Rio+20 : François Hollande appelle les Etats à se rassembler pour gagner la "grande bataille pour l'environnement"

Publié le 22 juin 2012 par Bioaddict @bioaddict

"J'inscris le développement, l'environnement, la lutte contre la pauvreté comme grandes priorités de mon quinquennat" a déclaré François Hollande ce mercredi 20 juin lors de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable Rio+20 à Rio de Janeiro au Brésil. Voici l'intégralité de son discours. ¤¤ François Hollande lors de la séance plénière de la conférence des Nations Unies sur le développement durable Rio+20

"Monsieur le Président,
Monsieur le Secrétaire général,
Madame la Présidente,
Mesdames et Messieurs les chefs d'Etat et de gouvernement,
Mesdames, Messieurs,

Je remercie d'abord la présidente du Brésil, Dilma ROUSSEF, pour l'accueil qu'elle nous réserve ici pour cette conférence. Je salue l'action qu'elle mène pour le Brésil, qui est une référence aujourd'hui aussi bien au nord qu'au sud en matière de développement.

Mais je tenais personnellement à venir ici pour cette conférence, au nom de la France. D'abord par ce que c'est un enjeu décisif pour la planète et que la France doit être l'une des nations qui montrent l'exemple.

Je voulais aussi, ici, prendre des engagements pour mon pays, tout en favorisant autant qu'il a été possible la discussion et la négociation dans la déclaration finale.

Je voulais aussi tenir un langage de vérité et de volonté. Vérité d'abord sur les résultats, tels que nous pouvons les imaginer aujourd'hui, de notre conférence.

Il y a eu des avancées. J'en vois cinq : d'abord une feuille de route pour les objectifs du développement durable. Ensuite un renforcement de ce Programme auquel nous tenons tant des Nations Unies pour l'environnement. Il y a eu un appel à travailler à un accord sur la préservation des océans. Un débat s'est engagé sur l'économie verte. Et il y a eu un accent qui a été mis sur le social et sur la lutte contre la pauvreté. Ce sont des résultats appréciables !

Ils tiennent pour beaucoup à la capacité qui a été la nôtre de trouver des compromis mais aussi à la mobilisation de la société civile que je salue. Sans elle, nous n'aurions pas la prise de conscience que nous connaissons aujourd'hui. Et la stimulation, l'incitation pour aller plus loin.

Mais puisque je suis venu tenir un langage de vérité, je dois vous dire que ces résultats, aussi appréciables soient-ils, sont en dessous de nos responsabilités et de nos attentes.

Je regrette d'abord que nous n'ayons pas abouti à la création d'une Agence spécialisée des Nations Unies sur l'environnement. C'est un projet auquel la France est très attachée. Parce que c'est la condition du multilatéralisme, parce que c'est la meilleure façon de pouvoir mettre tous les sujets dans la même organisation et de les traiter en même temps et dans le même lieu, et enfin parce que cette agence pourrait se situer à Nairobi, en Afrique, et l'Afrique doit avoir la confirmation de son rôle dans le monde.

Je regrette également que la proposition d'instaurer des financements innovants, même si le communiqué final en fait mention, n'ait pas trouvé de traduction concrète. Ces financements sont indispensables. Chacun connait ici la situation budgétaire de bon nombre de nos pays et notamment parmi les plus développés. Et donc si nous n'ajoutons pas des financements aux aides qui sont aujourd'hui prévues, nous ne pourrons pas atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés. La France reste donc déterminée à instituer avec les Etats qui le voudront, avec les Européens, avec d'autres, une taxe sur les transactions financières.

Et je prends l'engagement que si cette taxe est créée, une partie de ces revenus sera affectée au développement.

Langage de vérité parce que les urgences sont là, parce que les émissions de gaz à effet de serre n'ont cessé d'augmenter jusqu'à atteindre en 2011 un record ; parce que les océans se sont acidifiés et appauvris ; parce que la biodiversité s'est effondrée ; parce que l'urbanisation progresse partout et parfois réduit à la misère des millions d'hommes et de femmes qui s'entassent aux portes des grandes villes ; parce que les inégalités se sont creusées dans les pays riches, mais aussi entre les pays développés et les autres. Donc nous avons besoin d'un sursaut, ici à Rio nous en avons pris conscience.

Mais nous avons une nouvelle frontière à franchir. Il y a d'abord des changements à conduire pour permettre l'accès de tous à l'eau, à l'énergie et je salue le programme qui a été mené pour atteindre cet objectif, parce que nous devons assurer la sécurité alimentaire, parce que nous devons éviter que les terres arables, les terres cultivables disparaissent progressivement ou soient achetées au détriment de l'indépendance alimentaire, parce que nous devons conduire la transition énergétique, diversifier les sources d'énergie. Voilà l'agenda qui doit être le nôtre.

Par rapport à cette grande cause, prenons plusieurs engagements.

D'abord, personne ne peut gagner seul contre les autres la grande bataille pour l'environnement. Ou nous la gagnons ensemble, ou nous la perdrons ensemble.

Le second engagement, c'est de ne pas opposer le nord et le sud, non pas que nous n'ayons pas sur certains sujets des positions différentes, mais le développement durable, c'est une cause planétaire, c'est une question vitale pour le monde entier et il n'y a pas les uns contre les autres, il y a tous ensemble.

Et puis le dernier engagement, c'est de considérer que dans la crise que nous traversons, il n'y a pas que la crise financière, il n'y a pas que la crise économique, il y a aussi la crise écologique. Et pour sortir de la crise, nous avons besoin de plus de priorités données à l'environnement et au développement. Nous lutterons contre la crise avec tous les moyens de la régulation.

Enfin, le développement durable n'est pas une contrainte. C'est un levier. Ce n'est pas non plus un outil de protection pour les plus favorisés contre les autres mais de promotion d'une conception de l'humanité.

Voilà pourquoi, je voulais venir ici à Rio, vous donner la position de la France, les engagements de la France, la conception de la France. Je viens de prendre les responsabilités de mon pays. Je suis au début de mon mandat. J'inscris le développement, l'environnement, la lutte contre la pauvreté comme grandes priorités de mon quinquennat.

Pour un responsable public, et nous le sommes tous à des niveaux différents ici, il y a plusieurs façons d'être utile. Etre utile, ce n'est pas simplement servir les intérêts de son pays, ce n'est pas simplement porter les préoccupations de son continent, ce n'est pas non plus défendre seulement le présent, l'urgent, l'immédiat. Etre un responsable public utile, c'est d'être capable de parler au nom de la planète et de préparer l'avenir.

Nous sommes tous conscients ici, et je ne vous apprendrai rien, que nous sommes mortels mais notre dignité d'hommes et de femmes, notre condition d'être humain, c'est de permettre à d'autres de vivre après nous et mieux que nous. Tel est le sens de ma présence ici.

Merci."

Discours du Président de la République François Hollande
RIO+20 - Conférence des Nations Unies sur le développement durable
Rio de Janeiro (Brésil) - Mercredi 20 juin 2012