devant la tête de Marlon Brando. On sent que le brillant réalisateur des années 1980 a été chassé par le maître du spectacle des années 2000.
Prometheus est un bon film, du très grand spectacle. Mais trop loin du chef-d’œuvre. Le retour aux sources a montré que Ridley Scott n’était plus capable de nous illuminer. Au moins nous divertit-il. Il ne sait plus que réaliser de grandes scènes d’actions, lui qui savait si bien filmer la solitude et l’interrogation métaphysique.


Complément d'enquête : 


Une femme, un robot, un titan et des aliens
Par Plugger Master, 
Prometheus, avec un nom aussi pompeux Ridley Scott semblait déjà nous annoncer un méga-blockbuster posthumain de la mort qui tue. Les courtes bandes annonces diffusées en cinéma, qui mettaient en scène les images chocs du film en fondu successif, rythmées par des cors lourds et répétitifs, laissaient entendre que le film allait vous en mettre plein la vue, plein le cerveau et plein les tripes. Il s’annonçait comme un film mythique, à la hauteur d’un 2001. L’ambition était démesurée, et sans jeux de mots faciles, prométhéenne ! Mais je pense qu’il faut toujours se méfier des films qui mettent tous leurs espoirs dans « l’avant » du cinéma (explication dans un de nos articles), ca ne présage rien de bon pour le « pendant » et encore moins pour « l’après »… Toujours est-il que ca m’a amené à aller le voir. Plein d’espoir pour un sujet qui me passionne (vous l’aurez sans doute remarqué à mes derniers articles), je me suis pointé au cinoch, lunettes de soleil 3D visées sur le front, prêt à me faire violer cinématographiquement. Mais avec le recul je crois que j’aurais pu me contenter du trailer wagnérien du début.
Pourtant beaucoup de choses sont intéressantes dans le dernier opus Scott. Prométhée bien entendu, le mythe du titan qui amena le feu sacré sur terre, est LE thème du film. Du moins en apparence. Car beaucoup d’autres thèmes viennent se greffer pour finalement ne produire qu’un patchwork imbuvable. Il y a la question de la religion, du transhumanisme, des manipulations génétiques, de la place de l’homme dans le cosmos, le tout sur fond d’aliens toujours aussi dégueulasses mais déjà usés jusqu’à la moelle par de nombreux autres films, et par Scott lui même, rien d’innovant donc.  
Les thèmes métaphysiques se mélangent à des thèmes beaucoup plus terre à terre. Du coup l’esthétisme du film oscille entre un 2001 au début et un Alien VS Predator à la fin. Michael Fassbender qui se balade seul dans le vaisseau, apprenant des langues lointaines, faisant du sport, regardant des films cultes (Lawrence d’Arabie) dans un décor à l’esthétique cosmique épurée mais classieuse, sur fond de musique classique, fait évidemment penser à Kubrick. Au début on y croit, passé 30 minutes le soufflé retombe, on est bien dans Alien 30ème du nom. Tous les thèmes ambitieux se mélangent à une simple histoire d’extraterrestres qui butent tout ce qui bouge. Ce que Scott nous raconte, un peu à la Rousseau ou La Fontaine, c’est une fable un peu bancale et ridicule : « la femme, le robot, le titan et les aliens ». En gros pour résumer, le titan créa la femme qui à son tour créa le robot. Dans sa quête des origines la femme voulu savoir qui l’avait créée, elle s’engage dans une aventure cosmogonique des plus excitante, mais ce qu’elle découvre c’est finalement un titan qui voulu revenir sur terre pour détruire sa propre création (le déluge biblique ?). Le robot quant à lui ne s’intéresse pas à ses origine, il le dit lui même « que diriez-vous si vos pères se fichaient de vous ». Par vengeance, ou une quelconque autre raison (les robots n’ont pas de sentiments…), il implante dans la femme un alien (enfin par l’intermédiaire de son mari infecté). La femme arrive à le sortir de son corps à coup d’opération à ventre ouvert. Le monstre est libre. Et c’est cet alien qui en mangeant le titan va mettre au monde une espèce nouvelle, les Aliens (tout est dans tout). C’est horrible ! Mais la femme se questionne, les titans l’ont créée, mais qui a créé les titans ? Il y a donc bien un Dieu ? Elle se décide à chercher plus loin ses origines dans le cosmos, avec qui ? ben le robot. Et là on se dit que Scott ne comprend plus rien à ce qu’il fait. Qu’il s’est laissé dépassé par ses envies de frissons et qu’il a laissé tombé un sujet qui aurait pu être traité avec magnificence. La référence à 2001 s’efface vite, on le regrette. Le titan créa l’homme qui a son tour créa le robot, le monstre résultant de la fusion du gène humain avec une bactérie extraterrestre tue le titan, ce qui crée une nouvelle espèce à son tour. La boucle est bouclée. Le serpent se mort la queue. Et Scott rigole salement, parce qu’il s’est laissé dépassé par ses envies de frissons dégueulasses. Nous on pleure pour lui, parce qu’on pensait qu’il allait renouer avec Blade Runner au lieu de Robin des Bois ou Aliens 10 000. Dommage.

Schéma récapitulatif de la Fable Scottienne