Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle...

Par Irreguliere

Quand le temps est maussade, je me sens toujours d'humeur baudelairienne. En particulier il me vient à l'esprit ce poème du Spleen dont les mots traduisent à la perfection cet état de mélancolie vague dans lequel me mettent les nuages noirs qui s'accumulent dans le ciel. Et moi qui suis un être solaire, c'est peu de dire que la météo actuelle me mine le moral. D'autant que je suis en train d'ajouter les dernières touches à mon roman, et que couper le cordon ombilical m'angoisse assez. Et c'est amusant (enfin, pas tant que ça) parce que l'autre jour, j'ai appris une nouvelle qui m'a profondément attristée, et ce jour-là, il faisait beau, et j'ai écrit un texte qui disait en substance que le monde s'écroulait et que pourtant le soleil brillait, que le ciel était bleu et que les oiseaux chantaient alors qu'ils auraient dû pleurer, que l'orage aurait dû éclater et les cieux se déchirer. Depuis, c'est ce qui s'est passé, on n'a pas revu le soleil. Je me sens un peu coupable...

Mais, bref, Baudelaire...

Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle

Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis,

Et que de l'horizon embrassant tout le cercle

Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits ;

Quand la terre est changée en un cachot humide,

Où l'Espérance, comme une chauve-souris,

S'en va battant les murs de son aile timide

Et se cognant la tête à des plafonds pourris ;

Quand la pluie étalant ses immenses traînées

D'une vaste prison imite les barreaux,

Et qu'un peuple muet d'infâmes araignées

Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,

Des cloches tout à coup sautent avec furie

Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,

Ainsi que des esprits errants et sans patrie

Qui se mettent à geindre opiniâtrement. -

Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,

Défilent lentement dans mon âme ;

l'Espoir, Vaincu, pleure, et l'Angoisse atroce, despotique,

Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.